Allongé sur un tatami, les jambes croisées, Otomo contemple le plafond de verre. La migraine lui enserre la tête de ses mains de fer. Entre ses doigts, la photographie de Shiori Fujita et l’autre ramassé sur le corps Uchito Kawagame. Pourquoi Akira n’a-t-il rien remarqué ? À l’intérieur de son crâne résonnent les cris de mille tengus. Du bout de l’index, il en effleure la surface, tandis que le long de ses joues roulent des larmes de cristal.
– – san ? Serrez ma main, si vous m’entendez !
Il obéit sans comprendre. Une douleur sourde pulse dans son ventre, violente, comme si un oni fouillait ses entrailles à l’aide d’un fer rouge.
Étendu dans la neige, il sent la vie qui le fuit. Les secours sont là ; on le dégage. Des visages se penchent sur lui, tous semblables. Sans savoir pourquoi, il sourit tandis que ses bras glissent le long de son corps. « Ore ha omae ». L’écho de sa voix se répercute dans son esprit, alors que des tourbillons de neiges tombent depuis le ciel. Un voile blanc passe dans ses yeux.
–… perd ! hurle quelqu’un.
Mais il ne s’en inquiète pas ; un sourire béat sur les lèvres. Il le voit ; il flotte au-dessus de son visage. Il est si calme. Gracieux, il pose un doigt sur ses lèvres qui se couvrent de ténèbres, comme le reste de son être. Bientôt, il n’est plus qu’une tache sombre dans l’horizon, sa vue se brouille ; il sombre.
– Pourquoi tu ne dis rien ? fait la voix boudeuse.
Otomo dévisage la créature qui s’adresse ainsi à lui. Les cheveux décolorés, un maquillage outrageux et des bas filés, il a envie de la repousser. Elle glisse une main entre ses cuisses, mais rien ne se passe.
– Pourquoi tu veux pas jouer ? marmonne-t-elle faussement vexée, comme il l’éconduit.
– Et si tu allais nous chercher du champagne, balance-t-il.
La fille applaudit, ravie, puis se lève et court en direction du bar. Sa jupe courte se soulève et dévoile tout de la culotte échancrée qu’elle porte en dessous. Par les trous de ses bas, il aperçoit sa chair encore ferme et claire.
– Qu’est-ce que tu regardais comme ça, espèce de polisson ? lui chuchote-t-elle comme elle se glisse sur la banquette, une bouteille à la main. Moi, hein ! Sinon…
Otomo sourit et s’empare du magnum qu’il débouche d’un coup sec dans un bruit sourd. À côté de lui, l’hôtesse frappe des mains ; elles sont épaisses et ses doigts sont boudinés. Il la sert, puis lui-même. Dans sa bouche, le vin pétillant n’a aucun goût, comme cette fille à qui il tend son meishi. Puis, il se lève. La soirée s’achève, une autre commence.
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