Tokyo, vendredi 6 aout 2032
« Bienvenue au Japon »
La première fois qu’il avait lu ces mots, sur ce même panneau mural, c’était en rentrant de son voyage de noces à Hawaï, 4 ans plus tôt. Il se souvenait de cette longue carte illustrée, de ces fleurs de cerisiers, du mont Fuji, des érables rougis par l’automne et de cette japonaise en kimono. Il eut soudain l’impression de remonter le temps.
Keitaro venait de passer les douanes de l’aéroport de Narita après un long et pénible voyage. Dans sa tête, la mélodie de Rhapsody in Blue diffusée par les casques RB de la sécurité continuait à jouer à l’infini – ce qui arrivait chaque fois qu’il devait passer au scanner.
Qu'il était bon d'avoir enfin les pieds sur terre ! Et quel étrange sentiment de fouler à nouveau le sol de chez soi après un an d'absence. Autour de lui, tout semblait nouveau et familier à la fois. Les idéogrammes sur les pancartes d'information ; les distributeurs de boissons tous les vingt mètres ; les bandes jaunes en relief, sur le sol, pour les mal voyants. Il redécouvrait tout, comme un étranger dans son propre pays. Et chaque fois, il s'extasiait : tout était si facile.
Il traîna sa lourde valise jusqu'à la ligne de train. Arrivé sur le quai direction Tokyo, il retrouva avec nostalgie les petits bruits qui rythmaient les transports en commun japonais : les jingles pour accueillir les passagers en gare ; les faux gazouillis d’oiseau pour détendre l’atmosphère ; les phrases typiques de mise en garde, pour tout et n’importe quoi. Keitaro soupira d’aise sans se soucier d’avoir l’air idiot.
Je suis chez moi.
Son regard s'arrêta sur une affiche publicitaire grand format, placardée le long des rails. Un nouveau parc d’attraction ? « Zombiland… Puisque la mort ne fait plus peur, venez frémir d'horreur dans notre fosse aux zombies. »
Puisque la mort ne fait plus peur… Un premier indice prouvant que le temps ne s’était pas arrêté depuis son départ. Ici aussi, la réincarnation avait fait son chemin dans les esprits, y compris dans ceux des promoteurs.
Sa bonne humeur décrut aussitôt. Ce sentiment de familiarité n’était peut-être qu’une illusion. À quel point les choses avaient-elles changé au Japon ?
Il repéra un kiosque un peu plus loin, s’en approcha et choisit un quotidien. Il y ajouta une bouteille de thé vert glacé, dont la douce amertume lui manquait. Au moment de lui rendre la monnaie, le vendeur leva la tête vers lui et le dévisagea d’un drôle d’air. En s’éloignant, Keitaro jeta un œil en arrière et l’aperçut héler sa collègue et pointer son menton dans sa direction. Aucun doute, ils parlaient de lui.
Mal à l’aise, il retourna se poster derrière la ligne jaune en évitant de croiser le regard d’autrui. Et si le commerçant l’avait reconnu ? Il avait peut-être vu son visage dans le journal. Et si lui l’avait repéré, combien d’autres, autour, le dévisageaient à cet instant ? Il se sentit épié. Pourvu que les études de Rhapsody Blue ne soient pas sujet à discorde dans son propre pays... Sinon, il ne pourrait plus circuler en paix ! Ses mains devinrent moites. Et au niveau de sa cuisse, une douleur vive lui rappela cette balle qui s’y était logée. Il grimaça. S’il était guéri physiquement, le traumatisme demeurait.
Pour se calmer, il fixa son regard sur un point droit devant lui. C’est-à-dire, sur l’affiche de la maison hantée qui avait retenu son attention plus tôt. Lui qui avait toujours détesté les histoires de zombies, il éprouva de la compassion pour ce petit binocleux qui, dessiné en petit sur l’affiche, tentait d’échapper à la horde. À cet instant, quelque chose le frappa. Il redressa ses nouvelles lunettes et plissa les yeux pour mieux voir.
Oh non… Ce serait moi ?
Si le costume, la coupe de cheveux et la forme du visage correspondaient, son look habituel était loin d’original.
Arrête ! Tu deviens paranoïaque.
Lorsque son train arriva, il trouva une place sans souci, ni voisin. Après s’être laissé un instant bercer par le bruit des rails, il se sentait prêt à se confronter avec la réalité. Que s’était-il passé, ici, pendant son absence ? Que devait-il craindre, ou non ?
Il ouvrit grand son quotidien et parcourut les titres en essayant de repérer ceux qui avaient trait à la réincarnation. Il s'intéressa à l'histoire d’un pêcheur retraité qui s'était laissé mourir au large, dans l'espoir de se réincarner en une espèce marine. Il avait laissé une lettre à son domicile expliquant sa décision, ainsi qu'un testament à destination de sa fille, fâchée avec lui depuis des années.
Quelques pages plus loin, il se passionna pour un article au sujet de la couronne impériale : « Le prince héritier sera-t-il une princesse ? » L’administration aurait trouvé le jumeau RB du père de l’empereur actuel, une petite japonaise de 2 ans et d’origine modeste. Fallait-il réformer le système et lui accorder le titre d’héritière à la place du prince actuel ? Le débat faisait rage.
En arrivant aux dernières pages, ses yeux s'arrêtèrent sur une réclame touristique vantant les bienfaits du pèlerinage de Shikoku[1] : « Pour les âmes éreintés qui ont perdu foi en demain. Ressourcez-vous sur nos sentiers, dormez dans les temples le long du chemin. Une expérience unique dont vous sortirez transformé. »
Pourquoi pas ?
Il prit l’annonce en photo, puis replia son journal, rassuré par ces nouvelles plutôt positives. Il passa le reste du trajet à observer le paysage et à somnoler, profitant de ces derniers instants de sérénité avant l’épreuve, tant redoutée, du lendemain.
Quelle étrange sensation… La liberté. Pas de réveil qui sonne depuis plusieurs jours. Pas de boss, pas de collègues, pas de responsabilités. Pas besoin de s’inquiéter pour l’argent pendant les quelques mois à venir. Fini de lutter, de convaincre, de réparer, de s’excuser.
De rêver, aussi.
Son travail à Rhapsody Blue était bel et bien terminé. Il ne le réalisait que maintenant, depuis le 3ème étage de sa chambre d’hôtel. Il avait hésité à dormir dans son appartement de Kagurazaka, mais il n’avait pas eu le courage d’affronter les souvenirs qu’il y avait laissés.
Le matin s’était levé sur Tokyo. Il était temps d'y aller… et il se sentait prêt.
Deux arrêts de métro et cinq minutes de marche plus tard, il parvint au café-boulangerie où il avait rendez-vous. Trop en avance, il entra, commanda un allongé et s'assit proche de la vitre donnant sur la rue.
La voilà…
Une femme le rejoignit bientôt. Petite, menue, aux longs cheveux lisses ornés d'une petite barrette à fleurs. Elle le repéra très vite, s'approcha et lui sourit en inclinant la tête. Il l'imita d’un geste un peu raide et la suivit des yeux lorsqu’elle partit s’acheter à boire.
« Bonjour, Sao-chan », lui dit-il quand elle revint s'asseoir.
Il se gratta la gorge ; sous le coup de l'émotion, sa voix sortait de façon aussi craquelée que le son d’un vieux disque. Ses mains tremblaient. Il entoura la tasse de porcelaine avec ses paumes pour se redonner contenance. Il se croyait prêt… en fait, pas du tout. Au moins, il n’avait plus envie de fuir.
« Bonjour, Kei-chan. »
Il lui trouva plutôt bonne mine. Sa peau, toujours aussi pâle, laissait entrevoir quelques veines, fines et bleues, à l'intérieur de ses bras. Mais elle n'avait plus ces horribles poches sous les yeux, ni les joues aussi creuses qu'avant. Il l'observa un moment, sans parler, sans bouger, sans rien. Il s’emplit de sa personne. Il détailla les grains de beauté parsemant son visage. Il retrouva ce petit menton et ses oreilles dont le lobe était plus large que la pointe. Saori n’était pas un pays, mais il la redécouvrait, elle aussi. Et la trouvait toujours aussi belle. À sa façon.
Gênée par cet examen, elle baissa la tête et porta ses deux mains à ses joues.
« o-hisashiburi[2], dit-elle.
— Oui... Ça fait longtemps. Merci d’être venue. »
Saori hocha la tête, les yeux braqués sur la table. Elle ne souriait plus. C’est qu’il en avait mis, du temps, pour la rejoindre ! Et il comprenait sa réaction. Elle ne lui adressa pourtant aucun reproche et répondit simplement :
« C’est normal.
— Comment vas-tu ? »
Cette impression de poser le pied sur la surface d’un lac gelé… Keitaro pesait ses mots comme si le sol pouvait craquer au moindre faux pas.
« Ça va. Bien mieux, en tout cas.
— Tant mieux, alors.
— Et toi ? Ta blessure… »
Ainsi, elle était au courant... Évidemment qu’elle l’était ! La nouvelle avait circulé dans le monde entier. Mais comme elle ne lui avait rien dit, rien envoyé…
« C’était long à guérir, mais ça va. Je boite encore un peu, mais je n’ai plus besoin de béquille. »
Elle hocha la tête, lèvres pincées. Que pensait-elle à cet instant ? Keitaro avait toujours autant de mal à lire ses émotions. Un court silence s’ensuivit, qu’elle se hâta de briser :
« Tu sais que tout le monde connait ton nom ici, maintenant ?
— Ah vraiment ? Je me demandais pourquoi les gens me regardaient bizarrement… »
Un rire discret s’échappa de sa gorge, ce qui le fit sourire : cette petite canine de travers aussi, elle lui avait manqué. Quant à sa remarque, il s’en doutait déjà, mais elle exagérait sans doute un peu, pour lui faire plaisir. Et ça marchait : d’un coup, il se sentit plus confiant. Était-ce de l’admiration qu’il percevait dans ses yeux ? Si oui, il avait peut-être encore une chance ! Elle ne signerait peut-être pas les papiers de divorce qu’il voyait dépasser de son sac à main…
« Ah ! Tiens, regarde. »
Il l’avait apportée juste pour lui montrer : la petite peluche à son effigie, offerte par Angélica.
« C'est toi ? demanda-t-elle, incrédule.
— Oui !
— C'est mignon. »
Elle le prit dans ses mains pour l'examiner, mais ne semblait nullement impressionnée… Dommage. Il avait espéré lui arracher quelques cris de souris, comme ceux qu’elle proférait devant les vitrines de ses pâtisseries favorites.
« Et sinon, ça va, poursuivit-il. Je suis juste très fatigué. J’ai démissionné, aussi. Comme tu sais. »
Elle savait – grâce à sa lettre, et ne fit aucun commentaire. Était-ce le bon moment pour lui parler de son fils ? Elle devait se demander la même chose, car elle le devança :
« Jun va bien aussi. Merci encore pour ta lettre. J’espère que ça ne t’a pas causé d’ennuis…
— Non… Personne ne s’en est aperçu.
— Tu avais deviné juste, c'était bien ma prof de piano. Maeda-san me donnait des cours privés quand j'étais enfant ! Je l'aimais beaucoup... »
La joie dessina quelques fossettes sur ses joues et fit gonfler son torse. Il se félicita de lui avoir offert ce cadeau malgré les risques encourus.
« C’est incroyable, quand on y pense. J'ai l'impression que deux personnes vivent en lui. Pourtant, rien n'a changé dans son caractère. Je me fais sans doute des idées… »
Keitaro baissa d’un ton pour lui expliquer :
« Dans certains cas, l'ancienne personnalité transparait un peu. Dans les habitudes, les phobies, la façon de parler ou les souvenirs, surtout quand l'enfant est très jeune. Mais ne t’inquiète pas. Jun reste unique, ce n’est pas qu’un réceptacle.
— Oui, je sais déjà tout ça. Merci beaucoup… »
Elle détourna les yeux, l’air gêné.
« Pour être honnête, je le savais aussi, pour Maeda-san. Avant ta lettre. »
Il haussa les sourcils, surpris.
« Mon père... »
Mais bien sûr... Comment n'y avait-il pas pensé avant ? Kikuchi pouvait aussi accéder à la base de données des morts. Et il avait eu moins de scrupules que lui – non seulement il avait enfreint le règlement en révélant cette information à sa fille, mais il était toujours à son poste. Keitaro serra la mâchoire, de rage et de déception. Il n'avait servi à rien, une fois de plus. Son cadeau n’avait aucune valeur puisqu’elle était déjà au courant.
« Rassure-toi, je ne dirai rien, se hâta de préciser Saori. Et puis ton geste m'a touchée… Tu as pris un risque. Rien ne t'y obligeait. »
Il lui sourit, sans conviction. Puis il se souvint de son café, dans lequel il n’avait pas encore trempé les lèvres. Il en but quelques gorgées, le temps de digérer son amertume. Saori en profita pour entamer, elle aussi, son chocolat froid qui faisait trois fois la taille de sa boisson à lui.
Maintenant qu’ils avaient évoqué la lettre… Allaient-il enchaîner sur le divorce ? Qui oserait évoquer le sujet en premier ? Saori soupira et regarda par la fenêtre. Le moment était-il venu ?
« Kei-chan… Je tenais à m’excuser, moi aussi.
— T’excuser… ?
— De… mon comportement. Mon départ de la maison. Et pour Jun... J'imagine qu'il te manque. »
Keitaro reposa sa tasse et observa, distraitement, les motifs tracés dans la mousse de son café noir. Bien sûr qu’il lui manquait. Était-ce vraiment la peine de répondre ?
« J'ai fait un matanitiburû[3] », enchaîna Saori.
« Un... quoi ? » voulut-il demander, mais il s'abstint de crainte de passer pour un ignare.
« Au début, je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Je connaissais le phénomène, bien sûr. Mais je... crois que je refusais de voir la vérité. Je pensais que le problème était différent. »
Elle se tut, chercha ses mots, reprit une gorgée de son chocolat. Keitaro se garda d’intervenir, malgré sa frustration devant ce terme inconnu.
« Mes parents n'ont rien arrangé. Mon père, surtout… Je crois qu’il déteste vraiment ton oncle, qui l’aurait humilié plus d’une fois – je l’ai entendu, un jour, en parler avec ma mère. L’idée de faire partie de la même famille le répugnait. »
Keitaro savait déjà qu’il existait de vieilles querelles entre Kikuchi à son oncle, raison pour laquelle leurs familles avaient toujours évité de se rassembler pour les fêtes… mais à ce point ?
« Il me disait aussi que tu étais un incapable. Que tu ne savais pas t'y prendre comme père et comme mari. Que tu me délaissais. Qu’on ne pouvait rien attendre de bon de la part du neveu de quelqu’un d’aussi détestable que son boss à lui. Que tu n’étais pas fiable et que tu nous abandonnerais, comme ton ancien travail. Et je… me suis laissée convaincre. »
Cette volée de reproches lui donna l’impression de se retrouver en plein dans l’œil d’un typhon. Il avait déjà une idée de ce que lui reprochait Kikuchi, mais ne pouvait s’empêcher de trouver son raisonnement injuste et fallacieux. Ce n’est pas parce qu’on abandonne un travail qu’on ne sait pas gérer un ménage. Et le punir pour les humiliations infligées par son oncle n’avait, pour lui, aucun sens.
« Je crois que ça m’arrangeait de le croire, reprit Saori. J’étais très influençable, à ce moment-là. Et je me sentais moins coupable de penser que le problème venait de toi, plutôt que de moi...
— Et ce problème… ça consiste en quoi, exactement ?
— Tu ne sais pas ? »
Elle le dévisagea, incrédule. Il soutint son regard avec le plus d’humilité possible.
« Bon, très bien… Un matanitiburû, ça vient souvent d’une grande fatigue après la naissance d’un enfant. D’un sentiment de solitude aussi, et d’un bébé difficile à gérer. En plus d'un manque de soutien ou de compréhension des proches », ajouta-t-elle timidement en levant les yeux sur lui.
Un pli se forma entre les sourcils de Keitaro. Un horrible sentiment de culpabilité s'abattit sur ses épaules. Tu parles d’un héros ! Il n’avait juste rien compris. Kikuchi avait peut-être eu raison de l’écarter de sa fille.
« On devient hypersensible, poursuivit-elle. On est angoissé, on se sent mal dans sa peau. On se met à détester sa vie et son enfant. On se dit que tout serait plus facile s'il n'existait pas. Je ne savais plus comment réagir quand il pleurait. Certains jours, j'avais envie de l'étouffer... De le jeter par la fenêtre. Et en même temps, je m'en voulais terriblement de penser ça. Oh, Kei-chan, j'avais tellement honte ! Et je n'osais pas l'avouer, à personne. Pas même à toi, ni à mes parents. J'avais peur d'être jugée, rejetée... Je me demandais tous les jours ce qui n'allait pas avec moi. Pourquoi je n'arrivais pas à être heureuse. Je me sentais inutile et bonne à rien. En puis, comme tu sais, je m'emportais pour un rien et je culpabilisais ensuite. J’avais l’impression d’être un monstre... Et si je me confiais, je craignais qu'on me retire mon enfant. »
Keitaro s’aperçut qu’il retenait sa respiration. Il reprit son souffle dès qu’elle s’interrompit pour boire. Jamais il ne l’avait entendu parler aussi longuement et intensément d'un sujet. Tout devenait plus clair, il comprenait enfin.
« J'ai fini par me réfugier chez mes parents. C'était la solution la plus facile... Je sais que j'aurais dû être franche et t'expliquer ce qui n'allait pas. Mais je ne le comprenais pas moi-même. Et puis, je… J’étais tellement confuse que je… Je n’ai pas réussi à garder contact avec toi. Je suis vraiment désolée… »
Son visage se crispa. Elle évita son regard et resta silencieuse un moment.
« Et comment as-tu compris ? Pour le mata… matani… ?
— C'est un psy qui m'en a parlé. Quelqu'un m'a encouragé à aller consulter, il n'y a pas si longtemps. J'étais réticente, au début... J'avais peur qu'on me croie folle. Finalement, ça m'a fait beaucoup de bien. Ça, et ta lettre, ajouta-t-elle avec un sourire. Et de savoir pour Maeda-san, mon professeur de piano... »
Keitaro déglutit. Ses lèvres s'étirèrent aussi, mais sa culpabilité et ses regrets l'empêchaient de se réjouir de quoique ce soit.
« Sao-chan... Je suis désolé. Pour tout. »
Il avait envie de lui prendre la main et de la serrer fort, mais ce ne serait pas correct... Il ferma les yeux, soupira. Puis il se fit violence et tendit sa paume pour en couvrir les doigts blancs de Saori. Elle tressaillit, mais accepta le contact.
« Je me suis comporté comme un idiot. Je n'ai rien compris. »
Doucement, elle retira sa main, tapota deux fois le dos de la sienne, puis ramena ses bras le long de son corps.
« Ça va mieux, maintenant. C'est l'essentiel, non ?
— Oui... J'imagine. »
Et le divorce ? Est-ce qu’elle aurait oublié ? Ou peut-être que ça n’avait plus d’importance, maintenant qu’il était rentré ?
« Sao-chan… Je sais que je m’y prends un peu tard te pour demander ça, mais... Est-ce qu’il y a quelque chose que je peux faire pour toi ? »
Elle fit craquer les articulations de ses doigts, l'un après l'autre, comme lorsqu’elle s’apprêtait à jouer du piano. Elle réfléchissait.
« Oui. Il y a quelque chose…
— Tout ce que tu voudras. Je t'écoute. »
S’il pouvait faire pencher la balance, l’inciter à ne pas signer, la convaincre de lui laisser une autre chance, il était prêt à tout faire. Absolument tout.
« Accepterais-tu de revoir ton fils ?
Keitaro écarquilla les yeux, incrédule. Il ne s’attendait pas à ça.
« Tu en doutes ? Vraiment ? »
Elle sourit à nouveau, mal à l'aise. Puis ses lèvres s'affaissèrent et se mirent à trembler. Voilà qui n’était pas bon signe…
« Non, bien sûr. Kei-chan... Je suis vraiment désolée. J'ai fait quelque chose d'horrible.
— Mais non... Enfin, oui, c'était difficile d'être séparé de Jun pendant tout ce temps. Mais j’ai ma part de responsabilité. Je me suis réfugié dans le travail au lieu de t’aider ou d’essayer de comprendre. Et puis, j’ai accepté de partir, puis de rester là-bas, en Floride. Ton père a raison. J’ai été lâche. J’ai tout gâché. C’est de ma faute, en réalité.
— Non. C'est la mienne...
— Disons la nôtre ?
— Si tu veux. En tout cas, j'aimerais que tu refasses partie de sa vie. Ce n'est pas juste de t'empêcher de le voir... »
Il redressa le dos et prit une grande inspiration, plein d'espoir.
« Dès que tu seras prête.
— Bientôt, je te le promets. Avant ça, j'ai quelque chose d'important à te dire. Et j'espère vraiment que tu ne vas pas me détester pour ça. »
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Notes de bas de page :
1. Une des quatre îles principales de l'archipel japonais
2. « Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vus », en japonais
3. « maternity blue » prononcé à la japonaise. Au Japon, c’est ainsi que l’on désigne une dépression post-partum
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