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Assis sur les gradins, bien au milieu, Zeik observait les joueurs sur le terrain.

Ils étaient une dizaine là, à s'entraîner. Rien qu'en les observant, il sut quels joueurs étaient les titulaires et lesquels étaient les suppléants. La différence entre les deux était minime, Zeik arrivait quand même à la voir. Les mouvements des titulaires étaient différents, plus précis, plus rapides, mieux calculés. Ils trahissaient l'habitude que les joueurs avaient prise lors des matchs.

- Alors comme ça, tu t'intéresses au basket ?

Zeik eut un sursaut. Concentré sur les joueurs, il en avait oublié le reste du monde qui l'entourait.

- Désolé, je t'ai fait peur ?

Sâme était amusé, cela se voyait à son regard. La jeune fille l'avait accompagné au grand gymnase, pour voir l'équipe de basket. Il était seize heures, l'heure d'entrainement de l'équipe, la plupart du temps.

Pour les deux adolescents, leurs cours étaient terminés. Sâme aurait pu rentrer chez elle, au lieu de cela, elle avait décidé de rester avec le petit nouveau. De peur qu'il se perde peut-être.

- Tu m'as surpris, c'est tout. Je les regardais jouer. Tu disais ?

- Je te demandais si tu t'intéressais au basket.

Zeik fit un large sourire. Des étoiles se mirent même à briller dans ses yeux.

- Ce n'est pas que je m'y intéresse...

- Qu'est-ce que tu fais là alors ?

- C'est plus que ça. C'est une passion, que j'ai depuis que j'ai quatre ans à peu près.

Il appuya ses coudes sur ses genoux et sa tête sur ses mains liées.

- J'ai commencé à cinq ans dans un club basique. Puis au collège, j'ai rejoint l'équipe. Je ne l'ai pas quitté de ma scolarité. La première année en tant que suppléant, à partir de la deuxième, j'étais titulaire. Tous les titulaires de l'équipe sont dans le même lycée maintenant. Là où j'étais, durant un court mois. On était une équipe vraiment soudée ! Mon père m'a inscrit dans ce lycée parce qu'il y a une équipe.

Sâme regarda l'entrainement. Les ballons volaient dans tous les sens, passaient de joueurs en joueurs, ou allaient directement dans les paniers. Les dribbles raisonnaient dans tout le gymnase. Elle se concentra de nouveau sur le garçon à ses côtés.

- Quand tu étais au collège, vous avez gagnés des matchs ?

- Quelques un, oui.

- Tu avais quel rôle ?

- Attaquant, en quelque sorte. J'aime aller au-devant des joueurs. En revanche, la défense n'est pas mon point fort, les rebonds encore moins. C'était le rôle d'autres joueurs dans l'équipe.

Sâme eu un petit rire.

- En fait je te pose la question, mais je n'y connais absolument rien au basket.

Les joueurs firent une pause. Certains s'assirent, buvant de l'eau, d'autre restaient debout. L'un des joueurs, tout en s'étirant, parlait avec homme. Une personne d'une quarantaine d'années, aux cheveux bouclés et grisonnant. L'homme remonta ses lunettes sur son nez.

- Lui, c'est Monsieur Hector. Professeur de sport et coach de l'équipe de basket. Le gars avec qui il parle, c'est Nathan Lecter, le capitaine de l'équipe. Toutes les filles que tu vois dans les gradins viennent quasiment que pour lui. Bon elles viennent aussi pour l'équipe en général. Faut dire qu'ils sont tous... Enfin bref, tu as compris je crois.

Elle fixa les joueurs. Il fallait avouer qu'ils avaient tous un certain charme. Plutôt grands, bien formés, musclés, des yeux brillants. Des joueurs de basket comme on pouvait les imaginer. A croire qu'ils étaient avant tout sélectionnés pour leur apparence physique que pour leurs capacités à jouer. Le plus beau restait le capitaine, il n'y avait pas de doute là-dessus.

Nathan Lecter. Un visage bien taillé, qui pouvait être qualifié de parfait. Des cheveux bruns, tenues en l'air par du gel. Un constant sourire en coin. La tenue d'entrainement qui pouvait en dégoûter certain, lui allait à merveille.

- Ici, toute l'équipe est passionnée. Mais seuls les terminales sont titulaires en général. Ce sont ceux qui ont le plus d'expérience. Et... Tu m'écoutes Zeik ?

Dans la même position depuis dix minutes, l'adolescent était en parfaite fixation.

- C'est moi où tu es en admiration devant le capitaine ?

- Pardon ?

Il se redressa, réalisa que, en effet, il n'avait pas lâché Nathan Lecter des yeux.

- Non, j'étais perdu dans mes pensées.

Sâme était amusée, encore. Toujours. Un rien l'amusait. Cela n’en était pas croyable. A croire qu'elle était la joie de vivre incarnée.

- Comment tu es au courant de tout cela ?

- Quoi donc ?

- Le nom du capitaine, du coach, tout ?

Sâme fit un mouvement d'épaules, soulevant ses belles boucles blondes.

- Je suis curieuse, et je m'intéresse à tout. En plus de ça, deux jours après la rentrée, j'ai rejoint le club du journal du lycée.

- Parce qu'il existe un club du journal du lycée ?

- Oui. Et pour ta gouverne Zeik, le nom du capitaine de l'équipe n'est un secret pour personne.

- Je suis arrivé au lycée hier.

Elle allait répondre, mais ne trouva rien à rétorquer pour se défendre.

- Tu marques un point, finit-elle par avouer.

Zeik se retourna vers l'équipe. Il ne voulait pas les lâchait des yeux. Ils ne jouaient pourtant plus, il n'y avait donc rien à regarder, à part les joueurs eux même peut être.

- Tu veux rejoindre l'équipe ? Le questionna Sâme.

- J'aimerais bien, mais... I don't know.

A défaut de trouver les mots en français, l'anglais lui était venu tout naturellement. Au moins la jeune fille le comprenait, ce n'était pas comme s'il venait de parler en japonais.

- Tu ne sais pas quoi ?

- Comment m'y prendre, si je peux, s'ils vont m'accepter. Juste dire que j'ai envie de joueur ne suffit pas.

- Tu m'as bien dit que tu étais bon joueur non ?

Il fit un hochement de tête.

- Laisse-moi faire, timide petit nouveau.

Elle se leva, descendit les quelques marches des gradins.

- Sâme ! Qu'est-ce que tu fais ?

La jeune fille alla droit vers le coach et le capitaine. Sans aucune timidité ni gène, elle leur parla. Plusieurs fois, elle jeta de rapides regards au garçon restait assis sur les gradins. A un moment donné, elle le montra même du doigt. Zeik avait envie d'être une souris pour se cacher dans le plus petit des recoins de ce gymnase. Il était au centre de la conversation, c'était une évidence.

Dans un mouvement parfaitement synchronisé, le coach et le capitaine se tournèrent vers lui. Monsieur Hector lui fit signe de venir.

- Je vais la tuer.

Au fond de lui, il ne le pensait pas. Il se vit même remercier silencieusement la jeune fille. Il se leva après quelques secondes d'hésitations, descendit. En chemin, il croisa Sâme qui remontait.

- Ils veulent que tu leur fasses une petite démonstration. Éblouis-nous.

- Sâme, je n'ai même pas mes affaires.

Il se cherchait des excuses, alors que tout en lui criait qu'il avait envie de jouer.

- Tu vas jouer cinq minutes. Allez vas-y !

A côté des joueurs de l'équipe et du coach lui-même, il se sentait petit. Il fallait dire que du haut de ses un mètre soixante-neuf, il n'était pas très grand pour un joueur de basket.

- Alors c'est toi le nouveau ? Zeik se contenta d'acquiescer.

- On entend beaucoup parler de toi, même en salle des professeurs. Faut dire que ce n'est pas tous les jours que l'on accueille un étudiant étranger.

Monsieur Hector fit un sourire.

- Enfin... cette jeune fille nous a dit que tu savais joueur au basket. Tu nous montres ?

- Je n'ai pas de tenue monsieur. J'étais juste venue observer...

" Arrête de te chercher des excuses Zeik Kaîda" pensa-t-il.

- Pour juste une démonstration, tu pourras t'en passer je pense.

Zeik jeta un regard vers les gradins, vers Sâme. La jeune fille rayonnait. Ce n'était plus la seule qui les observait eux particulièrement. Tous ceux des gradins avaient les yeux rivés sur eux. Regardait-il encore et toujours le capitaine ? Ou s'interrogeaient-ils sur la présence de l'adolescent sur le terrain ?

Pour Zeik, cela importait peu.

- Bien Monsieur.

- Parfait. Tu vas jouer contre notre capitaine, en « un contre un ».

Nathan Lecter. Zeik ne s'attendait pas à joueur dès la première fois contre lui. De plus de loin il avait peut-être des allures de sportif charmeur. En face de lui, il avait plus l'impression de lire sur son visage quelque chose comme « je vais te descendre plus bas que terre ». Ce n'était pas vraiment rassurant.

- En trois coups. On marque tous les deux. A celui qui met le plus de panier.

Le capitaine attrapa un ballon. La seule vue de ce simple objet, rond et orange, suffisait à faire oublier le monde extérieur au garçon.

Sur un terrain de basket, il rentrait dans une bulle, ou seul ce sport comptait. D'un geste presque mécanique, il retira sa veste. Il était en jean et chemise serrée, loin d'être la tenue idéale.

Ils allèrent au milieu du terrain, alors que monsieur Hector s'assaillait sur un banc, ne les lâchant plus des yeux.

- Tu es prêt le nouveau ?

- E e (oui)

Nathan fit rebondir le ballon sur le parquet du gymnase. Plusieurs fois. L'endroit était devenu tellement silencieux que le bruit du ballon frappant le sol raisonna partout autour d'eux. Un son fort et régulier.

Zeik ne lâchait plus son adversaire des yeux. Pour lui, rien d'autre ne comptait que le ballon et la trajectoire qu'il allait suivre. Il n'y avait rien de plus important que cela.

Ils se mirent en position. Le capitaine était calme et d'une précision exemplaire.

Il fut rapide dans ses mouvements. Plus rapide que Zeik s'y attendait. Il n'eut pas le temps de compter jusqu'à cinq, que Nathan c'était déjà élancé. Le ballon rebondissait à une allure folle. En deux pas, il fut au niveau de Zeik. En quatre, il l'avait dépassé, sur la gauche. Le garçon se retourna, il ne pouvait déjà plus l'atteindre. Le capitaine, sans feinte, alla marquer, alors que Zeik avait à peine bougé de sa place.

L'adolescent avait perdu la première manche. Pourtant, il souriait.

- Parfait...

- Alors le nouveau ? Je pensais que tu savais jouer ! Même un débutant aurait fait mieux que toi.

Nathan avait pris un air arrogant qui cassait avec le charme qu'il pouvait avoir.

Pendant quelques minutes, au début, il l'avait peut-être admiré. A présent, Zeik sentait qu'il ne l'aimait pas. Cela n'irait pas en s'arrangeant.

Il allait pourtant devoir l'accepter s'il rejoignait l'équipe. Si...

- Je ne suis pas un débutant !

Il alla récupérer le ballon, le fit tourner entre ses mains.

- On a bien dit en trois fois ?

Il lui tendit le ballon.

- A celui qui marque le plus. Attention à la contre-attaque !

Les deux joueurs se remirent en position. Nathan le regardait avec son air fier et sûr de lui. Zeik ne perdait pas son sourire.

Le ballon se mit à rebondir, plusieurs fois. Le capitaine s'élança. Il fit un premier pas. Zeik en avait déjà fait deux. Il était sur le capitaine avant que celui-ci n'est le temps de le réaliser. Nathan allait utiliser la même technique que la première fois. Un rebond fort, avant de partir sur la gauche, bloquant les réflexes de l'adversaire. Il allait faire son dribble, n'en eut pas le temps.

Le ballon ne lui appartenait déjà plus.

On lui avait volé.

Zeik le lui avait volé.

L'adolescent allait déjà vers son propre panier. Il sauta, fit un simple dunk et se laissa retomber au sol. Le gymnase en resta sans voix. Lors de la première action, Zeik avait entendu les rires de certains et les remarques d'autres. Du moins, il les avait vaguement entendus, sans y prêter attention.

Tout ce qui comptait, c'était le ballon. Toujours le ballon.

Lui et l'objectif qu'il s'était fixé. Faire ravaler son arrogance à ce capitaine.

Il ramassa une nouvelle fois le ballon, lui rendit.

- Un partout. Dernière action.

De nouveau en position, Nathan attendit à peine avant de se lancer.

La peur de perdre le faisait foncer, là où il aurait dû prendre son temps.

Quatre pas, il était sur Zeik. Il le dépassa, le même mouvement, feinta, alla sur la droite, au lieu de la gauche. Peut-être avait-il réfléchi finalement. Zeik l'avait aussi anticipé. Avant que son adversaire ne fasse un pas de plus, il tapa dans le ballon. Il le récupéra alors qu'il rebondissait contre le sol et partit droit vers le panier. Nathan courut vers lui. Un lay-up et Zeik avait déjà marqué.

Deux à un pour le nouvel élève. Devant tous, le coach, le reste de l'équipe, les spectateurs et les admiratrices du terminal, Zeik avait gagné face au capitaine. Du revers de la main, il essuya la sueur qui perlait à son front.

- Il semblerait que je t’ai finalement sous-estimé le nouveau...

Ils rejoignirent le coach.

- J'étais titulaire dans mon équipe au Japon. J'ai appris à toujours analyser mes adversaires avant d'agir.

Nathan reprit son sourire en coin.

- J'essaierai de m'en souvenir.

Monsieur Hector, ravis par ce qu'il venait de voir, se leva.

- Comment t'appelles-tu jeune homme ?

- Zeik Kaîda.

- Zeik Kaîda... Tu es très prometteur. Nous avons déjà nos titulaires, mais du as vraiment du talent.

- Ce qui veut dire ?

- Sois là aux prochains entraînements et bienvenue dans l'équipe Zeik.