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tome 1, Chapitre 23 « Séparation » tome 1, Chapitre 23

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J’écoute avec attention les propos de la femme. Puisqu’elle vit ici depuis un moment, sans qu’il ne se passe rien, cela veut dire que les chambres sont sans danger. À moins qu’elle mente. Mais cela me paraîtrait un peu poussé. Avec minutie, j’ai observé ses gestes ainsi que les traits de son visage. Des gens dans cet état, j’en ai déjà vu. Les imiter n’est pas la chose la plus simple à faire.

Du coup, je décide de récupérer nos affaires puis de les mettre en sécurité dans le coffre de la voiture. Ensuite, j’irais faire un tour pour comprendre ce qui se trame dans le coin. J’aimerais retrouver la fille de la pauvre femme.

– Retournez tous dans vos chambres. Vous pouvez vous y enfermer si vous en ressentez le besoin…

– Et vous allez faire quoi ?

Il faut que le motard l’ouvre. À un moment ou l’autre, il allait bien poser problème.

– Je me prépare et je vais partir à la recherche de la jeune fille.

Aussitôt, mon interlocuteur saute sur l’occasion.

– Je vous accompagne !

Je secoue la tête, visage fermé.

– Je ne pourrais pas assurer votre sécurité !

– Comme si j’avais besoin qu’on assure ma sécurité, ricane-t-il. Vous allez faire quoi tout seul ?

Mon regard se tourne vers Miri.

– Je ne serais pas seul.

– Donc la gamine vous accompagne, mais pas moi ! Vous vous foutez de ma gueule ?

– J’ai toute confiance en elle.

Enfin presque… Je préférais qu’elle évite de tirer si je suis devant. Mais je me garde d’ajouter ses mots.

Comme je n’ai pas de temps à perdre, je coupe court à la conversation.

– Je reviens. Attendez là ou allez dans vos chambres.

Sans plus de paroles, je tourne les talons, Miri m’emboîte le pas. J’espère que ce crétin de motard ne va décider de jouer les gros bras. Je préférais éviter qu’il nous voie armer. On ne sait jamais l’effet que cela peut produire sur les gens.

Nous disparaissons dans l’ombre. Par instinct de survie, nous nous longeons les murs. Il n’y a plus qu’à retrouver notre chambre. Ma main fouille dans ma poche pour vérifier que la clé y est toujours. Comme attendu, mon doigt effleure le métal. Ma compagne est silencieuse.

– On récupère tout et on le charge dans la voiture.

– Et après ? questionne-t-elle.

– On joue les héros.

Sa main caresse la mienne.

– Tu es déjà mon héros !

Je la reconnais bien là. Pour dire ce genre de connerie, il n’y a qu’elle.

Un bruit de pas me parvient de l’arrière. Je me retourne à la hâte, en me demandant quel casse-couille peut nous suivre. Dans l’obscurité, j’attends. La personne s’arrête et paraît hésiter. Une lumière jaillit soudain. Je reconnais celle d’un téléphone portable. Le gamin…

– Euh…

Monsieur bouteille d’eau…

– Tu ferais bien de retourner dans ta chambre !

Mon ton est plus autoritaire que voulu.

– Oui, mais… Enfin… Est-ce que je peux vous aider ?

Je soupire.

– Oui, en retournant dans ta chambre.

Pas la réponse qu’il aurait souhaité. Miri n’ajoute rien et je me remets en route. Si je l’ignore, il se lassera sûrement. J’imagine que ce n’est pas un méchant gamin, mais je n’ai aucune envie de l’avoir dans les pattes. D’une oreille, j’écoute les bruits qui viennent de l’arrière. Agacé, je découvre qu’il nous suit toujours. Quelle langue faut-il parler pour qu’il comprenne ?

Devant moi, Miri a pris la tête de l’expédition. À l’aise, elle sait où elle va. Comme aucun mot n’est sorti de sa bouche depuis que l’adolescent nous a emboîté le pas, j’en déduis qu’elle compte sur moi pour nous en débarrasser.

Nous continuons à serpenter entre les allées qui permettent de se glisser entre deux chambres. De minuscules chemins où je peux toucher les murs en tendant les mains. Ce n’est pas un motel ici, c’est un labyrinthe.

– Monsieur ! chuchote le gamin dans mon dos.

Je lève les yeux au ciel.

– Quoi ?

– Si on ne sait plus où est sa chambre, on fait quoi ?

Sur ce point, je le comprends. Il fait noir, et tout se ressemble dans cette obscurité. Encore plus, lorsqu’on ne connaît pas l’endroit en question. J’imagine une succession de bâtiment minuscule relié entre eux par les auvents en ferraille. Est-ce pour protéger du soleil en journée ? En tout cas, cela ne fait qu’augmenter l’impression d’être oppressé alors que l’on marche en dessous la nuit.

Nous nous arrêtons devant une porte. J’imagine le sourire fier sur le visage de Miri. D’un geste lent, je tire la clé de ma poche, avant de lui tendre. Elle s’en empare puis déverrouille la serrure. Son entrée est prudente. Son corps se colle aux murs. Rien d’étrange ne se passe. J’avoue en être le premier soulagé. Mon intuition était juste.

– Je voudrais aider, reprend le garçon.

Pour peu, j’aurais pu l’oublier. Sauf qu’il ne lâche pas le morceau. Même s’il m’énerve, je n’ai pas envie de l’envoyer chier. Avec son honnêteté et sa gentillesse, il me rappelle quelqu’un.

– Écoute, gamin… Tu as de bonnes intentions, je n’en doute pas. Seulement, imagine que la maison de ton voisin est en flamme. Qu’est-ce que tu vas faire ?

– Appeler les secours !

Je me prends à sourire face à cette réponse spontanée.

– En suite, est-ce que tu vas surveiller la maison ou rentrer dedans pour voir s’il y a quelqu’un ?

Il y a un moment d’hésitation.

– Je crois que je surveillerais. J’aurais sûrement trop peur pour aller dans une maison en feu…

– L’instinct de conservation n’est pas négatif. Tu connais tes limites. Pour cela, tu n’iras pas te mettre en danger sans raison. C’est une bonne chose. Il ne sert à rien d’entrer dans une maison en feu alors qu’elle peut se révéler vide. Dans ce cas, c’est toi qui aurais mis en danger les pompiers.

Le gamin me fixe.

– Je crois que je comprends…

– À ton niveau, ce que tu peux faire, c’est veiller sur ton ami. Il ne m’a pas l’air dégourdi et je l’imagine bien se mettre en danger sans raison. Si tu évites qu’il se blesse, tu m’auras déjà bien aidé.

Un soupir s’échappe de la bouche de l’adolescent.

– Je sais que ce n’est pas glorieux. Mais pour un seul héros, il faut plusieurs personnes qui agissent dans l’ombre.

Il hoche la tête.

– D’accord. Je vais retourner dans la chambre avec Liam. Il faut juste qu’on trouve où c’est.

À ce moment-là, Miri ressort avec la valise. D’un geste triomphant, elle la pousse vers moi.

– J’ai tout récupéré. Même les clés de la voiture qui traînait dans un coin.

Son sourire, je l’imagine éclatant, en cet instant.

Ma main s’empare de la poignée.

– D’accord. On met ça dans le coffre de la voiture et on retourne à l’arrière. Ensuite, on fait du tourisme. On a un motel à visiter.


Texte publié par Nascana, 13 juillet 2022 à 00h58
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