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Moéna 2000 (22 ans)

La semaine a passé à une vitesse folle, et nous voilà déjà samedi. En bas, j’entends Valiana parler alors qu’elle joue. Pendant ce temps-là, je cherche parmi mes vêtements ceux qui conviendraient le mieux pour la soirée. Cliff m’avait proposé d’aller faire du shopping. Une bonne idée que j’ai refusée. Autant ne pas dépenser de l’argent pour rien. Ainsi, je pourrais offrir son garage tant désiré à mon bébé. Elle le veut, je le sais. J’ai l’impression que le père Noël pourrait lui ramener.

Moi, j’aimerais bien qu’il m’envoie une idée de tenue. Déjà, il faudra que cela se marie avec les cuissards que m’a offerts mon amoureux. Ma main finit par se saisir d’une robe dans un tas de vêtements. Noir à fines bretelles, elle est moulante et saura mettre mon corps en valeur. Je gagne la salle de bain avec pour l’essayer.

Même devant le miroir, j’hésite. Au fond, je me demande pourquoi je me mets une telle pression. Après tout, Cliff m’aimera quoique je porte. Les autres, je me fiche un peu de leur avis.

Une petite main pousse la porte.

– Maman t’es trop belle, me déclare ma fille.

Je souris. Pas sûr qu’elle soit très objective.

– Elle a raison, tu es magnifique.

Cliff me contemple avec des étoiles plein les yeux alors que Valiana se serre contre mes jambes. Je passe les doigts dans ses jolies boucles brunes. Elle a hérité des cheveux de mon amoureux. En un sens, j’en suis contente pour elle. Les miens sont fins et sans volume, raison pour laquelle je les garde au carré.

– Maman, tu vas où ?

– Promener avec une amie.

– Et moi ?

Je lui souris.

– Toi, tu restes avec papa. Il faut que tu sois bien sage.

Ma fille se met à bouder.

– Je voulais venir avec toi, maman…

– Non, tu vas rester avec papa. C’est lui qui te couchera.

De la panique se peint sur le visage de Valiana.

– Et mon bisou ? Je vais dormir comment sans mon bisou ?

Je m’agenouille à sa hauteur.

– Je t’en ferais un avant de partir et je t’en ferais un en rentrant, même si tu dors.

– Promis ?

– Promis.

Avec tendresse, je la serre dans mes bras.

– Tu veilleras sur papa ?

– Hum…

– Tu seras gentille avec lui ? Il faut l’être. Papa t’aime très fort. Il va s’occuper de toi.

Elle soupire avant d’accepter. Comme une flèche, elle file vers Cliff.

– Papa ? On va faire à manger tous les deux ?

Malgré sa grimace, mon amoureux acquiesce.

Je fais un tour sur moi-même.

– Alors, je garde ou je change ?

– Tu gardes ! Tu es magnifique avec cette tenue. Si quelqu’un dit le contraire, envoie-le-moi.

Je ris. En vitesse, je sors mon maquillage. Je vais finir par être en retard à force de me poser des questions. J’aimerais autant éviter de louper mon bus. Un trait noir sur les yeux, et un rouge à lèvres écarlate sur la bouche terminent ma préparation. Un coup d’œil dans le miroir suffit à me convaincre. De toute façon, je ne pars pas là-bas pour séduire quelqu’un. J’ai déjà Cliff et le plus important.

De retour dans la pièce principale, je retrouve mon amoureux qui jette un regard glacé au frigo. Je comprends rapidement le problème. S’il avait été tout seul, il n’aurait eu aucun souci à se faire un repas lui-même. Sauf que devoir le préparer avec Valiana complique les choses. Je dépose un baiser sur sa joue.

– Va chercher des frites, au cas où.

– Frites, répète ma petite fille.

À croire que ses oreilles traînent partout.

– Ouais, conclut Cliff en refermant la porte du frigo.

Il ne me paraît pas convaincu. Sans doute parce qu’il essaye d’éviter les produits gras. La petite, elle, sautille jusqu’à nous.

– On peut bien se faire plaisir de temps en temps.

Ces mots, je les souffle à l’oreille du grand gaillard qui me sert de compagnon.

– Après tout, vous avez bien le droit de vous faire plaisir tous les deux si moi, je sors.

Il hocha la tête. S’il était seul, il n’en aurait rien fait.

Je récupère un petit sac. Dedans, j’y ai glissé mon portable, ainsi que quelques billets au cas où. Peut-être devrais-je y ajouter un rouge à lèvres des fois que je doive faire des retouches. Je retourne à grandes enjambées dans la salle de bain pour récupérer mon bien.

– Est-ce que ça ira ?

Cliff hoche la tête. Il finit par répondre par l’affirmative, je me rends bien compte que ça ne va pas et qu’il se sent mal.

– Je peux toujours annuler.

– Va t’amuser ! Je réussirais à gérer.

– Très bien.

Je me penche vers Valiana qui joue à faire entrer un dinosaure dans la maison de ses figurines. Le spectacle me fait sourire. C’est une enfant adorable que j’ai là. Je suis sûr qu’elle prendra soin de Cliff aussi bien que moi. Il a besoin qu’on lui donne de l’amour et de la joie de vivre.

– À demain, mon bébé.

Ses petits bras s’accrochent à moi.

– Je t’aime très fort maman ! Je ne veux pas que tu partes.

– Je reviens dans la nuit.

Alors qu’elle ne veut pas me lâcher, mon amoureux prend la parole.

– Valia, viens, on va accompagner maman pour prendre le bus. Après, nous irons chercher des frites.

– Avec un burger ?

– Si tu veux.

Heureuse d’avoir obtenu une victoire, la petite continue sur sa lancée.

– Et une glace ?

– Valiana, tu arrêtes. Papa a dit oui pour le hamburger et les frites, mais pas plus. Après, tu ne vas pas la manger et ça sera du gâchis.

Elle se met à bouder.

– Si je vais la manger…

– On ira chercher une glace à un autre moment.

La proposition la fait réfléchir.

– On ira avec papa ?

Son regard plein d’espoir se tourne vers Cliff. Sur le coup, il ne répond pas. J’ai l’impression qu’il tente de savoir ce que je vais dire. Ma main prend la sienne. D’un petit geste de la tête, je lui fais signe qu’il peut acquiescer.

– D’accord. Je viendrais, souffle-t-il.

La nouvelle réjouit Valiana qui pousse un petit cri et oublie qu’elle voulait une glace pour ce soir même.

J’ouvre la porte du camping-car. Dehors, il fait bon. Du coup, je prends le risque de ne pas emmener un gilet avec moi. Ma fille me suit alors que Cliff ferme la marche derrière nous. Lorsqu’il nous rejoint, il hésite avant de se décider à soulever la petite pour la porter. Je sens bien qu’il est mal à l’aise, mais je ne dis rien. Le voir faire preuve d’initiatives me fait plaisir. D’ailleurs, je pense que je ne suis pas la seule. Valiana se sert contre lui, un grand sourire sur les lèvres.

La main de Cliff n’est pas longue à trouver la mienne. Sa présence me rassure. L’espace d’un instant, j’hésite. Je devrais peut-être rester à ses côtés. Après tout, nous sommes bien ensemble. Mon regard se pose sur Valiana. La petite ne comprendrait pas si je renonçais si vite.

Devant l’arrêt de bus, nous attendons. Pour peu, on pourrait croire que nous allons faire une balade. Pour me rassurer, je me blottis contre le torse de Cliff. Quand je suis près de lui, je suis toujours en paix.

Au bout de la rue, je vois s’avancer mon mode de transport. À regret, je retire mon visage de l’épaule de mon amoureux. D’un geste de la main, je fais signe au bus de s’arrêter. Il m’a vu et ralenti l’allure. J’embrasse tendrement mes deux amours. Mes pas me rapprochent du bord du trottoir. Avec un sourire aux lèvres, je tourne la tête vers ma famille.

– J’y vais. Je vous aime, mes amours.

À ces mots, Valiana commence à bouder, mais son père la reprend.

– Fais au revoir à maman.

Le bus s’arrête. Je monte et composte mon ticket avant de me trouver une place sur la droite. Par la fenêtre, j’observe ma petite fille me faire signe tout en retenant ses larmes. Cliff, lui, me sourit. Il est adorable.

Les portes se ferment et je vois ma famille s’éloigner. C’est parti pour une vingtaine de minutes de route pour traverser la moitié de la ville. Je vais directement chez Agathe. Ensuite, nous nous rendrons à la fête.