Erling avait reçu la balle en pleine tête.
Magnus, l’arme braquée vers lui, l’observait froidement basculer en arrière.
Magdala avait retenu son souffle, incapable de détourner les yeux de ce monstre fou qui redevenait homme tandis que l’esprit le quittait.
Ana, estomaquée, serrait plus fort la vestale contre elle, le cœur en désordre.
Elles restaient là à s’enlacer, prestes de s’étouffer, terrorisée face à ces hommes qui avaient si aisément défait l’Église de Lathium et dont elles ignoraient les desseins futurs.
Tout comme la flèche de la cathédrale, le Chef de l’Église avait chu, laissant derrière-lui les ruines du temple du Très-Haut sur terre, emportant égoïstement avec lui les temps de sa gloire qu’il avait ternie par pur orgueil. Ne restait qu’un désastre, duquel l’on l’avait défait miséricordieusement.
À coups de crosses, les quelques échantillons plébéiens qui accompagnaient Magnus s’étaient acharnés sur ces décombres, les écrasant plus encore comme pour les faire entièrement disparaitre de l’Histoire.
Le tapis tissé s’était imbibé de sang, poissait sous leurs pas enfiévrés.
Magnus s’était avancé jusqu’au corps, l’avait tâté mollement du pied.
Il était encore souple, bien-sûr. Même s’il était au fait qu’un corps ne se raidissait point immédiatement après la mort, il ne pouvait s’empêcher d’éprouver une mordante déception.
Erling était mort. Une amertume douloureuse lui brûlait la poitrine, là où il pensait que s’installerait la satisfaction d’avoir abattu le tyran ; l’amertume d’avoir perdu tant d’hommes, dont son meilleur ami, et qu’une pareille horreur se soit imposée comme inévitable.
Il s’était avancé sur le balcon pontifical, suivant ses hommes qui, à bout de bras, trainaient leur proie à la lumière du jour. Dans la cour encombrée de débris et de dépouilles, les forces royales s’étaient déployées, tenant chaque clan en respect tandis que plusieurs unités se ruaient ans les bâtiments afin de mettre fin à cette révolte. Personne ne devait s’opposer à eux, espérait Magnus en constatant que les protestations venaient davantage de la milice que de ses hommes. Ainsi qu’il l’avait espéré, la noblesse s’en venait lui prêter main-forte, sans pour autant prendre son parti ouvertement ; et il aurait été insensé de se dresser contre elle.
Dans un instant, ils seraient là.
Il s’était abandonné une brève seconde à la contemplation de ce tableau malheureux, détaillant les armures brillantes frappées de la couronne s’opposer à celles, maculées de sang, ornées de la croix couronnée. Puis avait posé ses eux sur les deux inconnues, ni de peuple, ni d’église, qui le dévisageaient avec un mélange d’effroi et d’espoir, s’étreignant férocement. Sur Marika.
Il avait dégluti.
Si elle avait accepté sa requête, apposé son scel ecclésiastique sur sa réforme, sans doute aurait-elle pu empêcher tout cela ? Si elle avait accepté de renoncer aux ordres et de s’enfuir avec lui il y a bien longtemps, quand ils se rencontraient en secret dans la cour du couvent et qu’il entretenait pour elle des sentiments bien plus forts que de l’amitié, tout cela aurait-il pu être empêché par un coup de pouce du destin ? S’ils avaient été deux êtres différents, auraient-ils empêché cela ? Ou auraient-ils regardé tout cela du haut d’un versant lointain ? Il y avait tant d’inconnues, tant de chemins qui auraient pu être… De tous, il avait dû se résoudre à emprunter le plus terrible, poussé par l’obstination de Marika. Pourtant, il ne pouvait lui en vouloir. Il n’avait plus aucun remord.
Et de sa voix la plus puissante, il avait clamé pour le monde entier :
— Le Chef de l’Église est mort ! Vive le peuple !
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