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tome 1, Chapitre 14 « Dans une serre .... » tome 1, Chapitre 14

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Quatorzième nouvelle

Dans une serre....

Une serre..., cette idée de Kahlan évoque toute de suite, en moi, un souvenir. Je me souviens d'une anecdote, où ai-je lu cela ? Quel livre... ? Je ne sais plus. Je me permettrai d'utiliser ce vague souvenir pour le replacer dans un contexte que j'imagine et où je voudrais soigner les descriptions...

Bien sûr avec les mots de Khalan, merci ! : dorénavant, région, bastion, galerie, dauphin, gaz, égal, assurance, béquille, défaut, fragile.

*****

Je m'appelle Margaret Winsley. J'aime à dire que je fais partie de " l'aristocratie paysanne anglaise ", ce qui fait sourire mes rares invités.

Depuis plus de trente ans, je vis dans une petite maison du côté de Canterbury. Elle est bâtie au bord d'une route où il ne passe jamais personne. Sobre bâtiment de bois avec un soubassement en briques rouges, j'aime ses volets bleu-gris, et ce bow-window typique de notre région. Elle n'est pas bien grande, mais quel charme irrésistible. Les meubles sont de bois peint dans ces nuances bleu, ardoise pâle, vert d'eau avec des coussins dans ces tons assortis. De l'ensemble se dégage, je crois, une impression de confort et de simplicité.

Derrière la maison, un grand pré, en lisière de forêt. Si grand qu'il n'est pas clôturé et bien sûr, un lieu qui m'est cher : attenante à la maison, collée sur le mur sud-est, une serre.

Soubassement de briques, très peu haut avec de grandes parois vitrées ainsi que le toit, baignée de lumière dès les premières lueurs de l'aube, elle bénéficie du soleil de la journée. J'ai fait aménager quelques stores pour tamiser le soleil de midi, quand il est trop fort. Il y a un radiateur et un robinet, raccordés aux tuyaux de la maison et au chauffage central au gaz. J'arrive à obtenir une température constante de douze degrés, à peu près en toute saison. La serre est plutôt en longueur avec une porte en verre à chaque extrémité. Une donnant sur le pré, l'autre vers la route qu'on devine tout là-bas. Une allée relie ces deux entrées et côté mur de la maison, j'ai installé des grands bacs de zinc rehaussés, je peux ainsi m'occuper de mes plantations sans me baisser. De l'autre côté de l'allée, des tables avec les plantes plus fragiles, chacune dans un pot. De cette façon, je peux adapter les soins et l'arrosage en fonction de chacune.

Je suis assez fière de mes kniphofias et de mes orchidées. J'ai aussi une petite collection de plantes grasses, notamment des épiphyllums faisant deux fois dans l'année, des fleurs roses, clochettes et calices complexes de toute beauté. Mes invités en sont toujours étonnés. Mais j'hésite à les faire entrer ou alors, à la rigueur, une personne à la fois. L'espace est réduit et tout est si fragile ! On m'a déjà abîmé des fleurs alors dorénavant c'est un bastion que je défends farouchement ! Car certaines plantes ont des béquilles, des tuteurs, d'autres ont des bourgeons si délicats qu'ils se brisent pour un rien...

J'ai installé dans le coin près de la porte donnant sur le pré, un fauteuil en rotin, avec deux coussins que certains qualifieraient de jaunes et que d'autres diraient, verts. Au fil du temps, ce fauteuil est devenu ma place préférée dans la maison ! Je peux y rester pendant des heures, là, dans ma serre. Parfois je suis à mon poste dès six heures du matin, avec mon bol de café. Je fais un tour de visite pour saluer mes azalées, mes anémones du Japon et regarder leur avancée, puis je me pose dans le fauteuil pour regarder le pré. A cette heure matinale, il n'est pas rare que je vois des hérissons qui regagnent leur maison, il y a un blaireau, une ou deux taupes creusant des galeries dans la prairie, mais ça m'est bien égal et plus rare, un petit renard. Des oiseaux bien sûr, dans les branches, les plus gros, pies, tourterelles, corbeaux et les petits, mésanges, pinsons, moineaux. Des écureuils font bouger les feuilles, filant d'un tronc à l'autre et en ce début d'été, une jeune biche vient souvent pour se désaltérer.

J'ai, en effet, mis à sept ou huit mètres de la maison, une petite fontaine avec une arrivée d'eau en forme de dauphin où l'eau s'écoule en circuit fermé. J'y ai prévu une planchette, pour le cas où une abeille ou un insecte tomberait à l'eau afin qu'il puisse, comme grâce à une échelle, regagner le bord.

Mais c'est l'histoire de cette biche que je voudrais vous conter : elle avait ses horaires et j'attendais, blottie dans l'angle de ma serre, qu'elle me fasse l'honneur de sa présence. Elle apparaissait à l'orée de la forêt où elle restait un long temps, à observer, puis avançait de quelques pas sur ses pattes fines. Elle tournait la tête, quelle allure gracieuse ! Elle humait l'air, orientait ses oreilles vers les quatre points cardinaux ou presque... Alors prenant un peu d'assurance, elle venait jusqu'à la fontaine en marchant paisiblement ou parfois en gambadant dans les pâles rayons du soleil naissant. Je savais ainsi son humeur, quand je la regardais boire avec le mouvement du cou ravissant, se penchant si élégamment. Elle faisait peu attention à la maison. Il lui arrivait de regarder de mon côté comme pour me dire, je sais que tu es là ! Mais ses craintes et ses pré-occupations étaient toute autre. En effet, l'automne approchait et déjà les tirs des chasseurs me faisaient sursauter. Dans ma serre, en cette saison beaucoup de mes plantes arrivaient au bout de leur floraison. Mais qu'ils restaient beaux mes épiphyllums ! Et mes orchidées, elles étaient au sommet de leur épanouissement.

C'est un après-midi, alors que je m'affairais dans ma serre, que j'entendis à nouveau, des coups de fusil. Ils me semblaient bien proches et intriguée, j'ai contrôlé la lisère du bois et les abords du pré. Elle est apparue, affolée, courant gueule ouverte, ne sachant où aller...

Alors je n'ai pas hésité une seconde, j'ai ouvert tout grand la porte de la serre et je me suis fait connaître. La bête terrorisée me repéra de loin et à toute vitesse, elle galopa, contourna la fontaine et s'engouffra dans l'espace encombré, faisant tomber les pots et renversant l'arrosoir, elle fila se blottir sous une table, haletante, effrayée. Vite, j'ai refermé la porte alors qu'apparaissaient tout au fond du pré, quatre chasseurs, bottes aux pieds, gibecières sur le côté et leur arme dans la main. Ils savaient qu'ils pouvaient longer mon pré mais ne pas s'y aventurer.

Je m'assis dans le fauteuil et j'observais la jeune biche, couchée, recroquevillée, si belle, sans aucun défaut, elle reprenait son souffle et ses yeux fixaient la porte close, elle redoutait encore sans doute quelque chose. Je vis aussi mes fleurs au sol, les pots brisés, les pétales éparpillés, les tiges piétinées. Mais dans la vie, il y a des priorités et je n'ai jamais regretté les pots cassés et les orchidées en miettes. Je n'ai pas réfléchi un instant en ouvrant la porte de ma serre. Je n'ai pas songé aux dégâts inévitables qui s'ensuivraient. J'ai juste su, en une fraction de seconde que si je n'abritais pas cette bête traquée, jamais plus je n'aurais pu poser les yeux sur moi dans une glace et jamais plus, je n'aurais pu regarder mon pré et recevoir cette quiétude et cette douceur qu'il me procure.

Je n'ai jamais oublié le regard de cette biche, un peu tranquillisée, se remettant peu à peu de ses frayeurs, ce regard doux et intelligent. Je ne savais pas qu'aux derniers jours de ma vie, c'est ce souvenir là qui s'imposerait à moi. Et parmi tous les beaux moments de mon existence, c'est cette rencontre magique avec une bête de la forêt, ce privilège d'avoir pu croiser sa route, qui me viendrait en premier à l'esprit et qu'au moment de fermer les yeux, je reverrais cette ultime image : le si doux regard de cette biche.

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Texte publié par Lisa D., 15 avril 2020 à 13h49
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