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Dixième nouvelle

Dans un cockpit...

Un lieu confiné et petit : un cockpit ! C'est Panda qui en a eu l'idée. Merci beaucoup, accompagnée d'une liste que voici :

étroitement, ciel, casquette, lapin, toile, bleu, boîte, parole, eau, claque, rouge.

*****

"Ladies & Gentleman, bienvenue à bord de l'A 320, Swiss Air Line à destination de Johannesburg. Le commandant de bord, Thomas Akelby et moi-même, vous souhaitons un agréable voyage. "

Et Sacha coupa le micro après son annonce, tandis que Thomas accrochait la casquette de son uniforme dans le petit espace prévu, à cet effet, avant de se contorsionner pour s'asseoir aux commandes. Dans le cockpit de cet avion de ligne, tout était conçu pour prendre le moins de place possible.

- " Au fait, c'est quand que tu vas être papa ?

- Début octobre.

- Dans quatre mois... ah ouais ! Faudra arroser ça... !"

Thomas et Sacha étaient étroitement liés. Ils devaient avoir un sacré nombre d'heures de vol, ensemble, faudrait compter...

Mais pour l'heure, Thomas avait fini toutes ces vérifications et entamait le décompte : ten, nine,

- " Tour de contrôle, tour de contrôle ..."

Une conversation crachotée s'en suivit et l'autorisation de décoller sur la piste 18 fut donnée :

- "Cleared for takeoff runway 18 ."

Tout était OK. Six, five, four... Selon leur petit rituel, Thomas regarda son copilote d'un air blagueur :

- " Ready ?

- Ready !

- Three, two, one, so, let's go ! "

Le ciel était parfaitement bleu, la visibilité idéale. Sacha tapota sur quelques boutons lumineux, observa l'écran de contrôle, le niveau de kérosène était à cent pour cent, le bruit les deux réacteurs emplit tout l'espace, les vibrations se faisaient nettement sentir et l'avion quitta le tarmac, prenant majestueusement son envol.

Décollage réussi.

Thomas relâcha sa concentration et regarda en dessous d'eux, les villages, les prairies. Il lui faudrait atteindre dix mille pieds d'altitude pour passer le relais à Sacha. Ce dernier sortit un paquet de chewing gum de sa poche, il en proposa à son collègue qui refusa et commença à mâchouiller. Un odeur de menthe flottait dans la cabine. Un groupe d'oiseaux sur leur gauche changea de trajectoire, pour laisser le grand avion filer tout droit, vers une nappe de nuages.

- "Tu t'es remis au tennis ? Tu m'avais pas dit ça ...

- Si, si, reprit Thomas, je joue avec mon fils, il se débrouille pas mal...

A ce moment, on frappa et directement l'hôtesse de l'air passa la tête. Elle parlait fort :

- Y' a un grand noir qui s'énerve. Je sais pas ce qu'il a, en plus on comprend rien de ce qu'il dit... ! "

- "J'arrive, j'arrive " et Sacha tenta de s'extirper de sa place exiguë pour aller voir ...

- " Mets lui deux claques et ça ira mieux ! " conseilla Thomas.

- "Modère tes paroles ! Si c'est l'ambassadeur du Zimbabwe et qu'on devait lire la boîte noire... Tu serais mal noté !!"

En effet, l'homme était très agité. On captait péniblement quelques mots d'anglais avec un fort accent mais surtout il montrait un endroit, assez imprécisément puis il touchait son bras, gonflait ses joues et Sacha crut comprendre que son bras enflait sans doute... puis un autre passager signala ce qui semblait être un animal. Il fallait agir vite, car une jeune femme venait de se lever, paniquée elle aussi et elle donnait sur son siège de grands coups, avec son sac de toile. Sacha repartit sans tarder et avec l'aide de l'hôtesse, un pot de confiture fut trouvé et rapidement vidé. Puis il s'arma aussi d'un prospectus assez rigide et retourna vers les passagers, leur conseillant de ne pas bouger, d'écouter et de signaler calmement l'animal. On ne pouvait pas le rater, il faisait un bourdonnement de 747 en plein vol.

Le calme obtenu, un jeune homme pétrifié leva très haut la main, désignant de l'autre son ordinateur fermé, posé sur sa tablette. Sacha se faufila agilement, remontant l'allée centrale et voyant la grosse bête, d'un geste rapide, il abattit le bocal vide coinçant ainsi l'insecte imposant. Celui-ci se mit à " zézailler " de plus belle, se frappant aux parois encore sucrées du pot de confiture puis il se calma. Alors, doucement le jeune passager éberlué, vit Sacha glisser son prospectus sous le bocal, sans quasiment le soulever, puis victorieux retourner le tout, en maintenant bien plaqué la brochure, devenue un couvercle.

Sacha repartit sous les applaudissements, si c'était l'ambassadeur du Botswana, il semblait tout à fait satisfait et avec l'aide de l'hôtesse, on remit sur le bocal de confiture, en vitesse, le vrai couvercle. L' énorme taon, pour l'instant, semblait bien content et faisait une orgie de gelée de framboises. Sacha passa sous l'eau, ses mains toutes collantes et regagna l'avant de l'avion et comme avec "un chausse-pied", se glissa dans son siège à côté de Thomas. Il lui fit, bien sûr, le récit brillant de ses exploits :

- "Et il était vraiment si gros, ce taon ?

- Ah, quand même ! Et puis tu sais à bord, le moindre évènement, ça te prend de ces proportions. Thomas savait, après quinze ans de carrière, il en avait vu de toutes sortes, des accouchements en plein vol, des bagarres entre deux passagers qu'il fallait séparer, par chance, il n'avait pas eu droit à un détournement... Pour l'instant c'était un voyant rouge qui venait de s'allumer

- " C'est quoi encore ça..."

Sacha vérifia les données, la voix synthétique du radioaltimètre grésilla :

-" Onze mille pieds. "

Altitude normale donc. Alors un peu fatigué, Thomas, regardant son immense tableau de bord et ne comprenant pas non plus le problème, soupira à l'encontre de son copilote :

- "Et bien, mon lapin, à ce train-là, on n'y est pas arrivé, en Afrique du Sud ! "

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