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Cinquième nouvelle

Dans une chambre...

...et dans une "chambre inquiète..." précise Diogène, qui nous donne une petite liste de mots, en point de départ de ce "Récit confiné". Merci.

Voici sa liste : chambre, inquiète, inexorablement, minuit, réduit, lit, horloge, temps, mère, piano, bleuet.

*****

- " Dors bien, ma chérie ! "

Maman est partie, mais comme chaque soir, elle a laissé allumée la lumière du couloir. Un trait horizontal sous la porte de ma chambre et un trait vertical car la porte est à peine entrouverte. De mon lit encore un peu froid, je m'accroche du regard à cet angle droit...

Par les persiennes closes, encore deux ou trois traits d'éclairage mais ils sont pâles et bien peu rassurants. La pluie tombe à verse et les gouttes martèlent la tôle comme on tape sur un piano. Le vent aussi, soufflant lugubrement commence à me faire peur...

Je suis grande maintenant ! Je m'appelle Alisson

Je n'ai pas peur du noir, des bêtes ni de personne !

C'est ma phrase magique. Je la répète dans les cas urgents, quand je suis envahie par mes frayeurs. J'ai peur du noir et des bêtes qui pourraient venir dans mon lit. Des fois, j'ai l'impression de les entendre, mais la pluie tambourine contre les persiennes, je ne peux pas entendre, alors je les imagine... et c'est pire !

Dans deux ou trois heures, sans doute vers minuit, Maman montera se coucher et elle va éteindre ! Alors j'aurai tout à craindre ! Mais c'est le contrat entre ma mère et moi. Ainsi, j'ai peu de temps pour m'endormir, j'essaie, mais le sommeil ne vient pas...

J'ai huit ans, je suis grande maintenant ! Je m'appelle Alisson

Je n'ai pas peur du noir, ni des bêtes, ni de personne !

Le lit est bien chaud à présent. Si je pense à des jolies choses, alors je m'endormirai. A un champ de blé parsemé de bleuets comme il y en a , au bord de la route pour aller au poney. A une promenade en forêt, mais j'ai failli tomber de ma selle, parce que mon poney s'est affolé, il a dû voir une bête peut-être, enfin quelque chose... Il a eu peur, le pauvre !

Une présence dans ma chambre, tout à coup, me semble évidente. Quelque chose a bougé ... Malgré la pluie qui tombe inexorablement, je suis presque sûre que j'ai entendu des bruits de pas... des bruits de pattes, là, tout près, sur ma droite...

Je suis grande maintenant ! Je m'appelle Alisson

Je n'ai pas peur du noir, des bêtes ni de personne !

Je me fais toute petite dans l'espace réduit de mon lit ; la couette sur le nez, je voudrais qu'on ne puisse pas savoir que je suis là. Je voudrais ne pas exister. Mes sens sont en alerte, je suis si crispée !

Ah ! Au secours ! Elle va sauter sur moi ! Je ferme les yeux, je serre les dents, je déglutis péniblement, mais j'écoute, attentive, malgré la pluie plus légère qui tapote contre les persiennes closes, j'écoute... Et je sens la chaleur du lit qui me gagne, j'écoute la pluie qui doucement m'accompagne... j'écoute la cadence des gouttes qui doucement, dansent... et je discerne à peine, au loin, comme les battements diffus d'une horloge, tic... tac... tic

Et Alisson, fatiguée, a fini par sombrer. C'est ce que verra Maman en poussant doucement la porte de la chambre.

"Ah ce soir, quand même, elle a réussi à s'endormir !" pensera-t-elle et elle ne sera plus inquiète.

Ainsi tranquillisée, elle fermera sans crainte la lumière du couloir et sans faire aucun bruit, sur la pointe des pieds, elle ira se coucher.

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