Le verre claque durement contre la table métallique. Tu ne devrais pas boire durant ton travail, mais tu ne parviens pas à garder l’esprit suffisamment neutre et clair alors que tu devrais bosser sur ton projet. Il te faut des résultats et très rapidement. Cette virée en Suisse… tu n’aurais jamais dû y aller. Céder à ton amant a été une grosse erreur. Non seulement, tu y as perdu un temps précieux, mais cela a été un échec plus que cuisant. Autant pour lui que pour toi. Tu as cru pouvoir y trouver de nouveaux mécènes sensibles et intéressés par tes recherches, mais tu n’y as gagné qu’une entorse à la cheville et une blessure par balle à l’épaule, te rendant totalement incapable d’écrire avec ta main dominante. C’est frustrant. C’est énervant et tu ne ressens aucun remord à passer tes nerfs sur ton assistant qui n’ose pas rétorquer. Il a trop peur des conséquences et il est bien trop heureux de bénéficier de tes faveurs charnelles. Parfois même, tu l’obliges à dormir avec toi. Il ne dit rien, ne demande pas pourquoi et tu t’en fiches de lui donner de faux espoirs. Tu es agacée, frustrée et rien ne parvient à te calmer. Tu n’as même pas hésité une seule seconde à accélérer la cadence. Les militaires sont trop impatients concernant ton projet et ton gradé n’est pas là pour te soutenir lors de leurs apparitions. Alors, tu es obligée de faire face, de tout encaisser et de courber l’échine lorsqu’ils refusent d’écouter ta défense, tes arguments. Ils veulent leur arme et tout de suite. Tu ne peux que grincer des dents et prendre ton mal en patience.
Un jour, ton travail sera reconnu.
Un jour, tu seras l’égale de l’homme.
Tes talons claquent sur le sol, on s’écarte à ton passage. Avec le temps, ils ont compris que tu ne dévierais pas de ton chemin, que c’est l’obstacle qui doit bouger, peu importe si tu dois bousculer, marcher sur les pieds. Les recherches que t’a confiées ton mentor progressent rapidement, mais tu restes méfiante. Tu n’acceptes pas moins que le succès réel, tangible. Tu ne goûtes guère au factice. C’est pour cela, que tu annotes tout dans un carnet que tu gardes précieusement avec toi. Tu as ce cahier avec toi depuis des années, ne sachant qu’en faire sans vouloir le jeter pour autant. Il n’a aucune valeur à tes yeux, mais toutes ses pages sont vierges et, n’appréciant guère le gâchis, tu l’as gardé jusque-là. Jusqu’au début de travaux où tu as commencé à noter tout ce qui concerne le projet Soldat de l’Hiver. Tous tes résultats, tes recherches, tes doutes, tes interrogations, tes solutions, tes échecs. Il s’y trouve également tes dessins, tes schémas. Au fil du temps, les pages blanches se sont noircies. Certaines se sont décrochées et cherchent à tomber lorsque tu ne fais pas attention. Ton assistant n’y a pas accès. Il a l’interdiction formelle d’y toucher ; à ce carnet rouge sang pourvu d’une étoile à cinq branches et noire en son centre, entièrement dédié à cet homme qui a jadis brisé ton cœur.
À lui.
À James.
Ou ce qu’il fut.
Là, devant toi, pieds et poignets attachés sur ce siège d’un cuir de mauvaise qualité, torse nu, est allongé ce soldat américain, ce précieux cobaye qui ne t’a jamais trahi, peu importe le temps et les épreuves. Son bras cybernétique tranche avec sa peau en sueur, ses cheveux bruns que tu as toujours connu courts ont poussé, son visage est fermé, son regard est vide. Son souffle est haletant. Il vient de subir de nombreux électrochocs pour le préparer, pour que tout soit parfait. Il ne doit pas faillir. Il ne va pas faillir. Étrangement, tu lui offres une confiance sans borne. Les militaires sont là. Ils veulent un exemple, une preuve que tu avances et dans le bon sens. Des mécènes sont également présents, tu ne les reconnais pas. Ils ne sont pas venus à ce gala en Suisse. Poliment, hypocritement, on souhaite ton bon rétablissement ainsi que celui du gradé, toujours entre la vie et la mort, gratifiant la chance et l’expérience de ton amant pour votre fuite. Tu opines du chef, leur offrant des remerciements que tu ne penses aucunement. Ce n’est pas bien grave. De toute façon, ils ne sont pas venus pour effectuer des échanges de politesse et vous le savez tous. Alors, doucement, le silence s’installe dans la pièce et tu offres un regard sévère à ton assistant qui acquiesce, bien conscient qu’il n’a pas le droit à l’erreur. Pas de gifle en cas d’échec. Juste la mort. Pure et simple. Tu ne t’occupes pas des soldats armés, ils ne sont que des statues insignifiantes. Tu sais pertinemment que cet ancien sergent ne te fera aucun mal. Il ne le peut. Il ne le veut. Tu y as veillé. Ta voix résonne.
— желание. Ослаблять. Семнадцать. Рассвет. Печь. Девять. Бенин. Возвращение к дому. Один. Вагон в товараx. 1
Tous. Tous font un pas en arrière tandis que ton sujet se débat aux mots sans queue ni tête que tu prononces. Ils entrent dans sa boîte crânienne, s’imposent violemment. Tu n’as pas bougé d’un iota, tu sais que tu ne crains rien. Son souffle est lent, calme. Doucement, il relève la tête, ses cheveux sales font barrière à ses yeux, mais tu les devines braqués sur toi.
— Солдат? 2
— По вашим порядкам. 3
Tu croises le regard inquiet de ton second et tu le vois déglutir tandis que tu opines du chef, lui donnant silencieusement l’ordre de te prêter main forte. C’est la première fois que vous prenez ce risque et les soldats derrière toi pointent immédiatement leurs armes vers le cobaye. Ils ont pour ordre de tirer si jamais il se montre agressif. Tu n’aimes pas cette ordonnance, mais tu ne peux rien faire contre cette dernière. Une scientifique, une femme, n’a pas à se dresser faces aux hauts gradés de l’armée. Ton colonel n’est pas là pour te soutenir. Va-t-il se réveiller un jour ? Tu ne le sais et ce n’est guère le moment pour ton esprit de divaguer. Il faut que tu restes concentrée tandis que les dernières entraves s’ouvrent et libèrent l’assujetti.
— Debout.
Ta voix claque dans ta langue natale et tu dissimules ton air satisfait et soulagé alors que l’homme se lève et se met à ta hauteur. Il est plus grand que toi. Tu avais oublié ce détail. Plus musclé également et sa barbe lui donne un air négligé qui… Stop. Ne retombe pas dans le piège. James n’est plus. Tu l’as tué. Tu t’en es assurée. Il ne reviendra pas. De ta voix dure et froide, tu lui ordonnes de te suivre, ce qu’il fait. Il s’arrête quand tu le lui ordonnes et les militaires ainsi que les mécènes restent bouches bée. Sauf un. Il exige plus de preuve de l’efficacité de ton lavage de cerveau ainsi que de ton contrôle mental. Tu resserres les dents, n’appréciant guère qu’on remettre en doute plusieurs années de recherche, tous tes efforts, tout ce temps sacrifié pour cet unique objectif. Sèchement, tu ordonnes à ton pantin de tuer cet impertinent insecte. Les hommes présents paniquent, ton assistant tend le bras et fait un pas en avant. Pas plus. Les soldats sont prêts à tirer, les gradés beuglent, ton sujet s’est emparé du cou du crétin de mécène et tu n’attends que trois malheureuses secondes.
— Lâche-le, soldat.
Immédiatement, il obéit et le bienfaiteur est relâché, chancelle de quelques pas en toussant fortement, massant sa gorge malmenée. Les regards se braquent vers toi et tu comprends rapidement qu’il te faut donner des explications quant à tes agissements. Tu prends alors une voix calme et leur expliques qu’il s’agissait-là de la meilleure manière de démontrer que cet homme est entièrement sous ton contrôle et qu’aucune défaillance. Aucun doute possible là-dessus. Tu admets qu’il aura tout de même besoin d’un entraînement intensif s’ils souhaitent faire de lui un puissant bras armé de Hydra, mais tu ne soupçonnes aucune négligence. Bientôt, il sera parfait.
Ton Soldat de l’Hiver.
Le siège est inconfortable, tu sens que tu ne vas pas y rester longtemps. Le bip incessant, mais nécessaire, t’agace. Il n’a pas encore repris conscience. On n’aurait pas manqué de te prévenir du cas contraire. Alors, pourquoi tu te retrouves là dans ce siège trop dur, en face de ce lit contenant un corps trop immobile, trop endormi ? Tu n’en as pas la réponse. Tu ne sais pas si tu souhaites l’avoir. Ce serait comme admettre un éventuel lien entre toi et cet homme, ce colonel qui s’est entiché de toi malgré ta froideur, malgré ton infidélité, tes machinations, tes mensonges. Tu ne lui as jamais dit ces trois mots, n’étant plus capable de les penser. Tu ne t’es jamais montrée douce et prévenante, aimante, à son égard. Jamais. Ce serait te mettre en position de faiblesse et c’est pour cette raison que tu retires vivement ta main de la sienne. Tu ne dois rien montrer, rien ressentir. Tu vis, tu respires pour tes recherches et rien d’autre. Lui, il n’est qu’un moyen qui te permet d’obtenir gain de cause en toute sécurité. Son grade te protège. Son affection pour toi te protège. Tu ne peux le rejeter. Alors, tu pries intérieurement qu’il s’en sorte, qu’il guérisse et sorte du coma. Qu’il se remette d’aplomb et retourne à son poste, à tes côtés. Qu’il réchauffe ton lit, ton corps. Tu t’ébroues à cette dernière pensée, te fustigeant. Tu n’es pas femme à offrir ton corps à n’importe qui pour n’importe quelle raison. Tu te lèves de cette chaise et quittes l’infirmerie d’un pas raide. Il faut que tu t’éloignes le plus loin de cette pièce, de cet homme.
Lorsque tu arrives dans ta chambre, ton regard orageux se porte vers ta penderie et ces nombreux tailleurs qui ne te mettent absolument pas en position de force. Mais cette rancœur n’a pas lieu d’être et est totalement futile en comparaison du travail qui t’attend et qui ne peut être mis de côté plus longtemps. Il faut que tu remplisses ton carnet et que tu appelles ton assistant en vue de rédiger ton rapport en plusieurs langues. Demain. On te l’a assuré – et tes victimes savent que tu ne goûtes guère aux mauvaises blagues ainsi qu’aux fausses promesses – tu pourras retirer tes bandages et débuter une rééducation pour ton épaule. Sûrement, auras-tu quelques séquelles, mais rien qui puisse t’empêcher de tenir un stylo à bille et de rédiger comme avant. Néanmoins, on a beau te rassurer, tu sais que tu ne dois pas te faire d’illusions. Il y aura des mouvements que tu ne pourras plus effectuer, des poids que tu ne pourras plus porter. Tu grimaces. C’est bien ta veine.
On frappe à ta porte.
— Qu’est-ce que c’est ?
— C’est Yuliy, madame Fox. Vous m’avez dit de venir pour vos…
— Entre, claques-tu agacée.
Tu n’as pas le temps de remplir ton carnet et tu n’apprécies guère cela. Cela signifie que des informations peuvent t’échapper et que tu peux, possiblement, les oublier. Cependant, tu ne peux te permettre de le faire patienter derrière la porte. Pas alors qu’il y a beaucoup de travail à faire avant de pouvoir réellement vous reposer. Sans plus t’occuper de lui, tu le laisses s’installer devant ton bureau tandis que tu prends place sur ton lit. Trois heures défilent ainsi. Toi dictant le texte à rédiger, lui faisant la pointe du stylo sur les trois papiers, concentré à ne pas se tromper, à ne pas se raturer sous peine de devoir tout recommencer et de se faire invectiver. Vous avez tous les deux mal à votre séant, mais ne cherchez aucunement à changer de position. C’est pourquoi tu ne peux que le soutenir lorsqu’il se met à s’étirer tout en poussant un long soupir de soulagement. Tu es également satisfaite que cette tâche soit terminée. Il se lève et tu ne peux que l’imiter, te dégourdissant les jambes de quelques pas. Tu le remercies pour son aide et tu sursautes à peine lorsque tu sens son bras s’enrouler autour de ta taille, te forçant à te rapprocher outrageusement de lui et de poser une main sur son épaule. Ton regard est glacial, le sien est envieux. Tu n’aimes pas ce genre d’initiative et tu sais que tu n’hésiteras pas à planter ton talon dans son pied, en plus de lui arracher la lèvre inférieure avec tes dents si jamais il va plus loin. Fort heureusement pour lui, il ne va pas plus loin, se contentant de te dévorer des yeux. Tu retiens une grimace. Ce que tu craignais est en train d’arriver et il faut que tu lui donnes satisfaction tout en lui faisant comprendre que jamais ce ne sera réciproque. C’est pour cette raison que tu consens à lui offrir ce qu’il désire et l’embrasse, gardant tout de même le contrôle, décidant quand il peut se permettre de respirer et quand tout ceci doit s’arrêter.
— Madame…
— Plus tard. Nous n’avons guère le temps. Pour l’instant, va donc remettre les rapports à notre incapable de Général et attend-moi à la Salle. Nous avons encore beaucoup de travail.
Il acquiesce, mais tu peux sentir à son souffle qu’il est difficile pour lui de se réfréner et de t’obéir. Il veut plus. Tu t’écartes alors de quelques pas pour lui laisser quelques secondes pour se reprendre et s’en aller. Cependant, il n’a le temps d’effectuer seulement qu’un demi-tour, feuilles en main que ledit général apparaît dans tes appartements, flanqué de trois soldats. Tu reconnais sa posture, cela signifie qu’il ne va certainement pas t’annoncer une bonne nouvelle. Tu te crispes, te raidis et attends qu’il daigne bien expliquer la raison de sa présence. D’une œillade sévère, il fait comprendre à ton assistant de partir rapidement. C’est une fois que les pas de Yuliy s’estompent que le haut gradé se met à parler dans sa langue natale tout s’approchant de toi. Le Shield sait qui tu es. Il sait que tu tiens une place importante dans votre ordre et a pour mission de te traquer, de te capturer et de te faire parler. Enfin, de te tuer. La rédemption ne te sera pas offerte.Tu grinces des dents, te retiens de jurer. C’est bien ta veine. Tu lui demandes alors ce qu’ils escomptent faire pour remédier à ce problème. Il arpente la pièce jusqu’à ta fenêtre, te tournant le dos, et t’annonce qu’ils ont pris la décision de faire en sorte que jamais ils ne puissent te reconnaître ou te retrouver. Tu commences à craindre le pire te concernant et il te faut l’aide de tout ton self-control pour refouler les trémolos craintifs alors que tu te demandes plus de précision.
— Мы привели наших наилучших хирургов. Они изменят ваше лицо. 4
— Вы думаете, что это будет достаточно? 5
— Нет. Вы собираетесь быть вставленным криогенным застоем и будете пробуждены в более выгодное время. Гидра не может обойтись без помощи Ваших исследований. 6
Tu pâlis, grimaces et tu as bien du mal à ne pas chanceler alors que tu as la sensation que le monde s’écroule sous tes pieds. En venir à cette extrémité signifie que même eux ne sont pas à même d’assurer ta sécurité. Tu serres les dents, tes yeux braqués sur le militaire. Isaaki Baranov aurait trouvé une solution beaucoup moins radicale. Plus efficace. Mais il n’est pas là. Il est dans un lit à l’infirmerie et Dieu seul sait s’il va se réveiller un jour ou non. Tu n’aimes pas cela, mais tu n’as pas d’autres choix que celui qu’on te force à accepter. C’est pour cela… C’est pour cela que tu simules un dernier baiser d’adieu. Chaste. Court. Tu te détournes enfin de lui après avoir remis une mèche en place à cet homme toujours propre sur lui. Le général te jette un regard compatissant, espérant sûrement se faire passer pour un grand-père attendri, mais tu n’en fais pas grand cas. Pas alors que, dans la pièce attenante, tu peux clairement distinguer deux hommes en blouse et bonnet, masqués et gantés. Ils t’attendent. L’opération doit s’effectuer tout de suite.
Ashleigh Amber Fox doit mourir.
Un mois est passé. C’est seulement dans quelques minutes qu’on te retire les bandages et que tu devras disparaître. Assise sur ton lit à l’infirmerie, tu remplis ton carnet avec toutes les informations que ton assistant t’a données il y a quelques heures. Tous les jours, dès qu’il le peut, il vient te rendre visite et te fait son rapport concernant le Soldat de l’Hiver. Il est monté en grade, les militaires ayant décidé que, pour la sécurité de ce projet, il valait mieux que tout soit transféré dans un bunker dissimulé dans un coin beaucoup plus reculé en Sibérie et, qu’en ton absence, le jeune Yuliy Zola serait le plus à même de poursuivre tes recherches, ton œuvre. Bien que tu aies la forte sensation de te faire écarter de ton travail, tu prends sur toi et te dis que ce n’est que partie remise, que lorsqu’on te réveillera, tu termineras ce que tu as commencé.
— Toujours en train d’écrire, любовь.
— Rien ne doit manquer, c’est important.
— Tu es sûre de ta décision ? Tu n’es pas certaine de le retrouver. Beaucoup de choses peuvent se passer, любовь.
— Tu vas avoir besoin de toutes mes informations et tu le sais.
Il n’insiste pas, il sait que cela te coûte de t’en séparer. Apprendre qu’Isaaki est celui qui sera chargé de gérer et surveiller le travail du jeune scientifique te rassure tout de même quelque peu. Il sait que c’est quelque chose de très important pour toi et il t’a mainte fois juré de tout faire pour que tout se passe bien. D’autant plus que le chercheur en herbe vient de se prendre une nouvelle assistante et, de ce que tu comprends des propos du colonel, il n’est pas insensible. Baranov t’a promis qu’il saurait très rapidement les mettre au pas. Vous cessez de parler lorsque deux infirmières et un médecin arrivent à votre hauteur, obligeant ton amant à se mettre debout et à s’écarter de quelques pas. Le moment est venu pour toi de découvrir ton nouveau visage. Tu tentes de ne pas le montrer, mais tu restes inquiète des possibles cicatrices trop visibles. Tu n’as pas accepté de te faire charcuter si c’est pour que cela soit un vrai massacre. Doucement, une femme retire le tissu, couche par couche et tu ne peux manquer le regard sérieux et concentré de ton soldat. Lui aussi, il tient à savoir quel sera ton nouveau visage.
— Tenez. Regardez-vous dans le miroir.
La seconde femme te tend l’objet que tu prends avec réticente et, lorsque tu regardes fixement ton reflet, tu ne te reconnais absolument pas. Hormis tes yeux, tu ne sais pas quoi penser de l’étrangère que tu aperçois dans la glace. Tu jettes un œil à ton ami et ce dernier t’offre un doux sourire rassurant, t’assurant que tu restes belle à ses yeux. Tu retiens un reniflement. Tu ne tiens pas à lui plaire, c’est même quelque chose de totalement stupide. Au final, tu rends le miroir et plantes tes yeux glacials vers le médecin qui semble un peu trop satisfait de son œuvre.
— Quand devrons-nous me cryogéniser, docteur.
— Demain soir, répond-il avec un très mauvais accent britannique.
— Et quand serais-je réveillée ? demandes-tu d’une voix dure.
— Nous… nous l’ignorons. Sûrement dans une période où le Shield ne sera pas une menace pour vous.
Ton poing se serre. Tu es insatisfaite de la réponse, mais tu as conscience que tu n’en obtiendras pas de meilleures, pas de plus sincères. Le docteur t’encourage à te reposer en attendant demain matin et tu ne peux que hocher la tête tandis qu’il s’éloigne pour s’occuper d’autres patients présents. Silencieusement, tu acceptes la main qu’Isaaki te tend. Tu te lèves, son bras passé autour de ta taille, et suis ses pas vous menant dans ses appartements. Tu ne t’y es jamais rendue auparavant, n’en voyant pas l’intérêt. Lorsqu’il referme la porte derrière lui et qu’il plante son regard ardent dans le tien, tu peux aisément deviner ce qu’il escompte faire de toi dans cette pièce. Doucement, il te défeuille, t’embrasse, hume ton odeur, caresse ta peau. C’est votre dernier moment d’intimité. C’est la dernière fois que vous allez vous voir. Peut-être que l’Hydra te réveillera lorsqu’il sera devenu vieux ou mort, alors il veut en profiter. Et, pour une fois, tu ne vois aucune raison de rejeter sa douceur, son amour. Ce ne sera jamais réciproque. Mais, juste pour cette fois, tu as envie de savourer sa tendresse, t’en imprégner. Faire en sorte de ne pas oublier que, dans ta haine, il y a au moins un homme qui t’a sincèrement aimé. Acceptant ta froideur, tes défauts. Vous ne vous précipitez pas. Vous prenez votre temps. Vous vous redécouvrez une dernière fois. Une toute dernière fois. Tu fermes les yeux, te laisses aller, caresses et griffes son corps. Tu as envie de lui laisser une marque, un souvenir de toi. Même éphémère.
— Je t’aime.
C’est ce qu’il te souffle alors que vous êtes serrés l’un contre l’autre, reprenant lentement votre souffle après vous être liés, après avoir joui. Ses yeux sont clos, les tiens sont grand ouverts. Tu ne réponds pas. Tu ne veux pas lui mentir. À la place, tu l’embrasses sur le bout du nez et cela lui suffit pour afficher un petit sourire. Sans doute, pense-t-il que c’est ta manière à toi de lui répondre. Sans doute, croit-il que tu n’es pas expansive sur les choses de l’amour. C’est vrai. Mais tu ne souhaites pas te pencher plus avant sur le sujet. Au lieu de cela, tu préfères t’endormir, profitant une dernière fois de sa chaleur, de son odeur. Dans plusieurs heures, tu devras lui dire adieu.
— Je sais, finis-tu par souffler.
Demain, Ashleigh Amber Fox devra disparaître.
Demain, ton cœur devra cesser de battre.
1. Désir. Rouillé. Dix-sept. Aube. Fourneau. Neuf. Bénin. Retour à la maison. Un. Wagon à marchandises.
2. Soldat ?
3. À vos ordres.
4. Nous avons fait venir nos meilleurs chirurgiens.
5. Vous pensez que ce sera suffisant ?
6. Non. Vous allez être mise en stase cryogénique et serez réveillée en des temps plus propices. Hydra ne peut se passer de vos recherches.
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