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Ignemshir, Tome 1 : L'Étincelle Mourante
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tome 1, Chapitre 74 « L'Appel » tome 1, Chapitre 74

La sonnerie de son R-Tatoo sortit Evan d’un sommeil sans rêve. Il était dans sa chambre, allongé dans son lit. À travers sa grande fenêtre ovale le ciel flamboyait sous la chute du soleil. Il était resté près de deux heures chez Ella. Ils avaient principalement parlé des tableaux découverts dans le cabinet de Siegfried et fait des suppositions sur l’identité de leurs auteurs. Elle lui avait ensuite proposé de regarder un film devant lequel il n’avait pas cessé de somnoler tandis que la jeune fille, toujours aussi alerte, n’avait cessé de rire aux calembours et aux facéties des acteurs de la comédie. Voyant qu’il n’y tenait plus, il l’avait quitté malgré l’insistance de cette dernière qui lui assurait qu’il pouvait faire une sieste sur le canapé s’il lui plaisait. Evan préférait son lit, plus confortable et à une volée de marches à peine. Elle avait abdiqué, un peu déçue, puis lui avait dit qu’elle aimerait bien rencontrer ses amis. Elle avait croisé deux fois Charlaine. Il lui avait promis que s’ils faisaient quelque chose ce soir, il ne manquerait pas de l’inviter.

— Oui ? fit Evan d’une voix endormie.

— Félicitation. Je savais que j’avais raison de miser sur toi.

Reconnaissant la voix, Evan sortit de sa torpeur en se redressant.

— Franz…

— Tu as réussi la première épreuve. Ton acharnement m’a convaincu que tu as vraiment ce qu’il faut pour être mon okemui.

— C’est-à-dire ?

— Une chance si folle qu’elle permet même d’échapper aux crocs du Dévoreur…

— J’ai failli crever comme un chien et c’est tout ce que tu trouves à me dire ?

— Je ne t’ai forcé en rien. Tu as librement fait le choix d’y aller.

Il se passa un court silence avant qu’il ne dise :

— Tu as pu jeter un œil au contenu de l’Atomium Adamantis, je suppose. Ce ne sera pas simple mais si tu parviens à récupérer ces deux éléments, tu seras enfin complet, prêt pour ton rôle d’okemui...

Il rajouta d’une voix pensive

— Je ne peux pas permettre que cela se finisse trop rapidement. Les différents camps méritent une chance de l’importer. J’espère juste que le spectacle en vaudra la peine…

— Comme d’habitude, je ne comprends rien de ce que tu me racontes.

— Cela viendra. Ne t’en fais pas.

— Tu ne joues pas pour maintenant mais pour plus tard, c’est ça ?

— Exactement. Et quand tu iras dans le delta, demande Lysandre. Il est le meilleur… Il saura quoi faire.

Evan demeura silencieux rangeant ses mots dans un coin de son palais mental

— Et pour finir, hôtel l’Étoile Bleu dans le Moulin. Chambre trente-huit. Tout de suite. Ce sera notre dernière conversation. Trouve l’icare, Evan. Que la Terre soit sans péril.

— Que les Cendres de l’Immortel te protègent, répondit Evan qui avait perçu comme une gravité et un peu d’émotion dans la voix du mystérieux scientis.

Il patienta s’attendant peut-être à autre chose mais Franz finit par couper la communication.

Evan ne put s’empêcher de penser que Franz était un être d’une solitude extrême. Il était considéré comme mort par tous ceux qu’il avait connu. Il l’avait contacté lui, un inconnu, pour une tâche qui même s’il semblait en parler avec détachement, lui tenait profondément à cœur. Il repensait encore au regard qu’il lui avait lancé après lui avoir confié la mission d’aller au rendez-vous avec le Baron Noir… Il en avait la conviction. Il n’entendrait plus jamais parler de Franz Parker. C’était comme si ce dernier était un condamné à mort, dont le sursis venait de prendre fin…

Il se traîna hors de son lit, s’habilla promptement et sortit. Deux minutes plus tard, il courait à travers les rues bondées du Moulin en direction de l’hôtel l’Étoile Bleu dont il connaissait la localisation. Il l’atteignit en moins d’une dizaine de minute et pénétra dans le hall exigu où un réceptionniste au regard torve lui accorda à peine une seconde d’attention avant de se replonger dans son R-Tatoo. Evan monta des escaliers crasseux jusqu’au troisième étage et repoussa la porte coupe-feu recouvert de tags. Il remonta le couloir sans ralentir en cherchant la chambre en question. Ses bottes Chesterfield s’enfonçaient silencieusement dans la moquette moisie recouverte de tâches douteuses.

— Trente-huit, murmura-t-il en s’arrêtant devant la chambre.

Il toqua et attendit mais rien ne se passa. La serrure était à patch. Il ne savait pas comment court-circuiter ce système avec subtilité. Il dériva son neshir de sa corne noire et l’alama au milieu d’un tourbillon de fumée pourpre et argenté.

Il était désolé pour le propriétaire de l’hôtel… D’un coup sec, il enfonça la lame dans la serrure, provoquant quelques étincelles, puis poussa la porte sur le côté qui coulissa sans résistance et il pénétra dans la chambre. Elle n’était affublée que d’un lit simple aux draps défaits, d’une vieille table en métal partiellement rouillée et d’une chaise au dossier légèrement tordu qui gisaient à terre, renversée. Une odeur de brûlé flottait au milieu de celle des cigares et du moisi. La fenêtre était grande ouverte sur un étroit balcon. Les dernières lueurs du soleil disparaissaient à l’horizon tandis que le ciel d’un bleu violacé annonçait la venue de la nuit. Il se figea en voyant une tache de sang frais sur la vieille moquette par endroit calcinée. Des traînées ensanglantées conduisaient au balcon. Il se précipita sur le bord et regarda par-dessus la balustrade cherchant un cadavre mais il ne vit rien en contrebas. Juste le flux vif et régulier des piétons sur le trottoir. Aucune agitation. Rien qui laissait supposer que quelqu’un avait basculé dans le vide.

Il n’y avait personne dans la chambre. Franz Parker était passé par ici et s’en était allé par la fenêtre. Et visiblement, il n’était pas seul dans cette chambre. Avait-il été tué ? Contre qui s’était-il battu ?

Sur ses gardes, Evan serra la poignée de son neshir. Il dirigea à pas de velours vers la petite salle de bain. Elle était en aussi bon état que le reste de l’hôtel. Un verre et des pastilles de nettoyage dentaire traînaient sur le rebord du lavabo opaque et fissuré. Il ressortit. Evan regarda autour de lui et se fit la réflexion qu’il ferait mieux de filer. Il était sur une potentielle scène de crime. Si le gérant de l’hôtel le signalait aux autorités, il risquait de s’attirer des problèmes mais quelque chose lui faisait penser qu’il n’en ferait rien. Il risquerait d’être contraint de fermer son hôtel si un représentant de la Police de la cité y mettait les pieds. Tant qu’ils ne faisaient pas de vague, les autorités toléraient ces établissements malpropres mais si l’on découvrait à qui ce sang appartenait, il était clair que cela sonnerait le glas de cet hôtel. On ne touchait pas aux scientis, fussent-ils même déjà mort une première fois.

Evan fouilla la chambre de fond en comble à la recherche d’un indice mais il fit chou blanc. Il n’y avait rien du tout. Il se laissa tomber sur le lit, se creusant la tête pour essayer de démêler la situation et lui donner un sens. Il lui fallait un simple indice. Très simple. Il remarqua sur le sol deux prospectus en image mouvante comme il y en avait dans tous les hôtels. Il crut d’abords qu’il y en avait deux différents mais en les ramassant, il se rendit compte qu’il s’agissait du même simplement sur le recto et le verso. Il s’agissait d’une publicité pour la Bibliothèque d’Ambre. La plus grande bibliothèque de la fédération qui conservait plusieurs dizaines de milliers de livres papier dont certains dataient d’avant l’Effondrement des Cieux. Elle se trouvait dans le cinquième arrondissement.

Bon à défaut d’avoir mieux…

Il sortit de la chambre et aperçu au bout du couloir le réceptionniste au regard patibulaire qui venait vers lui. Il prit un air désinvolte et quand il le croisa à mi-chemin, ce dernier lui jeta un regard soupçonneux. Evan accéléra le pas et alors qu’il arrivait au niveau de la porte coupe-feu, il entendit :

— Eh toi ! ne bouge plus !

Il fila dans les escaliers alors que le battant de la porte qui se rabattait fut violemment repoussé. Il venait de lui tirer dessus avec un incapaciteur. Evan ne perdit pas de temps et sauta par-dessus la rambarde des escaliers et atterrit souplement au rez-de-chaussée. Il traversa le hall à la réception vide et ralentit en se fondant parmi les habitants du Moulin.

Décidément, tout le monde avait un incapaciteur sous la main. Alors qu’il remontait vers chez lui, en marchant normalement, il sortit de sa poche le prospectus, l’analysa à la lumière de l’un des lampadaires sphériques, espérant peut-être voir apparaître l’indice qui recherchait désespérément. Mais nul écrit de caché dans aucun des deux prospectus. Il soupira. Tout avec Franz se transformait en énigme. Toujours. Il avait été rapide avec les cartes mais là… Alors qu’il entrait dans la cour de son immeuble et passait devant sa vieille jeep, il se figea.

Qu’avait dit Franz exactement ? « Trouve l’Icare ». Pourquoi lui demander de retrouver quelque chose qui avait été réduit en poussière… Non, son indice se trouvait là.

Parlait-il de l’Atomium Adamantis ? Comment pouvait-il savoir qu’il l’avait perdu ? Non, il l’ignorait forcément alors pourquoi devait-il trouver l’Icare ? Quel Icare ? Il sortit de sa poche les deux prospectus de la Bibliothèque d’Ambre.

— Un Icare, murmura-t-il avant que la vérité ne le frappe. Bien sûr.

Il grimpa dans sa Jeep, et sur les chapeaux de roue, il sortit de la cour en marche à arrière, montant à moitié sur le trottoir et fila à toute vitesse dans la rue étroite. Evan roula pendant une quinzaine de minute, traversant plusieurs arrondissements de la cité avant de freiner devant la Bibliothèque d’Ambre. Il était à peine dix-huit heures du soir, elle ne fermait pas avant vingt-deux heures. Alors que sa Jeep était aspirée par les entrailles de Paris-la-Nouvelle, il pénétra dans le gigantesque hall après avoir traversé les portiques. Ces derniers sonnèrent mais les gardes ne firent rien, se contentant de le dévisager, ayant son neshir bien en évidence avec son élégante veste shirag bleu en coton.

Il chercha un plan des différents étages et sections par étages et trouva celle qu’il cherchait. Elle existait bel et bien. Il prit l’ascenseur tubulaire en verre ambré qui le mena au septième étage de l’immense édifice conique. Il en sortit, traversa les grandes allées bordées d’étagères bourrés d’ouvrages en tout genre. Il s’arrêta à la section 234 : la biochimie et chercha les ouvrages dans la partie O, la biochimie moléculaire. C’était maintenant que cela devenait de la pure déduction. Plus ou moins. Il chercha les auteurs dont le nom commençait par B.

— Shaka Bantu, Aldon Ber, Oledah Breis, Carlton Bukite…

Oledah… Oui ce devait être cela. La racine du nom de Franz, Parker, venait du français il signifiait : gardien de parc ou garde forestier. Oledah venait d’Oledahior qui était le nom de l’un des sarafs, les gardiens flamboyants au service de l’Existant. Evan sortit l’ouvrage d’Oledah Breis titré « Protéomique structurale et fonctionnelle ». Il rechercha la page 98 et y découvrit un patch de stockage noir.

Un large sourire étira les lèvres d’Evan. Il le prit et le glissa dans la poche de son chino marron foncé. Il ferma le livre d’Oledah Breis et le rangea.

« Trouve l’icare ». C’était exactement ce qu’il venait de faire. L’icare BA-234-O-B98. Celui qui en s’écrasant avait couté la vie à ses parents. Tout était dans le numéro d’identification de l’icare. Ainsi Franz lui confirmait qu’il était définitivement question du projet Odiani. Qu’il avait bien tout compris lors de leur entrevue dans quartier du Coq. Il était impatient de jeter un œil à ce que contenait le patch mais il préférait attendre d’être chez lui.

Alors qu’il refermait la portière de sa jeep, se demandant toujours ce qui avait bien pu arriver à Franz, il aperçut une silhouette dans la pénombre du trottoir en face de l’entrée de son immeuble. Il s’immobilisa, regarda avec attention, mais il ne vit personne. Il hésita un moment, se demandant s’il avait mal vu, mais sans savoir pourquoi, il eut la conviction que ce n’était rien d’important, ni de réel.

Evan sentit alors un fourmillement dans sa nuque et ses muscles se tendirent par réflexe. La lame brillante et aiguisée d’un couteau jaillit de nulle part et traça un demi-cercle dans l’air froid. Elle lui aurait ouvert la poitrine s’il n’avait pas bondi en arrière à temps. Son dos heurta durement la portière de sa jeep. Son assaillant était tout de noir vêtu et portait un masque noir et lisse dénué d’orifice. L’assassin masqué tenta avec acharnement de lui planter sa lame dans le cœur mais Evan la dévia et la bloqua systématiquement et la Jeep récolta une série de rayures et d’impacts. En déviant à nouveau le bras meurtrier, Evan enfonça un direct fulgurant dans l’estomac de son agresseur. Il s’était élevé à mi-chemin entre le Vide et le Crépuscule pour amplifier sa force brute mais son adversaire n’émit pas le moindre cri de douleur en étant repoussé en arrière.

Mais qu’est-ce que c’était que ça ?

Evan s’éloigna vers la grille à reculons, ses sens aux aguets. Il n’avait jamais vu ce masque noir. Ce n’était pas un oshaïnim, c’était autre chose. Et visiblement pas un ignemshir. Le jeune homme amplifia la portée de son atmosphaira sans cesser de reculer, une main serrant fermement poignée de son neshir. Le spadassin s’arrêta puis sortit de son dos, sans bruit, deux revolvers à canon de Gauss. Ce n’était pas des armes qui couraient les rues et leur projectile pouvait atteindre 3500 mètres par seconde. Evan en connaissait la dangerosité. Il continua de battre en retraite tandis que son adversaire, aussi silencieux que la nuit, se rapprochait désormais de lui, à pas de loup, les bras le long des flancs.

Il leva subitement les deux armes le mettant en joue. Evan figea son Point de l’Être à mi-chemin entre le Vide et le Crépuscule réduisant au maximum le volume de son atmosphaira sans atténuer son effet dissuasif. Au niveau de ce que l’on appelait le Demi-Vide. Cette position sur l’Ul’Cirkaem lui permettait d’exploiter la Verrière Indestructible malgré son niveau. Evan suspendit le Chatoiement et son corps pesa d’un coup des tonnes. Deux bruits sourds résonnèrent dans la nuit et deux balles de revolver se figèrent en face de ses deux globes oculaires avant de retomber mollement dans la neige. Evan exhala, soulagé tandis que son cœur battait la chamade. Le tueur pencha la tête sur le côté visiblement surpris. Il ne s’attendait pas à ce qu’il fût capable de maîtriser la Verrière. Il était peut-être bien l’un des seuls alumni de Kiona Paine à être capable de la matérialiser car pour se faire, il fallait respecter des règles très précises concernant le Rythme de Chatoiement. Au Crépuscule, on devait se trouver au-delà de la Barrière d’On’el Ke’Issin afin que le Chatoiement dépasse la symbolique Limite d’Asilom et rende la Verrière permanente. Au Vide, il n’y avait plus de Rythme de Chatoiement, ou plutôt, il était extrêmement lent, trop lent, donc la seule alternative était de se tenir au Demi-Vide et de le suspendre. Il avait découvert cela lors de son combat contre les loups de Crocus.

Par contre, il n’était pas parvenu à traverser de nouveau la Barrière d’On’el Ke’Issin depuis son combat contre l’Ojin. Il ne se souvenait même pas clairement de ces moments. C’était Charlaine qui le lui avait avoué deux jours après les évènements alors qu’elle analysait de la cendre qui, selon ses dires, avait été produite par une capacité spéciale de son neshir. Les détails de l’affrontement étaient toujours flous à cause de l’espèce de transe étrange qui l’avait saisi à la fin du combat. Celle pendant laquelle il avait tenu des propos incohérents.

Aussi rapide que l’éclair, l’assassin au masque noir fondit sur lui, ayant désormais un poignard à lame ondulée dans la main. Evan hésita à se saisir de son neshir puis abandonna l’idée avant de bloquer la lame à quelques centimètres de sa tempe et de dévier le revolver qui émit un autre bruit étouffé. Evan entendit une succession de bruit de verre brisé dans son dos alors que la balle traversait les murs des immeubles comme un couteau dans une motte de beurre.

Le jeune ignemshir tordit le bras de l’assassin mais se prit un coup de genou dans les côtes. Il grogna de douleur alors que son assaillant se soustrayait de son emprise. Le flanc douloureux, Evan évita ensuite deux balles dont une qui lui frôla l’épaule. Il relâcha son atmosphaira puis profitant de la confusion de l’assassin, il lui assena un autre directe dans les côtes et les sentit craquer sous ses vêtements noirs.

Cette fois-ci, il se tenait au Crépuscule et à ce Point de l’Ul’Cirkaem, sa force brute valait aux dernières nouvelles deux Tanakim et demi. Son adversaire n’émit pas le moindre grognement de douleur alors qu’il était repoussé en arrière et il lui lança dans le même mouvement un poignard droit au cœur. Evan le dévia avec son neshir délamé et se rendit compte qu’à cause de son réflexe pour générer de nouveau la Verrière, le champ d’action de son atmosphaira s’était automatiquement réduit à son minimum. L’assassin, qui l’avait anticipé, avait déjà bondit vers lui et pressait son canon de Gauss contre sa jambe.

Son cœur rata un battement. Il relâcha violemment son atmosphaira, et récolta une profonde entaille à l’intérieur de la cuisse alors que l’individu masqué s’était jeté en arrière. Souple comme un chat, après un salto arrière, il lui tira dessus à plusieurs reprises. Evan retint in extremis le Chatoiement et une demi-douzaine de projectiles se figea dans l’air glacial.

Il jouait clairement avec lui.

Son assaillant se jeta en avant, les deux bras tendus, vidant son chargeur dans sa direction. L’alumnus voulut s’éloigner mais son corps pesait des tonnes. Si la balle partait de l’intérieur de l’atmosphaira, rien ne pourrait l’arrêter. Après une roulade avant, encore accroupit, il leva le bras d’un mouvement vif, et un poignard vola et se planta dans son épaule gauche. Evan grimaça de douleur. Naturellement, le poignard était trop lent pour être bloqué par la Verrière. Il se retrouva alors avec deux canons pointés sur lui, à cinq centimètres de sa mâchoire. Amplifiant l’intensité de son atmosphaira, il sût qu’il venait de se gagner environ une seconde. Ses mouvements à la vitesse augmentée, il tenta de bouger simultanément ses deux bras, écarta le canon gauche mais son autre bras, était trop lent et un terrible élancement lui vrillait l’épaule gauche. Il était clairement foutu. En l’espace de quelques centièmes de secondes, il sentit un atmosphaira tout près de lui. Une main dévia légèrement le canon alors que les deux revolvers tiraient en même temps. La balle du droit passa à un cheveu de sa boîte crânienne au-dessus de son oreille tandis que la main tordait violemment le poignet de l’assassin qui craqua. Le spadassin hurla ses premiers décibels derrière son masque sans orifice. Il ne s’avoua pas vaincu malgré la pression d’un atmosphaira aussi écrasant que le sien et un bras brisé, ce qui était un exploit pour un eretsin et pointa à nouveau sur Evan son autre canon de Gauss. Au moment où il appuyait sur la détente, Evan, à qui le geste arracha une grimace de douleur, lui avait déjà plié le bras et son arme retourné contre lui émit un bruit sourd.

La balle traversa le masque qui se recouvrit de craquelures. La vitre côté conducteur et le parebrise de la jeep explosèrent au même instant. Il s’écroula dans la neige, inerte, son sang chaud souillant le goudron enneigé d’une flaque sombre.

Haletant, Evan saisit la poignée de la dague plantée dans son épaule et la sortit en grognant de douleur avant de la jeter rageusement sur le sol.

— Ils sont vraiment teigneux, hein ? fit une voix au timbre chaud. Tu aurais pu lui régler son compte en moins de deux mais bon, c’est l’un des revers des shirkairons absolus.

Un oshaïnim se tenait à deux pas de lui. Evan ne tressaillit pas, ayant reconnu sans mal la voix. Il avait raison. Dans le credo du Lon-Shirkairon, le neshir était destiné à combattre tout adversaire à l’exception des eretsins. C’était pour cela qu’il était dit absolu.

Les neshirs ont été créé pour protéger l’humanité et non la détruire.

Tous les shirkairons n’étaient pas absolus. Uniquement ceux de Lukeni et d’Asano.

L’Héritier du Néant retira son masque et Evan découvrit sans surprise Nora qui repoussa sa capuche noire révélant sa crinière châtaine au reflet clair.

Elle venait de lui sauver la vie.

— Qu’est-ce que tu fiches ici, maugréa Evan dont les yeux se mirent subitement à piquer.

— Je passais dans le coin…

Il tomba brusquement sur les genoux. Son cœur battait de plus en plus vite. Il se sentait si faible. Pourquoi se sentait-il si faible ?

Que lui arrivait-il ?

— Empoisonné, souffla-t-il la bouche pâteuse. La dague…

— Bien entendu, fit-elle sur le ton de la conversation. Les Épines ne se battent qu’avec des lames empoisonnées.

Evan tenta de se relever mais ses genoux le trahirent. Il ne pouvait pas défaillir alors qu’il y avait un oshaïnim à deux pas. Il ne lui faisait pas confiance, même si elle venait de lui sauver la vie. Il doutait que ce soit un hasard qu’elle soit justement là alors qu’il venait de récupérer le patch de Parker à la Bibliothèque d’Ambre.

— Tu veux que je te sauve la vie ? Demanda-t-elle d’une voix calme.

S’il avait pu, il lui aurait enfoncé la dague empoisonnée dans la jambe pour qu’elle goutte au calvaire qu’il endurait. Il avait l’impression que son cœur allait exploser.

— Je… Commença-t-il à bout de souffle. Ne vais pas mourir… Peux pas…

— Oui, en général les poisons ne sont pas mortels pour nous, mais il y en a qui peuvent nous terrasser comme n’importe quel être humain, tu sais, même s’ils sont quasiment impossibles à trouver et à fabriquer tant les ingrédients sont rarissimes. Et je suis sûr que l’Épine a veillé à bien choisir le poison dont elle a amoureusement badigeonné sa lame.

— Veux… quoi… ? Haleta Evan qui était à deux doigts de perdre connaissance.

Il luttait de toutes ses forces.

— Qu’est-ce que tu as découvert dans la Bibliothèque d’Ambre ?

Evan se mit à rire mais le résultat fut particulièrement pathétique. Son expression douloureuse, sa respiration saccadée et l’écume qui s’accumulait sur le coin de ses lèvres lui enlevant toute crédibilité mais au moins il avait sa confirmation.

— Je préfère encore mourir...

Sa vue brouillée fit place aux ténèbres et toute sensation s’évanouit.

*

Nora le vit s’écraser dans la neige et dit alors en lâchant un soupir.

— Je n’en attendais pas moins de toi, Empereur Déchaîné


Texte publié par N.K.B, 15 décembre 2019 à 18h44
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