Salman Ruhk fixait Evan qui jouait au Go contre Jin Yung, l’actuel tertius. Il paraissait distrait bien qu’il fût clair qu’il était en train de remporter la partie. Tenant agilement la pierre blanche entre son index et son majeur, il la posa sur une intersection et Jin laissa échapper des jurons entre ses dents serrées.
L’Empereur Déchaîné leva les yeux du plateau de jeu quadrillé en bois du jeu de Go et balaya la pièce de son regard intense, l’air impassible. Son regard se posa sur lui alors qu’il s’adossait à son fauteuil, laissant à son adversaire le temps de réfléchir à son prochain mouvement.
Salman déglutit et détourna les yeux mal à l’aise face à l’intensité de son regard. Il se dégageait de lui une aura si intimidante et son visage aux traits harmonieux irradiait d’une force tranquille et d’une sorte d’autorité. Le sujet de l’article qu’il prévoyait toujours d’écrire reporta son regard sur le plateau et l’ombre d’un sourire passa sur ses lèvres.
Contrairement à certains Fils des Cendres qui paraissaient être constamment sur leur garde, posant des regards devenus naturellement intimidants autour d’eux, Evan semblait plutôt se tenir en quelque lieu qu’il soit sur le trône de son palais. Il semblait n’avoir rien à craindre de personne et malgré sa place de quintus et la disgrâce qui semblait sur le point de s’abattre sur l’un des meilleurs éléments de l’actuelle génération d’alumni, rien dans son attitude ne montrait que cette situation l’affectait.
Salman avait été invité par Jeff car il était l’un des rédacteurs de l’Observer de Kiona Paine, ce qui pour n’importe quel aspirants scientis ou salomens était une position de choix. Car les rédacteurs étaient toujours invités aux évènements importants impliquant les Sha’Daigan de la schola car l’Observer avait un poids non négligeable dans la vie sociale des alumni et des apprentis des instituts des Trois-Ordres des Trois-Monde.
Salman ne pouvait s’empêcher d’être un peu jaloux d’eux. De les envier en les voyant tous réunis dans l’immense salon richement orné de vases, de sculptures kuba, nilotiques et peul de la demeure de la famille Samba. Les murs arboraient des grands tableaux offrant une vue figée sur différents paysages de la savane, du bassin du Congo ou du delta du Nil ou d’Okavango. Les couleurs chaudes, du brun et du rouge, donnaient à la grande salle de vie une ambiance chaleureuse et conviviale. Plusieurs tapisseries accrochées au grand mur représentaient des passages mythiques des Royaumes Oubliés d’Ishar, de l’Aube Grise ou de l’Âge des Immortels, certain représentant parfois des éléments d’ouvrages poétiques et de récits anciens d’auteurs célèbres.
Les meilleurs alumni du continent et parmi les meilleurs du monde étaient assis nonchalamment en compagnie d’autres filles et garçons de leur âge dans des fauteuils et ou par groupe dans les canapés capitonnés en cuir brun et en maroquin au milieu de la pléthore de coussin de velours et de laine rembourré de plumes d’oie et habillé de coton incrusté de raphia. Ils jouaient à des jeux de réalités virtuelles, poussaient des exclamations devant la demi-finale de garoway qui avait lieu dans la cité de Calcutta dans Fédération des Indes et du Bengale, faisaient une partie de jeu de plateau, discutant simplement parfois, un mourch à la main comme si de rien n’était.
Aux premiers abords personne n’aurait supposé qu’ils étaient pour un grand nombre des guerriers sans peur et sans pitié. Tant leurs apparats pleins d’élégance, veste shirag, et pantalon en tweed, mocassins ou bottes, chemise en coton agrémenté de lavallière shediméenne ou nœud grand-duc ou de cravates, pour les garçons ; chemisier en coton, jupe plissée ou à empiècement en tweed ou en coton avec parfois une veste shirag, pour les filles, leur donnaient l’air d’un groupe de fils et filles d’aristocrates nés avec une cuillère d’argent dans la bouche. Ils donnaient l’impression de n’avoir jamais eu de problème sérieux dans leur vie, et quand on les regardait de loin, ils ne donnaient pas l’impression d’être des jeunes hommes et femmes préparés à la guerre depuis qu’ils avaient quitté les jupes de leur mère. C’était des guerriers agissant comme des adolescents normaux mais aucun d’entre eux n’hésiterait une seule seconde à trancher la gorge de son voisin s’il se retrouvait face à face dans une arène.
Les amalias de sexe féminin, toutes issues des Familles Anciennes, Sang d’Acier ou Sang de Fer, étaient réunis pour la grande majorité dans une partie du grand salon doté de magnifiques meubles en ébène et en chêne, de tables basses aux designs recherchés. Autour d’un jeu de fauteuils et de canapés disposés à l’écart, elles discutaient par petits groupes. Scientis, salomen et Latentes Sha’Daigan étudiant dans de grandes universités de droit ou de commerce du Sagolem, elles étaient toutes présentes. Elles parlaient avec animation parfois en disputant une partie de dame, de Roi-Pion ou d’échec. Elles étaient pour la plupart belles et insouciantes, élégantes dans leurs toilettes hors-de-prix, confectionnés par les plus grands couturiers de la région de la France Septentrionale à laquelle appartenait la cité de Paris-la-Nouvelle. Elles avaient toute une ou plusieurs nattes tressées d’une certaine façon et chaque arrangement avait une signification dans le jargon soloménique, en générale l’emblème de leur famille.
Le hibou d’argent saisissant une flèche blanche dans ses serres, des Harrow, la panthère rouge des Samba, le cheval ailé enflammé des Laurent, descendant de l’Impératrice au Milles Flammes, Ambre Eulalie Laurent, la montagne noire surmontée d’un soleil des Livingstone et les symboles familiaux de nombreuses autres familles de Sha’Daigan et de Sha’Genji étaient brodés sur les vêtements des invités de Jeff. Mais il n’y avait pas que des amalias, il y avait aussi d’autres filles, en majorité également issu de Familles Anciennes.
Les amalias de sexe masculin côtoyaient les alumni, certains parvenant même à se fondre parmi eux, comme celui de Shana, la nona, Rodrick, un Latent Sha’Daigan solidement bâtis. Il étudiait le droit et finirait sûrement gouverneur d’une cité à un moment ou à un autre comme son oncle, Charles Gautret. Il arborait sur son polo le sceptre gris sur une lune blanche, symbole du Sang de Gautret. Mais à bien y regarder, leur regard intimidant, leur geste souples et précis, trahissaient la véritable nature des Fils des Cendres
Les Sha’Daigan organisaient ces brunchs assez souvent à tour de rôle mais Lucas le faisait le plus souvent. D’après ses sources, c’était l’une des raisons pour lesquelles Evan fuyait ces rassemblements comme la peste. Salman avait entendu dire qu’a de nombreuses reprises lors d’évènements similaires, ceux que l’on appelait le Trio Infernal lui avaient joué de très mauvais tours. Cela remontait à quatre, cinq ans. Il n’était pas le seul, Bien d’autres alumni encore membre du primum agmen avaient dû subir et continuaient de subir les affres de leur méchanceté mais ils s’étaient accoutumés à cela, courbant l’échine devant les caprices et les velléités des trois Sha’Daigan. Sans parler des eretsins. La pathochrome avait eu beaucoup de difficulté à s’intégrer à cause de sa particularité. Ils l’avaient fait souffrir mais avec l’essor des Quatre Souverains, qui étaient ses très proches amis, les choses s’étaient arrangées pour elle. Désormais, plus personne n’osait s’en prendre à Charlaine Mitchel.
Evan avait été l’un des seuls aspirant à refuser de se soumettre même si en agissant comme cela, il s’était coupé d’un cercle social qui aurait été d’une grande importance dans sa future carrière dans l’Ordre. Car les relations étaient aussi importantes que la force et l’argent.
Salman se demandait pourquoi il était venu.
Peut-être parce que Jeff en était l’organisateur…
— Au fait, fit Jin en posant une pierre noire sur le plateau. J’espère que tu ne m’en veux pas pour la dernière fois. Lors des Gémeaux.
— Pourquoi t’en voudrais-je, tu es libre d’agir comme tu l’entends, lui répondit Evan en haussant les épaules.
Jin sourit. Enfin, esquissa un rictus qui ressemblait à un sourire, qui d’ailleurs ne se communiqua pas à ses yeux partiellement dissimulés derrière les mèches noires de sa coupe au bol. Il semblait aussi familier pour lui de sourire qu’à un poisson de voler. Un personnage maussade… Vraiment. Il paraissait porté toute la misère du monde sur ses larges épaules.
— Mais… si c’était à refaire, je le referai… dit-il avec détermination
— Je comprends.
— Tu es un poids mort dont il devrait se débarrasser.
Evan haussa un sourcil, perplexe.
Qu’est-ce que c’était censé vouloir dire ?
— Tu pourrais développer ?
— Tu sais, je connais Keiji depuis plus longtemps que toi. Avant que tu ne sortes de ton trou, il y a neuf ans, lui et moi on était très proche.
— Je m’en souviens. Tu le suivais partout.
— Il me considérait comme son frère de la même manière qu’il te considère toi. J’aurais sûrement été son A’shua Meno, si tu n’avais pas été là.
— Donc… si je comprends bien, tu insinues que je t’ai volé ton ami ?
— Je n’insinue pas, tu l’as fait.
Ils se regardèrent un moment sans rien dire. Evan fronça légèrement un sourcil, perplexe.
Jin était-il vraiment sérieux ou il se fichait de lui ? Non mais il se croyait où ? Dans une cour de maternelle ?
— Tu te dis sûrement que mes propos sont grotesques.
— Tu lis si clairement en moi, Yung...
— Quand nous étions petits, Keiji m’a sauvé la vie à plusieurs reprises. Une fois, il a même failli mourir pour moi. Il n’a jamais eu peur de rien et a toujours protéger ceux qu’il chérissait même au prix de sa propre vie. C’est pour cela qu’il deviendra un excellent Noguemi. Un Seigneur Authentique et sûrement un Aurarque, et un très puissant. Mais même les puissants ont besoin de soutien. D’un bras droit, de quelqu’un capable de garder leurs arrières. C’est pour cela que l’Aurarque à un Calisto, les Imperators, des Couleurs et ainsi de suite jusqu’aux Décurions et leur Décurion en second.
— Où veux-tu en venir ?
— Toi tu n’as pas l’étoffe d’un second, Evan.
— Je n’ai pas l’étoffe d’un second ? Répéta Evan avec un sourire moqueur. Je vois...
— Non, tu ne vois pas. Tu es égoïste, arrogant, emporté et tu ne te soumets à personne. Jusque-là, je n’en ai jamais parlé, c’est parce que je t’estimais relativement digne de prendre ma place. A cause de ta force, mais désormais tu ne l’as même plus. Tu ne vaux plus rien et tu le considères toujours comme ton égale alors qu’un gouffre énorme vous sépare désormais.
Il ne valait plus rien ?
Jin Yung… Ses propos ne le surprenaient pas vraiment. Depuis qu’il le connaissait, cela n’avait jamais été l’amour fou entre eux. Son attitude avait toujours oscillé entre une indifférence plus ou moins marquée et une méfiance parfois méprisante, d’autre fois carrément glaciale. Evan avait toujours supposé que ce fût parce qu’il était un man’kel et qu’il était devenu proche de son meilleur ami mais maintenant, il comprenait que c’était simplement parce qu’il le considérait comme un rival et un usurpateur…
Evan esquissa un sourire, sarcastique cette fois, avant de répondre.
— C’est un bien beau discours, Jin. Mais dis-moi, qu’est-ce qui te fait penser que j’ai envie d’être son second ? Pourquoi voudrais-je être le second de qui que ce soit ?
Jin se redressa brusquement en le regardant avec un mélange d’étonnement et d’indignation, le poing serré autour de la pierre noire qu’il tenait. Il grimaça très légèrement à cause des reliquats de la blessure que Keiji lui avait infligée deux jours plus tôt.
Il serait mort face à un autre que Keiji. Le Shogun savait par moment faire preuve de compassion même s’il refusait de le reconnaître. Evan les avait clairement entendus parler à travers la fumée pendant qu’il se vidait de son sang face à Lucas. Il avait entendu les vaines tentatives de Jin pour empêcher son A’shua Meno de lui venir en aide. Pour le convaincre. Et cette attitude servile qu’il avait toujours eue envers Keiji... C’était justement cela qui l’avait disqualifié aux yeux du Shogun aux Regard d’Aigle. Le Sang d’Asano détestait le manque d’indépendance car lui-même était très indépendant. Si l’on voulait prétendre être un ami, et même plus, être son A’shua Meno comme le désirait Jin, il fallait que ce dernier puisse s’identifier à lui. Y voir un alter ego. Et Keiji était un roi pas un serviteur. Et il attendait de ses amis cette même indépendance et cette même assurance. C’était ce que Jin n’avait jamais réussi à comprendre.
Keiji avait volontairement parlé avec lui plus longtemps afin d’arrêter sa lame au moment où résonnerait les trois notes de fin d’épreuve car à ce moment, il avait déjà compris ce que lui mijotait dans son combat avec Lucas. Qu’il comptait sur la Trinote pour s’en sortir. Le retentissement de la Trinote marquait la fin des épreuves et interdisait à tout alumnus d’attaquer ou d’en blesser un autre avec son neshir sous peine d’être envoyé au Fer.
Evan posa une pierre blanche sur le plateau.
— Tu… balbutia Jin.
— Écoutes Jin. Je suis désolé que tu ne l’aies toujours pas compris mais ce n’est pas moi qui t’éclaira sur la question. Mais je vais te dire cela. Keiji est mon A’shua Meno, oui. Je mourrais pour lui s’il le fallait et j’ai une confiance absolue en lui, oui. Mais devenir son second n’a jamais été le but de ma vie.
— Comment peux-tu...
— Je n’idolâtre pas le gens. Ce n’est pas dans ma nature. Car après tout, nous retournerons tous aux cendres, un jour. Bien le courage à celui qui saura différencier les miennes de celles du Roi au Sang d’Airain. Et puis, si la place t’intéresse tant, tu n’as qu’à postuler. Keiji t’apprécie peut-être encore assez pour cela, même s’il a failli te faire passer au fil de son épée…
Jin ne dit rien, ses yeux noirs écarquillés, son visage juvénile incrédule, dégoûté par ses propos.
— Heureusement pour toi, il ne se soucie pas des origines de ses amis, continua Evan avec un petit rictus. Qu’ils soient des ma’nkel comme moi ou des Makel Rolsin… comme toi.
Les Yung, la famille de Jin, avait perdu leur statut de Sha’Daigan deux siècles plus tôt. Elle n’appartenait donc plus aux Familles Anciennes. Ils étaient désormais des Makel Rolsin.
Cela signifiait branche rouillée. Ils étaient pratiquement autant méprisés que les ma’nkel sinon plus mais Jin jouissait du respect de ses pairs grâce à sa force. Il était d’ailleurs le tertius depuis deux semaines. Ce qui en générale dans le primum agmen signifiait qu’il s’était stabilisé. Il avait vaincu tous ceux ayant un classement inférieur au sien et qui avait tenté de le détrôner. Il était juste derrière Keiji, ce qui explique ce regain de confiance et ses paroles envers lui.
Le rappel de son statut lui déplut et il lui lança un regard assassin avant de se lever brusquement.
— J’arrête, fit-il en lançant la pierre dans le pot. J’ai perdu. Inutile d’insister
Tu avais perdu avant même de commencer, pensa Evan.
L’ignemshir à la coupe au bol s’éloigna vers la cuisine de sa démarche énergique avec son air maussade coutumier. Son amalia, Kara, se leva en le voyant passer et le suivit non sans lancer un regard curieux en sa direction.
Oui, cela faisait longtemps qu’il n’était plus venu… Et il aurait mieux fait de ne rien changer à ses habitudes. Se faire agresser gratuitement alors qu’il n’avait rien demandé à personne. Cela ne lui avait pas manqué le moins du monde.
Evan tendit l’oreille et se souvint pour de bon la raison pour laquelle il n’aimait pas ces rassemblements et pourquoi il n’y venait jamais. Au-delà de ne pas avoir à supporter Baptiste, Lucas et Jordan, et leurs jeux stupides.
Les sujets de discussions étaient toujours les mêmes. Ils parlaient toujours du prestige de leurs familles, des faits de guerre de leurs ancêtres essayant de se prouver qu’ils étaient plus dignes d’être des Sangs d’Acier ou de Fer que leur voisin.
Le seul autre ma’nkel présent, Joaquin, le quartus, jouait silencieusement au backgammon avec Marlon, le douzième. Joaquin s’était toujours fondu au milieu d’eux sans faire de vague. Il ne cherchait jamais à tenir tête au trio infernal que constituaient Baptiste, Jordan et Lucas, et ces derniers le laissaient plus ou moins tranquille depuis qu’il était classé plus haut dans le primum agmen qu’eux.
Evan supportait difficilement de rester là à les écouter parler avec une arrogance ridicule et fierté excessive de leurs glorieux ascendants dont certains faits d’arme remontait pour les Sha’Daigan à près d’un millénaire. Non pas parce qu’il les enviait mais parce qu’il voyait comme cela comptait pour eux. Ils se définissaient par rapport à eux. Ils en oubliaient que chacun était l’artisan de sa propre légende. Le prestige de leur ancêtre ne les sauverait pas sur un champ de bataille. Lors de son ascension jusqu’au primum agmen, il leur avait prouvé à chacun que la force de leur ancêtre restait la force de leur ancêtre. Elle avait été consumée en même temps que le reste de leur personne dans les Barques du Quai... Il n’y avait qu’eux et personne d’autre. Pourquoi ne pouvait-il pas placer leur gloire dans autre chose que le passé ? Pourquoi mettre son assurance et sa fierté dans cela ? Parce qu’ils n’avaient rien d’autre. Le pouvoir du Sang. C’était la règle d’or de la culture ignemshir, un des principes fondateurs de la Civilisation d’Airain.
Ces enfants apeurés avaient forgé leur personnalité en s’inspirant de leur ancêtre et en se confortant de leur position dans l’échelle social. La Compatibilité qu’ils avaient hérité leur donnaient un avantage certain, mais ce n’était pas une règle absolue. Il le leur avait bien montré… Mais désormais, il ne le pourrait plus.
Il eut un sourire maussade en lançant d’un mouvement du pouce la pierre blanche qu’il tenait dans son pot.
Après tout, rien ne perdurait éternellement...
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