« J’ai passé ma nuit à pleurer. Je ne pensais pas qu’enquêter sur Jenson et son affaire m’amènerai à cela. Eris, une organisation qui se mêle aux armées et aux groupes militaires et paramilitaires, regrouperait les traîtres recherchés par mon ancien supérieur. Et nous avons donc débuté notre enquête au sein de l’armée anglaise. Pourquoi… Je suis tellement stupide…

Jean est devenu civil, il a quitté les bancs de l’armée, et Luna a pris du gallon dans le service de renseignements. Quant à Raphaël, mon géant au cœur d’or, mon frère d’armes, mon confident, il est toujours en service. Il est venu me voir, du moins il est venu à l’appartement et Ange m’a prévenu. J’y suis allée rapidement, je me doutais qu’il m’y attendrais, mais je ne me doutais pas de ce qui m’attendait en revanche. »

Une feuille a été arrachée du carnet, le reste des pages est un peu froissé. Il commence à s’abîmer sous les émotions de l’écrivaine.

« Je suis restée plantée devant la porte comme une conne, c’est un fait. Je n’en revenais pas de le voir. La joie se disputait à l’angoisse et j’aurais mieux fait d’écouter la seconde, pour m’éviter une désillusion plus que douloureuse. Me prendre une telle claque, surtout devant le reste de la coterie… J’ai hésité à me jeter dans ses bras.

Devant mon silence, il a pris les devants. Il m’a donné la plus magistrale des gifle. Il m’a ordonné de ne plus tenter de revenir dans sa vie, de ne plus revenir à l’armée. En gros, de ne plus remuer la merde. Comment une personne aussi gentille, aussi belle, aussi bonne que Raphaël pouvait avoir de telles paroles pour moi ? Lui qui m’avait soutenue, aimée, guidée pendant des années? »

Le papier est de nouveau gondolé et l’encre a légèrement bavé. Elle semble avoir été essuyée maladroitement.

« Lorsque je l’ai vu, j’ai espéré retrouvé mon partenaire et je suis tombée de haut. Je n’ai rien pu répondre. Je ne me vois pas l’attaquer, être mauvaise avec lui, parce que dans le fond je sais qu’il a raison. Il n’est au courant de rien, il est persuadé que je suis bien une traîtresse et je pense qu’il a été le plus blessé de cette histoire. Et même s’il apprend la vérité aujourd’hui, même s’il comprendra sans doute que je ne pouvais pas tout lui dire à l’époque, pardonnera-t-il seulement mes mensonges ?

Lorsque j’ai pris la décision d’accepter le plan de Jenson, j’ai également accepté d’être le bouc-émissaire de l’armée, de mon équipe et des Chevaliers du Knight. Être la cible de leur haine dans un noble but me paraissait presque un bel idéal. Mais je n’avais pas fait face directement à celle de mes anciens compagnons d’armes. Désormais, je ne suis plus certaine de rien. »