Objet/chose « laser »
Émotion/état « indifférence »
Couleur « rouge »
1000 mots
Les premiers tours ne comportaient pas d’enjeux : il s’agissait juste de tester les systèmes de son engin et ses propres réactions. Il se lança sur le circuit à allure modérée puis effectua une série d’accélérations et de freinages, en jouant sur les équilibres subtils entre les commandes moteur et les commandes de répulsion. Le garçon avait toujours apprécié les réponses fluides du X-Trace, qui obéissait à ses sollicitations les plus subtiles. La capacité de transmission fulgurante de l’argyrium transformait presque le véhicule en un prolongement de sa volonté.
Lukas avait entendu dire qu’en dehors des zones protégées, certains pilotes d’engins sportifs comme utilitaires avaient recours à des perfusions d’argyrium, qui leur permettait de littéralement fusionner avec les commandes de leurs engins. Même si les habitants de la zone extérieure ne pouvaient plus être vraiment qualifiés d’humain – au sens génétique du terme -, un tel procédé relevait de l’abomination pour les Stellariens. Ce qui n’empêchait pas Lukas d’éprouver de la curiosité pour les capacités de ces « infusés », comme on les nommait. Faire intégralement corps avec sa machine devait procurer un sentiment de maîtrise indescriptible. Lukas regrettait de ne pas pouvoir se mesurer à eux, pour jauger leurs capacités.
La voix de Lindey retentit dans ses écouteurs :
— Lukas, essaye de te concentrer ! Si tu continues à rêvasser, tu tourneras seul toute la soirée !
Lukas sursauta ; le X-trace effectua une légère embarder avant de se réaligner avec la piste.
— Je suis désolé. Je vais faire plus attention.
Il reporta son attention sur la piste en s’efforçant de faire taire les pensées parasites qui lui traversaient l’esprit. Il lui restait un seul tour à accomplir en solo. Dès qu’il pourrait se confronter à ses deux rivales, la course deviendrait bien plus intéressante. Il les connaissait depuis ses débuts, deux ans plus tôt ; ils s’étaient affrontés sur toutes leurs courses depuis les premiers test de sélections jusqu’aux récents championnats de la ville.
Il appréciait tout particulièrement Suri. Même si elle n’était pas la coureuse la plus talentueuse contre laquelle il s’était mesuré, c’était une jeune fille courageuse et persévérante, qui possédait une excellente maîtrise de son engin et qui se montrait amicale et bienveillante envers ses compétiteurs. Il éprouvait le plus grand respect pour elle.
Il ne pouvait pas en dire autant de Rilka. Elle faisait preuve d’un comportement très compétitif, voire agressif, surtout depuis qu’il lui avait volé la première place, un an plus tôt. Son tempérament explosif la poussait parfois à des actions impulsives, surtout quand elle se retrouvait en difficulté. Ce comportement lui avait coûté plusieurs défaites, même quand elle figurait parmi les favoris. Elle avait transformé sa rivalité avec Lukas en vindicte personnelle. Linday la reprenait souvent sur son attitude, mais Lukas ne s’en formalisait pas. Même s’il s’efforçait de ne pas se laisser aller à ce style d’attitude, il pouvait tout à fait la comprendre, et traitait ses piques d’hostilité par l’indifférence. Son acharnement l’obligeait toujours à se surpasser, mais elle l’épuisait parfois, quand il sortait d’une journée difficile et qu’il aspirait à une session plus détendue. Même s’il savait qu’il n’y aurait pas de conséquences, il ne se sentait pas prêt à la laisser le surpasser.
Il avait appris de ses deux rivales : Suri lui avait fait comprendre la valeur d’un effort régulier, tandis que Rilka avait plutôt servi de contre-exemple, en lui montrant que garder son calme en toutes circonstances, même si c’était parfois difficile, pouvait faire toute la différence. Même s’il connaissait les défauts et les faiblesses de ses compétitrices, il ne les sous-estimait pas pour autant. Les voir apparaître lors des séances d’entraînement lui fournissait une motivation supplémentaire.
Les deux coureuses glissaient sur leur voie respective, de part et d’autre de la sienne. Suri arborait son habituelle combinaison jaune ; elle chevauchait un Fligend CT 456, un modèle qui commençait à être un peu ancien, mais qui avait subi de nombreuses modifications pour améliorer sa maniabilité et sa puissance de répulsion. Rilka, mince et anguleuse dans sa tenue rouge, poussait déjà son Ayrith Vipel 2100. Ce modèle avait quitté le statut de prototype juste deux mois plus tôt.
La jeune fille semblait lancée sur une fuite en avant qui la pourrait à changer d’engin tous les deux ou trois mois, dans l’espoir de trouver la machine avec laquelle elle se sentirait pleinement compatible. Lukas se moquait parfois d’elle, en lui rappelant que le motoglisseur ne faisait pas le pilote. Malgré tout, cette attitude ne semblait pas trop mal lui réussir. Le garçon avait l’impression de toujours l’avoir sur ses talons.
La présence de deux concurrentes obligeait Lukas à se concentrer sur sa conduite ; bientôt, les parois magnétiques disparaîtraient, et il devait être prêt à passer en mode compétition. Il testa une nouvelle fois les accélérations de son X-trace, en modulant la poussée des répulseurs. Ce n’était pas quand il sillonnait les routes de la ville qu’il en avait l’occasion de le faire. Lindey lui reprochait souvent d’employer son motoglisseur pour un usage quotidien, mais Lukas n’avait aucune envie de se contenter d’un véhicule de second ordre quand il pouvait circuler sur une machine performante, qu’il connaissait à fond.
— Les enfants, je veux vous voir sur la ligne zéro avant de baisser les murs.
Lukas grogna intérieurement. Il se sentait bien lancé et n’avait pas envie de s’arrêter pour repartir, mais l’entraîneuse ne lui laissait pas vraiment le choix. Il freina progressivement pour placer le X-trace au niveau du système de détection laser qui identifierait leur point de départ exact. Dans un bref chatoiement, les parois se résorbèrent. Les choses devenaient sérieuses.
Il tourna légèrement la tête vers la droite et rencontra le regard de Suri. La jeune fille lui adressa un hochement de tête amical auquel il répondit. Il ne prit pas la peine d’en faire de même pour Rilka ; sa nervosité était presque tangible.
Lindey n’avait pas besoin de faire le décompte ; il sonnait sous forme de bips électriques dans leurs écouteurs. Malgré tout, la jeune femme ne put s’empêcher de le formuler à l’ancienne.
- Cinq… quatre… trois… deux… un, go !
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