Il retrouva Lynette, assise à table qui fixait avec attention le contenu de sa tasse. Dès qu'elle l'entendit arriver, elle se tourna vers lui, avec un petit sourire. Cependant, lorsqu'elle comprit que cela signifiait qu'il allait partir, elle baissa les yeux.
-Il fait nuit, murmura-t-il.
-Je ne m'en étais pas rendu compte…
Le silence s'installa, pesant.
-Est-ce que ça va ?
La jeune fille hésita. Pouvait-elle réellement lui dire que rien n'allait et qu'elle ne voyait pas comment s'en sortir ? C'était un peu le mettre au pied du mur, pour l'obliger à rester. Elle ne pouvait pas faire ça.
-Ca ira.
Rester vague, c'était la solution.
Dvan se demanda ce qu'il devait faire. Il voyait bien que ça n'allait pas, mais il n'osait pas se mêler d'affaires qui ne le concernaient pas. Il avait déjà suffisamment profité de l'hospitalité de la jeune femme.
Qu'aurait-il dû dire ? Il chercha à toute vitesse.
-Je vais y aller.
Elle hocha la tête.
-Je comprends. Ne vous en faites pas pour moi, ça ira. Vous avez sûrement beaucoup à faire…
Non, en vérité, il n'avait rien à faire. Il n'avait aucune envie de partir. Pourtant, son corps se dirigea de lui-même, vers la porte.
Dis quelque chose Dvan, sinon ça sera trop tard, pensa-t-il.
-Au revoir.
Pourquoi fallait-il que se soit la chose la plus idiote et la plus banale qui sorte de sa bouche ?
Il s'arrêta.
Si jamais il sortait, ça serait trop tard. Il ne pourrait plus revenir en arrière…
Alors qu'il s'apprêtait à prendre la parole, une voix traversa la pièce.
-Attendez !
Il se retourna. Lynette s'était levée et accouru vers lui.
-Ne partez pas. S'il vous plaît, je ne veux pas rester seule. Je sais que c'est égoïste et que vous avez sûrement des choses à faire, mais j'aimerais que vous restiez avec…
-D'accord.
Dvan fut soulagé et sauta sur l'occasion. Heureusement, qu'elle avait prit les devants.
-Quoi ?
-Je reste.
Elle en fut la première surprise.
-C'est pas comme si j'avais beaucoup d'endroits où aller. Il faudra juste que je sorte chercher mes affaires.
Lynette le regarda, avant de se mettre à pleurer.
-Euh… C'est à cause de moi que tu pleures ?
Il ne savait pas trop quoi faire dans cette situation.
-Je vais te chercher un mouchoir.
-Ca ira.
Elle tira le sien de sa poche et s'essuya les yeux.
-C'est juste que je suis tellement contente, que vous restiez…
Elle paraissait vraiment sincère. C'était étrange.
-Bon assieds-toi. Je vais te faire une tisane.
Il fallait absolument qu'il fasse quelque chose pour s'occuper. La situation le mettait mal à l'aise. Pourquoi paraissait-elle si contente juste parce qu'il voulait bien rester ? Avait-elle besoin de quelqu'un à ce point ?
-J'en ai déjà une, répliqua-t-elle.
Il posa la main sur la tasse.
-Elle est froide. Je vais t'en fais une autre.
-Mettez juste un peu d'eau chaude dedans et ça ira. Je ne vais pas la gâcher…
Sans savoir pourquoi Dvan s'empara du récipient et le porta à sa bouche, pour en boire le reste.
-C'est bon, je peux en faire une nouvelle.
Une exclamation de stupeur s'éleva derrière lui.
-Mais ce n'est pas dangereux !?
Il se retourna.
-Dangereux ?
-Oui, pour vous de boire de la tisane ?
-Non, c'est liquide donc ça devrait passer.
-Devrait ?
Il préféra se concentrer sur le nettoyage de la tasse. Pourquoi avait-il fait ça ? Il n'aurait su le dire lui-même. Peut-être pour s'occuper les mains et cacher sa gêne…
Le géant posa la tisane fumante devant elle.
-Tiens, voila. Qu'est-ce que je peux faire d'autres pour toi ?
Pourquoi se comportait-il ainsi ? Il devait avoir l'air d'un idiot et cela pousserait sûrement Lynette à s'interroger sur ses intentions.
-Asseyez-vous. Je ne vous ai pas demandé de rester pour vous faire travailler. Je… J'avais juste envie que vous soyez là.
Cela ne fit qu'accentuer sa gêne. Si elle avait besoin de lui, pour le cimetière, il aurait pu comprendre. Mais là, vouloir qu'il reste juste pour qu'il soit là, c'était étrange. Que devait-il faire du coup ?
Il s'installa à côté d'elle, attendant d'en savoir plus.
-Qu'est-ce que je dois faire ?
Elle se tourna vers lui, avec un large sourire. En l'espace de quelques instants, elle paraissait métamorphosée. Qu'est-ce qui pouvait la changer à ce point ?
-Ce que vous voulez. Je n'ai pas la prétention de gérer votre vie.
-Mais tu voulais que je reste…
-Je mentirais, si je disais que je n'avais pas besoin d'aide. Seulement, ce n'était pas la seule chose, qui me fait vous demandez de rester. Je…
Elle s'interrompit et détourna le regard.
-Je me sens en sécurité lorsque vous êtes là.
-Vraiment ?
Mais pourquoi fallait-il qu'il réponde la première chose qui lui passer par la tête ? Surtout pour dire des choses aussi idiotes.
-Oui.
Elle le regarda dans les yeux, avant de poser la main sur la sienne. Ce geste manqua de le faire sursauter. Il lui sourit pour cacher son trouble, mais son visage se ferma instantanément.
Évidemment, il fallait qu'elle choisisse sa main droite. Logique vu qu'il était assis à sa gauche. Seulement, elle devait sûrement déjà le regretter, en sentant les cicatrices sous sa paume. Cherchant quoi faire, il hésita. Se saisissant délicatement du bout de ses doigts, il se libéra avant de cacher sa main sous la table.
-La gauche, murmura-t-il. Toujours la gauche…
Elle le fixa d'un air interrogateur. Vraisemblablement, la jeune fille ne comprenait pas ce qu'il venait de faire. En même temps, il ne voyait pas comment cela aurait pu être le cas.
-Je vous ai blessé ? demanda-t-elle d'une voix mal assurée.
Elle retira sa main, restée sur la table.
-Si c'est parce que je vous ai touché, je ne recommencerais pas…
Il sentit son coeur se briser à ces mots. C'était la dernière chose qu'il voulait. Seulement, il comprenait parfaitement qu'il ne présente aucun attrait à ses yeux. Elle voulait juste être gentille, c'était tout.
-Non, c'est juste…
Que devait-il dire ?
-Je n'aime pas trop qu'on touche ma main droite, et le reste…
Lynette fronça les sourcils.
-Mais pourquoi ?
Il la regarda sans comprendre. Voulait-elle dire qu'elle ne s'était rendu compte de rien ?
Dvan cachait toujours sa main sous la table. A regret, il la ressortit et la posa sur le bois. Il préféra détourner le regard. Qu'allait-elle penser ?
-Qu'est-ce que…
Alors elle n'avait même pas remarqué ? Il s'était fait un sang d'encre pour rien.
-Des traces de brûlures, murmura-t-il.
-Je vois. Ca vous fait mal ? Je suis désolée, je ne voulais pas vous faire souffrir.
Le géant se tourna vers elle. Elle se méprenait, ce n'était pas ce qu'il avait voulu dire.
-Non, c'est juste… Enfin si… Mais… Oui, des fois, ça fait mal…
Si elle parvenait à comprendre quelque chose dans son charabia, elle était vraiment très forte. Lui-même s'était perdu en chemin et ne savait même plus ce qu'il voulait dire. Devait-il répondre à la question, la rassurer ou lui expliquer son geste ?
-Attendez-moi. Je reviens.
Et voilà, qu'elle se levait avant qu'il est pu avoir la moindre discussion. Il se frappa le front avec sa main. Pourquoi ne s'était-il pas acheté des gants comme il s'était promis de le faire plusieurs fois ? Si tel avait été le cas, il n'aurait pas eu ce problème.
Se souvenant du peu d'argent qu'il avait en poche, la réponse s'imposa d'elle-même. Il ne l'avait pas fait parce qu'il n'en avait pas les moyens. En même temps, s'il avait passé moins de temps à faire la tête dans son coin…
Et maintenant, qu'allait-il arriver ? Si elle se mettait à ne plus le regarder comme avant ou alors si elle lui parlait avec un air emplie de pitié que ferait-il ?
Dvan serra les dents. Comment supportait cela, après qu'elle les accueillit si gentiment et qu'elle lui est offert tant de sourire ? Il se mit à prier pour que rien ne change.
Bien sûr, elle devait déjà s'être aperçu que son visage avait été ravagé mais elle pensait sûrement qu'il n'y avait que lui et pas toute une partie de son corps en plus. Si elle venait à douter qu'il puisse lui être utile, et qu'elle souhaitait qu'il s'en aille…
Le géant tenta de calmer son coeur qui battait à tout rompre. La moitié de ses pensées étaient incohérentes et n'avaient aucun rapport avec la situation. Lynette lui avait demandé de rester. Elle disait apprécier sa compagnie et n'allait sûrement pas le jeter dehors, juste à cause de cicatrices sur sa main.
Seulement, c'étaient ses cicatrices. Ses horribles cicatrices qui lui gâchaient la vie.
Il pourrait lui promettre de porter des gants comme ça, elle ne serait plus importunée par la vue de ses anciennes blessures.
Elle réapparut avec un pot en verre dans les mains.
-Désolée, j'ai été un peu longue. Je ne savais pas où mon père l'avait rangé.
Il ne nota aucun changement notable chez elle, lorsqu'elle s'assit à son côté.
-Je l'ai acheté pour mon papa.
Elle désigna le contenant, du doigt.
-Les hivers sont rudes dans le coin et comme il travaille dehors, il a souvent la peau abîmée.
Sans attendre de réponse de sa part, elle fit tourner le couvercle pour ouvrir le pot. Dvan la laissa faire surprit. Elle lui prit doucement la main et plongea ses doigts dans la crème, avant de les poser sur sa peau et d'étaler le produit délicatement.
Le géant se sentit frissonner, à ce contact.
-Je ne vous fais pas mal ?
-Non, c'est très agréable.
Il se mordit les lèvres, à peine ces paroles dites, mais elle ne s'en formalisa pas.
-J'espère que ça vous aidera un peu. Le temps est en train de se refroidir alors ça doit être pire pour vous ?
-Je… Je ne m'étais jamais vraiment posé cette question.
C'était la vérité. Toujours occupé par ci ou ça, il passait outre la douleur. Après tout, elle ne partirait vraiment jamais alors autant faire avec.
-Voilà, c'est terminé.
Elle retira sa main et il le regretta. Dvan devait avouer que ce contact lui avait fait très plaisir.
-Est-ce que ça remonte plus haut que votre poignet ? Si tel est le cas, je peux continuer. Enfin, si vous remontez votre manche…
Le géant se sentit faire la grimace, pour qu'elle s'occupe de chacune de ses citatrices, il aurait dû enlever sa chemise, voir même se mettre complètement nu.
-Ca ira, murmura-t-il. Je te remercie pour ta gentillesse. Mais je m'occuperais du reste, seul…
-Comme vous voulez, mais sachez que ça ne me dérange pas.
-C'est très laid, lâcha-t-il.
-J'ai vu des cadavres en décomposition. Ca, c'est très laid. Je n'aurais pas peur d'une cicatrice.
Il baissa les yeux. Elle l'étonnait. Comment pouvait-elle rester aussi forte ?
-Ce n'est pas une, mais plusieurs, répliqua d'un ton plus violent qu'il ne l'aurait souhaité.
-Désolée, je ne voulais pas vous blesser. Je comprends que vous soyez gêné. Je vous laisse le pot. Si ça vous fait du bien, tant mieux, sinon j'aurais essayé…
-C'est celui que tu as acheté pour ton père, je ne peux pas l'accepter.
Une ombre passa sur son visage.
-Je préférais qu'il serve.
Dvan hésita, avant de répondre. Il venait de lui faire du mal, par deux fois, alors qu'elle ne voulait que son bonheur.
-Merci. J'en ferais bon usage.
La jeune fille lui sourit à nouveau. Comment réussissait-elle à le faire dans ces conditions ? Elle devait être dévorée par la peur de ne plus jamais revoir son père. Lui-même, ne lui était pas d'une grande aide, et pourtant elle prenait sur son temps pour qu'il aille mieux.
-Qu'est-ce que je peux faire pour toi ? lui demanda-t-il. Tu as déjà tant fait pour moi, maintenant, c'est à mon tour.
-Ca dépends. Que voulez-vous faire ?
-Ce que tu veux. Demande-moi et je le ferais.
Elle détourna le regard en rougissant.
Ce ne fut qu'en cet instant, qu'il prit conscience du double sens de ses paroles. Ce n'était vraiment pas ce qu'il essayait de lui dire.
-Il y a plusieurs choses…
La voix de Lynette le ramena à la réalité.
-J'aurais besoin d'aide pour le cimetière. Seulement, le problème, c'est que je n'ai pas de quoi à payer un employé…
-Tu n'as pas besoin de me payer. Tu me loges déjà, c'est bien.
Elle se tourna vers lui, surprise.
-Vous avez dormi par terre sur une couverture ?! Je n'appelle pas ça « loger quelqu'un ».
-C'était suffisant.
-Mais ça, c'est de l'exploitation ! Je ne peux pas vous demander de faire tout le travail et vous faire dormir par terre en plus !
Elle parut réfléchir.
-Je vais vous laisser ma chambre et je dormirais dans le lit de mon père. La fenêtre donne juste dessus, je ne peux donc pas vous laisser y dormir.
-Je te jures que ça ne pose pas de problème.
-J'insiste.
Dvan baissa la tête.
-J'aime bien t'entendre la nuit…
-Je parle la nuit ?
Elle lui lança un regard surpris.
-Non. Mais j'entends ta respiration et ça m'aide à dormir. J'ai honte de le dire, mais je n'ai pas l'habitude de dormir seul…
Lynette se mit à rougir, sans savoir pourquoi cette révélation lui faisait mal au coeur. Elle ne pouvait que s'interroger sur cette mystérieuse présence. Heureusement, elle n'eut pas à attendre longtemps avant d'avoir la réponse.
-J'ai toujours vécu avec ma sœur : Rosa.
Elle ne put s'empêcher de sourire à cette nouvelle. Elle se sentait brusquement soulagée.
-Bon, nous allons réfléchir à une solution, murmura-t-elle.
-Qu'est-ce que je dois faire pour t'aider alors ? Ce métier, je ne le connais pas. Du coup, tu n'auras qu'à donner les ordres et moi, je serais les muscles.
-Merci.
Elle baissa la tête.
-Je vais devoir sortir alors, je vous expliquerais tout à mon retour.
-Sortir ?
Il fronça les sourcils.
-Où devez-vous aller ?
-Il fait que je me rende à l'hôtel de police, signaler la disparition de mon père. Ensuite, il faut que j'achète de quoi à me faire à manger. Ca ne devrait pas prendre trop longtemps.
-Je t'accompagnes.
-Ca ira..
-J'insiste. En plus, je dois toujours récupérer mes affaires.
-Merci beaucoup Dvan.
Il ne pu s'empêcher de sourire, en l'entendant dire son prénom. C'était toujours si doux dans sa bouche.
-Alors nous sommes d'accord. Allons-y ensemble !
LeConteur.fr | Qui sommes-nous ? | Nous contacter | Statistiques |
Découvrir Romans & nouvelles Fanfictions & oneshot Poèmes |
Foire aux questions Présentation & Mentions légales Conditions Générales d'Utilisation Partenaires |
Nous contacter Espace professionnels Un bug à signaler ? |
2842 histoires publiées 1286 membres inscrits Notre membre le plus récent est Antho.Del |