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tome 1, Chapitre 5 « En passant par le cimetière... » tome 1, Chapitre 5

Le petit groupe finit par arriver dans une vaste portion dégagée de la ville. Si Dvan avait été plus concentré, il se serait posé des questions, mais il était hanté par de durs souvenirs. Peut-être n'avait-il pas envie de remarquer quoi que soit ? Peut-être était-ce plus facile de se laisser porter par les événements ? Puisqu'il n'avait plus de raison de vivre, sa rencontre avec la mort n'en serait que plus rapide.

-Viens voir ! l'interpella l'un des hommes.

De petite taille, il cachait le bas de son visage dans un foulard, sans doute pour se protéger du froid.

Sans grand attrait pour ce qu'il y avait à découvrir, le géant s'avança néanmoins. Une fois arrivé prêt de l'autre, il pu constater qu'il se trouvait sur un promontoire. Raison pour laquelle personne ne construisait dans ce coin. Du regard, il embrassa le paysage. D'ici, on avait une belle vue sur toute la ville, et même plus. Au loin, les montagnes se dessinaient. C'était là d'où il venait… Y retournerait-il un jour ?

-Intéressant, commenta Dvan avant de se retourner, vers ses compagnons.

-Tu sais ce qu'il y a juste en bas ?

Le géant tourna son attention vers l'habitation, en contrebas. A en jugeant par ce qu'il y voyait d'ici, une maison minuscule et un tas de plaques de pierre rectangulaire, il n'eut aucun doute. Avant qu'il ouvrit la bouche, Ervild l'avait devancé.

-Le cimetière ! Et tu vas vite le rejoindre !

A ces mots, les réflexes de Dvan prirent le dessus et il se retourna avec une rapidité surprenante. Il en profita dans le même temps pour s'éloigner du rebord de la falaise, et ses dangers.

Seulement, contrairement à ce qu'il aurait pu croire, son interlocuteur se contenta d'appuyer sur la gâchette du pistolet qu'il avait sortie, profitant de son inattention. Un bruit résonna, encore plus déchirant dans le silence de la nuit.

La balle atteignit le géant à la poitrine, le propulsant en arrière, il s'écroula. L'espace d'un instant, plus personne ne fit le moindre geste. On aurait pu croire que l'on respectait une minute de silence à la mémoire de celui qui venait de se faire lâchement abattre.

-Voilà ce qui arrive lorsqu'on veut jouer au plus malin avec moi !

Tous les regards se tournèrent vers Ervild, qui tenait toujours l'arme à la main.

-On rentre, lâcha-t-il.

Les autres hochèrent la tête.

-Et lui ? On en fait quoi ? risqua l'un des compères.

-Je suis d'humeur magnanime. On l'envoie directement au cimetière. S'ils ont du courage, ils l'enterreront, sinon, ils en feront ce qu'ils voudront…

Il ne pu s'empêcher de s'esclaffer à sa propre blague, et les autres l'accompagnèrent.

Le chef finit par reprendre son sérieux aussitôt imité par ses compagnons. Pourtant, un rire continua de résonner dans la nuit.

-Silence pauvre idiot !

Mais le son ne s'arrêta pas, au contraire.

Ervild laissa errer son regard sur sa troupe, tentant de trouver le responsable de ses moqueries. A mesure qu'il se rendait compte de ce qu'il se passait, son visage se décomposa. Ses hommes n'étaient pas dupes et eux aussi, commençaient à craindre le pire.

Prit d'une intuition soudaine, le dirigeant tourna la tête vers l'endroit où devait se trouver le cadavre. Dvan se tenait bien là. Seulement, il était assis et riait à gorge déployé.

Ervild écarquilla les yeux.

-Comment ? s'étrangla-t-il.

-C'était stupide de croire que de si petites balles pouvaient quelque chose contre moi.

-Impossible.

Serrant les dents, le chef remit son pistolet en joue.

-Par contre, si ça ne peut pas me tuer, ça peut me faire mal.

Dvan se releva les dominants tous.

-Bravo, tu m'as énervé ! grogna-t-il, en serrant les poings.

L'autre fit à nouveau feu, visant la tête, le plus sûr moyen de se débarrasser de quelqu'un, même si la taille réduite rendait l'endroit plus difficile à attendre. Avec une vitesse, surprenante Dvan, esquiva les balles.

-Tu vas finir par blesser quelqu'un avec ton jouet !

Ervild renonça et hurla après ses hommes :

-Occupez-vous de lui !

Derrière lui, les autres hésitèrent.

En général, les gens ne se relevaient pas, après qu'on leur est tiré dessus.

-Dépêchez-vous, bande de bon à rien !

Contrairement à lui, les autres membres de la troupe n'avaient pas d'arme à feu, seulement des couteaux. C'était à lui que revenait le privilège de décider qui passerait de vie à trépas. Se fut pour cette raison que lorsqu'il tourna le pistolet vers eux, ils se décidèrent à passer à l'action. Ils savaient très bien qu'il n'hésiterait pas à tuer. Il l'avait fait plusieurs fois et sans remords. Parce qu'il se montrait impitoyable, ses hommes le craignaient et l'admiraient.

-C'est ça, envoie tes sous-fifres ! Mais c'est entre toi et moi à présent ! Ca tombe bien, j'ai faim !

Dvan fixa son ennemi, il ne plaisantait pas. Maintenant qu'il savait à quel type d'hommes, il avait affaire, il n'hésiterait pas à s'occuper de lui. Après tout, c'était exactement le genre de personne qu'il recherchait : des nuisibles qui vivaient sur le dos d'autrui et qui ne manquerait pas à la société. Un repas qui aiderait tout le monde.

Sortant leurs lames, les autres tentèrent de l'atteindre. Mais il n'avait aucun mal à esquiver leurs attaques. Sa rapidité sur-humaine, lui permettait de danser entre les couteaux. Ce petit jeu l'amusa l'espace d'un instant. C'était grisant de lire la peur et l'incompréhension sur le visage de ceux qui, généralement, prenait plaisir à terroriser les autres pour se sentir plus fort.

Décidant finalement, de se débarrasser d'eux, le géant les repoussa, en distribuant les coups de poings et de pieds bien placé. L'un d'eux s’étala à terre, vaincu ou craignant trop les blessures pour se relever.

Pris par l'action, Dvan ne faisait pas attention où il marchait. Il se contentait de reculer ou avancer lorsqu'il le fallait. Le bord de la falaise derrière lui, était complément sortie de l'esprit. Plus, il frappait plus, le son des coeurs battant à tout rompre et les flots de sang qu'ils propulsaient, lui faisait perdre la tête. Bientôt, il ne penserait plus qu'à mordre, et à se gaver du précieux fluide vital qui coulait dans leur veine.

Prenant conscience de son état d'esprit changeant, le géant se figea. Il était temps pour lui, de revenir à la réalité, sinon il imaginait sans mal le carnage qu'il serait capable de causer. Ces hommes ne seraient sûrement pas les seules victimes et il craignait de se réveiller couvert de sang, entouré d'une montagne de cadavres qui ne lui avait rien demandé.

C'était de sa faute. Il n'aurait pas dû tant attendre avant de se nourrir.

Tu te surestimes, lui souffla une voix dans son esprit. Étrangement, elle ressemblait beaucoup à celle de sa sœur. A toujours vouloir en faire trop, tu ne te concentres pas sur l'essentiel.

Elle avait raison, l'essentiel ici, aurait été de survivre, avant de vouloir jouer les bons samaritains ou les redresseurs de torts.

Évitant une lame, il recula et sentit du vide sous son talon. Aussitôt, il se rééquilibra pour ne pas tomber. Il s'en était fallu de peu. Sa propre bêtise avait encore failli lui jouer des tours. Heureusement, qu'il avait su se reprendre à temps.

Il décida qu'il attraperait le type lorsqu'il s'approcherait et s'en servirait de repas. Ce n'était plus le moment pour les jeux, autant en finir rapidement. Avec un peu de chance, il pourrait récupérer l'autre qui n'aurait pas fuit et n'aurait pas besoin de tuer qui que se soit.

Tu as le coeur trop tendre, Dvan, cela pourrait jouer en ta défaveur, alors laisse-moi veiller sur toi.

Il se souvenait de cette phrase de sa sœur. Seulement, à présent, elle n'était plus là et il devait se débrouiller seul. Mais il n'avait jamais douté de sa force et de sa volonté. Elle savait faire preuve de détermination, lorsqu'il le fallait.

Le géant la revoyait encore, tenant dans sa main, la paire de ciseaux ensanglantée, qu'elle n'avait pas hésité à planter dans le corps qui lui faisait face. Elle n'avait pas hésité à attaquer son ennemie dans le dos. Il ne l'aurait jamais fait. Seulement lui, avait la force nécessaire pour l'affronter, et ne voulait pas vraiment le tuer. Rosa, elle savait qu'elle devait se débarrasser de lui, à jamais, pour pouvoir être rassuré et réussir à dormir la nuit, sans craindre le pire.

Quel dommage qu'elle n'est pas été là, sinon elle lui aurait sûrement crié de faire attention. Elle lui aurait rappelait que les autres étaient souvent près à tout pour parvenir à leurs fins.

Un nouveau coup de feu déchira la nuit. Instinctivement, Dvan changea la constitution de son torse, le durcissant pour qu'il devienne aussi solide que le métal. La balle le heurta sans lui faire le moindre mal, se contentant de déchirer sa chemise.

Se fut à ce moment que le géant prit conscience de son erreur. Le coup, même s'il ne le tua pas, le déstabilisa, le faisant basculer en arrière. Il eut beau battre des bras, il ne parvint pas à raccrocher à quoi que se soit.

Le roi des cons, ne put-il s'empêcher de penser, alors qu'il entreprenait de solidifier son crâne, pour éviter le pire.

La chute fut plus rapide que ce à quoi, il s'attendait. Le plus dur fut l'atterrissage. Dvan sentit une intense douleur lui déchirait le flan alors qu'un objet le traversait de part en part, faisant jaillir du sang, qui vint gorger le tissu de sa chemise. Son dos frappa violemment une stèle en marbre qu'il brisa sur le coup, lui faisant pousser un grognement rauque.

L'espace d'un instant la douleur fut telle qu'il perdit connaissance. Fermant les yeux, et oubliant complètement l'endroit où il pouvait avoir atterri, il se laissa aller. Acceptant avec bonheur de plonger dans les limbes où il n'aurait plus à souffrir.

Il sentit qu'on le posait les doigts sur son cou, mais cela ne fut pas suffisant pour le tirer de l'obscurité dans laquelle s'était retranché son esprit. Dvan aspirait encore au repos et désirait qu'on le laisse tranquille. Le moindre mouvement lui provoquerait une vive douleur, et il ne se sentait pas encore capable de l'affronter.

Cependant, on semblait en avoir décidé autrement puisqu'une main se posa doucement sur son visage, touchant ses cheveux. Le géant réagit instinctivement, et attrapa le poignet de la personne, le tenant fermement, mais veillant néanmoins à ne pas trop serrer ses doigts.

Il cachait toujours la partie abîmée de son visage et sentir que quelqu'un s'en approchait l'avait fait réagir. Il ne supportait pas qu'on le voit ainsi, encore moins qu'on le touche, même si personne n'en avait encore émis l'envie à part sa sœur.

Un cri, féminin à en jugeait par les sons aigus qui lui vrillait les oreilles, termina de le réveiller. Ouvrant les yeux, il ne vit au départ pas grand-chose, des formes floues puis celles-ci se firent plus net et prirent l'apparence d'une jeune fille. De petite taille, avec des lunettes, de longs cheveux noirs tressés encadrant son visage terrifié, elle ne paraissait pas être une menace pour lui.

Le hurlement mourut dans sa gorge, et elle le fixa sans dire un mot. Dvan prit conscience qu'il la tenait toujours et lâcha son poignet. L'espace d'un instant, il crut qu'elle allait partir en courant, mais elle n'en fit rien. Le silence s'installa entre eux.

-Bonsoir, finit par déclarer le plus naturellement du monde Dvan.

Sous son air tranquille, il tentait de masquer sa douleur, et sa faim grandissante. Il savait qu'il devait se nourrir au plus vite pour réussir à régénérer ses blessures. Seulement, le géant luttait pour garder son esprit lucide. Cette pauvre fille ne lui avait rien fait et lui-même, ne lui voulait pas le moindre mal.

-Vous êtes en vie ? murmura-t-elle, sonnée.

-Oui. Ca à l'air d'être le cas.

Dvan tenta de se redresser et serra les dents sous l'effet de la douleur. Tournant la tête, vers sa hanche droite, il s’aperçut que le morceau de métal qui lui traversait le corps était toujours là. En plus, comble de malchance, il s'agissait du sommet d'une croix, ce qui expliquait sans doute son envie tenace de dormir malgré la douleur qui le tenaillait.

-On ne se connaît pas, mais s'il te plaît, est-ce que tu veux bien m'aider à retirer ce truc de mon corps ?

L'espace d'un instant, elle le fixa comme si elle avait affaire à un fou, avant de hocher la tête.


Texte publié par Nascana, 6 avril 2019 à 00h19
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