Kamu fouilla dans sa valise et en tira une robe qu'elle mit devant elle. Grise à carreau avec une large ceinture en velours noir, elle mettait parfaitement sa taille fine en valeur. Le décolleté assez plongeant était partiellement caché par de la dentelle, que l'on retrouvait aussi sur les manches. Sans attendre, elle la passa, avant de disparaître dans la salle de bain.
Avec satisfaction, elle contempla son reflet. Le vêtement épousait ses formes. Elle lissa la dentelle au niveau de sa poitrine et ne put s'empêcher de sourire.
Tu vas porter ça ?
On ne peux rien te cacher.
Tu es sûr de vouloir le faire ?
Bien sûr.
C'est court…
C'est court. C'est décolleté. C'est moulant. C'est Sexy. C'est moi !
Tu es sûr que c'est une bonne idée de porter ça, ici ?
Loth s'inquiétait toujours de tout. Un vrai ange gardien ! Le sien. Seulement, elle ne voulait plus se cacher. Avec cette apparence, elle osait tout porter. Qu'importe qu'on la regarde. Au moins, cela voulait dire qu'elle était en vie.
Retire tes bas pour un collant au moins. Debout ça passe, mais dès que tu seras assise, tout le monde va le voir.
Il n'avait pas tord. Elle y consentit.
Tu préfères lequel ?
Kamu tira de la valise, différents types d'imprimer, les contemplant avec soin. Elle finit par s'arrêter sur un avec des roses qui remontaient à l'arrière de la jambe.
Celui-ci qu'est-ce que tu en penses ?
C'est pas celui que tu portais lorsqu'une vieille dame t'a fait un compliment ?
La mage ne pu s'empêcher de sourire.
C'est celui-là même.
Alors on ne peut rien lui reprocher.
Kamu se sentait bien. Elle adorait ces conversations qu'elle partageait avec Loth. A chaque fois, elle se sentait appréciée et comprise. Seulement, elle savait que cette personne aimée ne pouvait rester trop longtemps avec elle.
Une fois habillée, elle s'installa sur le lit avec la boite de l'un des bracelets dans la main. Sans hésiter, elle retira la protection et en sortit le bijou, qu'elle fixa d'un air pensif.
Loth ?
Toujours présent.
J'ai besoin de toi.
Et je suis là.
Tu vas devoir enchanter ce bracelet.
Quoi ?! Kam, j'y arriverais jamais ! La magie, c'est ton truc à toi.
Elle cligna des yeux.
Je ne peux pas le faire moi-même. Ma signature magique est enregistrée.
Je vois. La mienne non, puisqu'on nie mon existence…
Elle l'entendit soupirer.
Tu as tout compris.
Mais Kam, je ne sais pas comment faire…
Je serais là, à chaque étape et je te guiderais. Mes mains seront derrière les tiennes et tu n'auras qu'à répéter mes mots.
Elle le sentait hésitant. C'était normal, il n'avait jamais fait ça.
Courage Loth !
Kamu l'entoura de son esprit pour le câliner. Il fit de même, et ils restèrent ainsi un moment sans parler. Juste être là, l'un pour l'autre, c'était déjà beaucoup.
C'est bon. Je vais le faire. Pour toi, et pour lui...
Merci Loth. Je savais que je pouvais compter sur toi.
En se concentrant, Kamu mit son esprit en retrait. Le changement était toujours difficile. Seulement, elle n'avait pas le choix. Laissant pendre ses bras, elle sentit brusquement que Loth en avait pris possession. Cela lui faisait toujours bizarre. C'était comme si en une seconde, elle perdait tout contrôle d'elle-même.
De même, elle ne pouvait plus parler.
-Kam…
Sa voix était différente, plus rauque.
Loth sursauta presque, comme s'il ne s'attendait pas ce qu'il puisse faire ses gestes alors qu'elle était éveillée.
Attention, ne change pas mon apparence. Surtout, quand je suis habillée.
Aussitôt, il s'interrompit. Sans en avoir conscience, il était en train de reprendre la sienne.
Excuse-moi.
Prends le bracelet.
D'un geste malhabile, il se saisit du bijou et le fit tomber sur ses genoux.
Ca ira. Maintenant, suis mes gestes.
Loth fit ce qu'elle lui disait, s'y appliquant du mieux possible. Avec Kamu derrière, il ne pouvait pas louper l'enchantement. Elle avait ses mains derrière les siennes et le guidait comme une marionnette, soufflant à son oreille, les paroles qu'il devait dire. On aurait même pu croire que c'était elle qui actionner cette bouche pour lui faire dire ce qu'elle voulait.
Finalement l'objet prit un éclat brillant, avant de disparaître.
C'est tout ?
Derrière lui, elle hocha la tête.
C'est terminé.
Tant mieux, je fatigue, et toi aussi.
Elle savait que cette phrase ne faisait que refléter la réalité, seulement cela lui serrait toujours autant le coeur.
A nouveau, ils échangèrent leurs places et elle repris le contrôle entier de son corps. Elle était à nouveau Kamu.
Loth ?
Seul le silence lui répondit. Elle était à nouveau seule, et la mage détestait cela. Un frisson la parcouru, sans qu'elle puisse dire si c'était parce qu'elle avait utilisé trop de magie ou si cela venait de sa peur de l'abandon.
Prenant une grande inspiration, Kamu prit le temps de réunir ses pouvoirs. En passant la main au-dessus du bijou et en glissant au passage une formule, elle obtint une vive brillance sur l'objet. Il était bien enchanté à présent.
Avec ceci, Ben n'aurait plus de problèmes. C'était déjà une bonne chose de faite.
Elle rangea avec soin le bracelet dans sa boite, prenant bien soin de remettre en place, les protections de plastique. Maintenant, il fallait que cela arriver jusque Ben.
Ouvrant l'un des tiroirs du bureau de Nils, elle fouilla à la recherche de quelque chose qui pourrait l'aider dans sa tâche. Finalement, elle mit la main sur des petites étiquettes que l'on collait sur les cahiers pour y inscrire son nom et prénom. C'était exactement ce dont elle avait besoin. Elle en détacha deux qu'elle colla sur chacun des paquets avant d'y ajouter le destinataire de sa plus belle écriture. Le noir irait à Maxime et le marron à Ben.
Il lui faudrait prendre quelques instants pour s'occuper de lui expliquer l'enchantement et les avantages que cela lui apporterait. Enfin, il devait déjà les imaginer. Cela lui permettrait de rester dans le pays, pour le moment. Mais c'était le mieux qu'elle pouvait faire.
Au moins, une bonne chose de faite. A présent, il lui en restait une autre, mais cela ne l'enchantait guère. Seulement, elle manquait de choix, et elle avait besoin des informations sur le pendentif.
Saisissant son portable, elle le déverrouilla, avant de chercher le nom de la personne qui l'intéressait tant, dans son répertoire. Il ne lui restait plus qu'à l'appeler. Les sonneries résonnèrent et elle sentait la tension monter en elle, sans savoir pourquoi.
Finalement, une voix lui répondit :
-Allo ?
-Giles ?
-Kam…
Elle l'interrompit.
-J'ai besoin de toi. Dis-moi tout ce qu'il y a savoir sur le pendentif, et sur la mère de Nils !
Évidemment, l'autre ne l'entendait pas de cette oreille.
-Le dossier est classé, désolé.
-Tu n'as qu'à le lire puisque tu y as accès et me faire un résumé !
-Tu sais très bien que c'est impossible. En plus, je ne l'ai pas sous la main.
-Tu ne t'en souviens pas ?
Un silence lui répondit.
-Et toi, est-ce que ça va ?
Elle se retint de soupirer, elle ne lui avait pas téléphoné pour parler de la pluie et du beau-temps.
-Bien sûr, pourquoi ça ne serait pas le cas ?
-Vous êtes sur place ? Quelle excuse avez-vous donné à ta présence ?
-Giles, j'ai pas trop le temps-là. J'ai vraiment besoin…
-Tu as une voix féminine, j'espère que tu as l'apparence qui va avec et que tu n'essayes pas juste de me piéger.
Elle soupira.
-Non, je suis bien une femme. Pourquoi tu veux une photo ?
-Pourquoi pas... Que je me fasse une idée de quoi tu ressembles…
Il l'avait vraiment fait, il l'avait vraiment dit.
L'espace d'un instant, elle fut tentée de jeter l'appareil par terre, pour ne plus l'entendre. Cela n'arrangerait rien et en plus, son portable risquait de prendre un mauvais coup.
-Sinon…
Mais il l'interrompit. Y avait pas moyen d'en placer une avec lui.
-Alors, c'est quoi votre excuse pour expliquer la raison de ta présence ?
Il ne la lâcherait pas avant de savoir.
-Nils m'a présenté comme sa petite-amie.
Voilà, c'était dit et tant pis, si cela ne lui plaisait pas.
-Vraiment ?
Une voix résonna derrière Giles :
-Papa, viens manger, la glace va fondre !
-Mets-la au congèle ! Je suis au téléphone Joël. Tu n'as qu'à manger la tienne sans m'attendre !
Son supérieur se reprit.
-Désolé. C'était mon fils. Ca a marché ?
-Pourquoi cela n'aurait pas été le cas ?
-Mais du coup, où vas-tu dormir ce soir ?
Évidemment, c'était tout ce qui l'intéressait.
-Dans le même lit, sûrement…
Mieux valait faire semblant de rien. Si elle ne savait pas, on ne pouvait pas lui reprocher.
Giles grinça des dents à cette idée.
-Vraiment ? Fais bien attention à toi ! Si jamais il a le moindre geste déplacé, parle m'en !
Cette phrase la fit sourire.
-Arrête, Giles, tu crois quoi ? Qu'il attendait une mission spéciale pour me sauter dessus ?
Tu te trompes, ça, c'était moi.
Pas de réponse.
-En plus, tu me crois vraiment aussi inapte à me défendre ?
-Bien sûr que non. Seulement, avec le stress…
-Ca ira, je te dis.
-Tu es encore une enfant, je ne veux pas qu'il interprète mal.
-Je suis majeur, te rappelle ! Je n'ai plus quatre ans et je sais comment me comporter.
-Tu es une si jolie jeune fille, il pourrait se laisser tenter…
-Giles ! On est tous les deux adultes !
-Kam, tu te crois adulte, mais tu es plus vulnérable que tu ne le penses. Alors prends bien le temps de réfléchir.
Le temps de réfléchir, elle l'avait pris. Elle en avait eut tellement de temps, lorsqu'elle était seule dans ce petit appartement. Les soirs, où elle ne parvenait pas dormir tant tout était silencieux.
-Je suis plus la fille qui pleurait à l'hôpital !
C'était vrai. Cela avait été dur, mais elle avait avancé. Elle avait tant pris sur elle, pour y parvenir. Personne ne s'en rendait compte, à part Loth.
-Je le sais. C'est pour ça, que tu as eu le droit d'occuper ce poste.
-Est-ce que je t'ai déçu une seule fois, au travail ?
-Non, bien sûr que non. Mais je dois prendre soin de toi. Alors fait juste attention avec Nils.
-Si tu le détestes autant pourquoi tu as voulu que je travaille avec lui ?
-C'est ridicule. Je ne le déteste pas, enfin. Il est trop impulsif. Je connais ton côté calme et réfléchi. Après, comme Sammy ne voulait plus travailler avec lui, il m'a fallu refaire de nouvelles équipes. En plus, il est assez puissant. Je sais qu'il te protégera.
Au moins, il ne pensait pas que des mauvaises choses de Nils. C'était un bon début.
-Par contre, évite de faire des choses naïves devant lui !
-Naïve ?
-Kam, tu m'as déjà ouvert la porte en chemise de nuit.
Elle haussa les épaules. Avant de se souvenir qu'il ne pouvait pas la voir.
-Je savais que c'était toi et que ça t'étais égal.
-Et pas quel prodige ?
-Enchantement de porte. Rapide, simple, requiers peu de magie. Je le fais sur chaque porte que je franchis de manière inconsciente à présent. Comme ça, je sais toujours quand une porte va s'ouvrir et qui est derrière, enfin, si je connais la personne.
-Oui bon… Toujours est-il que je préférais que tu sois plus prudente avec lui. Tu es une jolie jeune femme, et tu ne laisses pas les hommes indifférents.
Elle en était bien consciente.
-Tu ne sais même pas quelle tête j'ai, aujourd'hui.
-Juste ne le laisse pas te faire quoi que se soit dont tu n'es pas envie.
-Donc si j'en ai envie, c'est bon ? Je peux lui sauter dessus ?
Il soupira.
-Ne dis pas de sottise. Écoute mes conseils et ne fais pas n'importe quoi ! Tu es encore innocente sur certains points. N'envoie pas de message qu'il pourrait mal interpréter.
Elle ne dit rien pour le détromper sur ce point. Mieux valait qu'il ne sache pas la nature de ses précédentes relations. En plus, ça ne le regardait pas.
-Nils n'est pas stupide, tu sais.
-Je l'espère bien. Mais au moindre souci, parle m'en.
Il y eut un bruit derrière Giles.
-Je monte, papa.
-Oui, oui.
-Bonne nuit.
-Oui.
Il attendit un instant, avant de reprendre, et Kamu se demanda quelle heure, il pouvait être si eux, en était déjà à ce coucher. Ca ne devait pas être très festif, chez son tuteur.
-Fait bien attention à toi.
-Oui, le rassura-t-elle.
-Mets un pyjama couvrant et mieux, passe une robe de chambre dessus.
Et pourquoi pas une combinaison de ski tant qu'on y était ?
Elle fixa son image dans le miroir, et son décolleté plongeant. S'il la voyait comme ça, il lui ordonnerait sûrement d'aller se rhabiller. Dommage, il n'était pas là.
Kamu se reprit. Il fallait qu'elle recentre le débat avant que ça s'enlise.
-Bon, ce que je voulais savoir, c'était à propos du pendentif, qu'est-ce que disait la mère de Nils ?
-Pas grand-chose.
-Pourquoi elle l'a confié à François ?
-C'est qui François ?
Elle secoua la tête.
-Le père de Nils.
-Je…
Il y eut un blanc.
-En quoi ça va t'aider, ma grande ?
Mais qu'est-ce qu'ils avaient tous à ne pas vouloir répondre à ces questions.
-Écoute, y a un vrai problème avec toute cette affaire ! Y a pas moyen de mettre la main sur le pendentif ! J'ai besoin de plus d'info pour y voir clair !
-Tu as fait une recherche d'objet enchanté ?
Elle leva les yeux au ciel.
-Je ne suis pas stupide, c'est la première chose que j'ai faite après avoir lancé une cartographie.
-Une cartographie ?
-Un plan par résonance magique des environs.
A nouveau, un blanc au téléphone.
-Depuis quand…
-Je continu à voir le Monsieur Nonfil, mentit-elle.
En vérité, elle l'avait appris seule, seulement, c'était un sort de niveau élevé. On se poserait des questions sur elle, si jamais on venait à se rendre compte de son vrai niveau en magie.
-Ha bon ? Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ?
-C'est pas comme si c'était très important. En plus, on avait autre chose à ce dire.
-Oui, mais tu vois, c'est le genre de choses pour lequel j'aimerais être au courant. Je veux savoir où tu vas, et qui tu fréquentes.
Sa main se crispa sur le téléphone.
-Très bien, je te ferais une liste.
Elle maîtrisa le tremblement de sa voix. C'était facile de la laisser seule dans un appartement depuis ses quinze ans et ensuite de réclamer des comptes.
-Ne le prends pas mal. Mais tu sais qu'ils pourraient revenir sur leur décision…
-Ils ne le feront pas, souffla-t-elle.
-On n'en sait rien.
Moi, je sais qu'ils ne le feront pas. Ils ont bien compris qu'à tout moment, je peux prendre la tangente, et ils ne me retrouveront pas. Je ne suis pas change-forme pour rien. Tant qu'ils me laissent un minimum d'autonomie, je resterais tranquille.
-Tu te souviens que tu as bientôt ton évaluation psychologique ?
-Je ne me souviens de rien d'autre. Si c'était le cas, je te l'aurais dit !
-Je sais Kam, mais je ne décide pas. Tu dois leur montrer que tu évolues positivement. Stabiliser ton apparence, serait une bonne preuve.
Évidement pour eux, c'était simple. Aucun d'eux n'était change-forme. Il était incapable de la comprendre. Qui était-il pour juger qu'elle devait être la même personne chaque jour parce que c'était plus facile pour eux ?
-Je vais essayer…murmura-t-elle entre ses dents.
Elle préférait encore lorsqu'ils parlaient de Nils, au moins, c'était plus drôle.
-Bon, reprenons la recherche d'objet magique n'a rien donné. A mon avis cela à une raison simple : les sceaux apposés par Julianne Maniane. Dans le cas où l'on appose un enchantement et des sceaux, l'enchantement est toujours en dessous, pour éviter les risques d'interactions entre les deux magies. Est-ce qu'il est question de sceaux ?
-En effet, mais je n'avais jamais pensé…
-Tu n'es pas environnementaliste. C'est mon travail de penser à ce genre de choses. Du coup, je ne pourrais pas le trouver avec un simple sort. Heureusement, il reste la cartographie.
-Qu'est-ce qu'elle dit ?
-Je n'en sais rien, je n'ai pas encore les résultats. C'est un sort long. J'aurais les résultats demain matin.
-Tu crois que ça ira pour retrouver le pendentif ? Si ce n'est pas le cas, appelle-moi et restez un jour de plus.
Elle n'aurait pas dit non, mais s'imaginait déjà la tête de Nils en apprenant ça.
-Oui, enfin, on ne va passer la semaine là, non plus.
-Certes.
Il y eut un blanc au téléphone, et Kamu en profita pour conclure, avant qu'il ne reparte sur ses mises en garde.
-Je t'appelle demain pour te faire part de mes avancées.
-Très bien. Si tu as le moindre souci n'hésite pas.
-Joyeux Noël, Giles.
-Joyeux Noël, à toi aussi.
Elle raccrocha, et se laissa tomber sur le lit. Rien de neuf à l'horizon… Ce qu'elle avait appris ne l'aiderait pas. La mage allait devoir se débrouiller seule. Au moins, elle avait eu confirmation de l’existence de sceaux sur le pendentif. Ce qui n'était pas pour lui plaire.
A cause de ça, elle ne pourrait pas utiliser sa magie… Les interactions pouvaient être dangereusement et plus, le mage était fort, plus elles étaient puissantes.
Enfin, elle aviserait en temps voulu.
Kamu se saisit d'un gilet, et glissa son portable à l'intérieur, avant de le passer. Il arrivait plus bas que sa robe. Au moins, on ne pourrait pas dire qu'elle voulait montrer ses fesses à tout le monde.
Après un dernier regard dans le miroir, elle sourit. Elle se sentait tellement bien dans cette tenue. Peu lui importer d'attirer tous les regards. Cela n'avait pas d'importance, car elle était enfin elle-même.
Nul doute que Nils n'apprécierait pas, mais tant pis. Il n'aurait d'autre choix que de l'accepter.
Sans un bruit, elle traversa le couloir et descendit l'escalier. Une fois arrivée devant la porte de la salle à manger, Kamu n'hésita pas et l'ouvrit.
Nils juste en face d'elle, fut la première personne à la voir. Surpris, il resta figé dans son geste. Elle lui sourit. L'autre baissa les yeux et la fourchette qu'il tenait à la main par la même occasion. Sa tenue n'avait pas l'air de le mettre en joie. Tant pis pour lui, il devrait faire avec.
Sans attendre la mage fit le tour de la table, et s'installa près de lui. Après un large sourire, elle posa la main sur sa cuisse. C'était tellement marrant de le mettre mal à l'aise, et tellement simple aussi.
Le monde reprit son cours. Elle sentait des regards hostiles sur elle, mais cela n'avait pas d'importance. Ses tenues sensuelles agissaient comme de vraies armures. Kamu se sentait plus forte que jamais.
Suffisamment pour prendre la main de Nils dans la sienne, et l'amenait jusqu'à ses lèvres pour l'embrasser tendrement. L'autre paru décontenancé par son geste et retira ses doigts, mais moins vite qu'elle ne l'aurait cru.
***
Nils se concentra sur son assiette, pour ne pas tourner le regard vers Kamu. Ce n'était vraiment pas le moment de rougir ou bafouiller, surtout devant tout le monde. Qu'est-ce qui était passé par la tête de son partenaire pour s'habiller ainsi ?
Il releva les yeux et croisa le regard de son frère posé sur Kamu. C'est pas vrai. Il commençait vraiment à l'énerver celui-là aussi. Il n'avait qu'une envie lui jeter le morceau de citron qu'il avait à la main, voir si ça lui retirait son air béat du visage. Avec un peu de chance, il se prendrait du jus dans l'oeil. Ca ne ferait pas bon ménage avec ses lentilles.
Nils se reprit, ça ne servait à rien de penser des bêtises pareils. Ca n'allait pas l'aider. D'ailleurs, ça n'aiderait personne.
Il se tourna vers Kamu et lui remit le demi-citron. A ce moment-là, il était bien obligé de la regarder. Enfin plutôt de le regarder. Il en venait même à se tromper lui-même.
-Merci mon amour, souffla-t-il.
Il en faisait trop beaucoup trop, et le pire, c'était que personne ne s'en rendait compte. Comment les gens pouvaient croire qu'ils étaient ensemble ? Sa famille en plus ! Il n'avait jamais été intéressé par les filles habillées trop sexy. Il avait toujours l'impression qu'elles avaient quelque chose à cacher.
C'était tout le contraire chez son frère qui ne pouvait s'empêcher de dévorer du regard, Kamu. Au début, il avait cru qu'il faisait ça, juste pour le faire chier, mais vu qu'il continuait encore et encore, il devait y avoir autre chose. A croire que ce con avait eu le coup de foudre pour son compagnon. Dommage qu'il ne puisse pas lui dire que c'était un mec, sa tête à ce moment-là, ça vaudrait son pesant sûrement.
-Et toi, tu as fait quoi comme étude, Eva ?
Nils se tourna vers son cousin. Mais pourquoi fallait-il qu'il pose ce genre de question ? Évidemment, c'était logique vu qu'il était en train de parler de l'université depuis tout à l'heure.
Avant que le brun puisse répondre, Kamu l'avait devancé.
-Moi, je n'ai pas fait d'étude. Je suis bien trop bête pour ça.
Ca y est, il l'avait dit. Pourquoi fallait-il qu'il se dénigre ainsi ? Évidemment, il ne pouvait pas ajouter la suite de la phrase, qui était que seule la magie l'intéressait, et que c'était le domaine où il excellait.
Maxime parut surpris l'espace d'un instant, mais se reprit.
-Pourquoi tu dis ça ?
-J'ai loupé mon BAC parce que ça ne m'intéressait pas, expliqua Kamu.
-Ca m'aurait étonné, marmonna Estella.
Sans savoir pourquoi Nils fut pris d'une profonde envie de lui mettre plein la figure.
-Et ton diplôme dans le domaine du tourisme, tu l'as eu, toi ?
L'autre écarquilla les yeux. Elle avait oublié qu'il vivait avec Lucas à ce moment-là et qu'il était au courant de ce qu'elle faisait à l'époque. De toute façon, il ne l'avait jamais aimé. Il la trouvait fausse, et ne lui faisait pas confiance. Mais après, c'était le choix de son frère. Tant qu'il ne vivait pas avec, cela n'avait pas d'importance pour lui. Sauf si l'on s'en prenait à Kamu. C'était la chose à ne pas faire.
-Je…
Elle hésita à répondre et lança un coup d'oeil à Lucas, comme si elle réclamait son aide. Cependant, celui-ci ne dit rien, attendant comme eux tous la suite. Nils pu même constater qu'il avait un petit sourire satisfait comme si cela lui faisait plaisir de voir sa femme en difficulté. A croire que plus rien n'allait entre eux.
-J'ai arrêté parce que cela ne me plaisait plus… déclara-t-elle, en espérant que cela passerait.
-Mais tu l'as eu ou non ? reprit Nils.
L'espace d'un instant, elle fit la grimace en voyant qu'il ne lâcherait pas l'affaire.
-Non, mais je suis tombée enceinte alors je n'ai pas continué.
Bien sûr, c'était l'excuse à tout. Depuis, elle faisait le parasite, en vivant au crochet de son frère. Mais après tout, tant qu'il ne disait rien, c'était bien pour elle. Évidemment, lorsqu'il se réveillerait, la chute serait dure.
-Tu as fait quoi comme BAC, Eva ?
C'était pas vrai, il recommençait. Nils regretta de ne plus avoir le morceau de citron, sinon il l'aurait jeté sur Maxime pour qu'il se taise enfin.
-Je crois que tu la mets mal à l'aise, murmura Ben, à l'attention de son ami.
-Mais non, sinon elle me l'aurait dit. N'est-ce pas Eva ?
Kamu sourit.
-J'ai fais un BAC littéraire option art plastique. Mais cela ne me passionnait pas. En plus, je n'allais pas au lycée, je prenais des cours par correspondance alors cela n'avait rien de drôle. Dès que j'ai pu, j'ai demandé à travailler. Giles m'a trouvé mon poste actuel.
-Et ça te plaît ?
-Bien sûr. En plus, ça m'a permis de rencontrer Nils.
En disant cela, il vint se coller contre le brun qui soupira. Il fallait absolument calmer le flot de questions de Maxime avant que celui-ci ne grille leur couverture. Même si Kamu faisait attention, viendrait bien un moment, où il avouerait faire de la magie et courir après les suspects.
Le brun connaissait la méthode pour court-circuiter son cousin, lui poser à son tour des questions.
-Ben et toi, vous êtes dans la même filière ?
-Oui et dans le même groupe de TD ! C'est plus simple comme ça, on a les mêmes cours. En plus, on choisit les mêmes options. On fait tout ensemble.
-Vous n'êtes pas obligés de faire les mêmes poursuites d'études, déclara François.
-Non, mais on aime les mêmes trucs, expliqua Maxime. On s'est rencontré parce qu'on était dans le même groupe et depuis, on ne s'est plus quitté. On fait tout ensemble. Après, pour la suite, on verra. Tant qu'on est pas trop loin l'un de l'autre moi, ça me va. Faut pas oublier qu'on vit ensemble.
Ben se tenait les yeux baissés sur son assiette, les joues légèrement rosies.
-D'ailleurs vous vivez où ? Dans le camping-car, j'ai bien compris, mais vous le garer où ?
Pour une fois que Lucas venait à la rescousse. Ca devait juste signifier qu'il avait envie d'en savoir plus. Le reste devait lui passer au-dessus de la tête.
-Dans un petit camping, c'est pas cher en hors saison. Sinon, je le gare devant chez mamie. Elle veut bien.
Brusquement, Maxime se retourna vers son cousin.
-Mais au fait, tu as fait quoi comme étude, toi ?
Il ne lâcherait pas l'affaire. Seulement, Nils ne pouvait pas lui dire qu'il avait fait une école de magie qui formait les futurs policiers, juges et avocats. Surtout après avoir dit qu'il travaillait dans les archives d'une grande boite sans préciser laquelle.
-Eco, cracha-t-il, en espérant qu'on ne lui en demanderait pas plus.
-Non, mais après ?
Nils hésita.
-Une école administrative…
Il resta évasif, en espérant que ça passerait.
-C'est laquelle ?
-Moi, je me demande surtout pourquoi tu n'as pas continué en éco, déclara soudain Lucas.
Mentalement, Nils le remercia et s'excusa d'avoir voulu lui lancer un citron à la figure.
-Les maths…
-Tu comprenais bien quand je t'expliquais pourtant.
-Enfin, aux partiels, je n'allais pas dire « attendez, j'appelle mon grand frère pour qu'il vienne m'expliquer ».
Le visage de son frère se figea. Qu'est-ce qu'il avait encore, celui-là ?
-Tu as dis « mon grand frère »…
-C'est pas ce que tu es ?!
-Bah si. Mais tu ne me l'avais jamais dit.
Il espérait qu'il n'allait pas se mettre à pleurer pour si peu. C'était pas possible d'être aussi niais.
-J'ai jamais compris comment tu supportais de me réexpliquer les mêmes choses semaines après semaines, sans avoir envie de me gifler.
Lucas haussa les épaules.
-En quoi ça t'aurait aidé ?
-Je ne sais pas. Mais moi, je ne n'aurais pas supporter de me donner des cours.
C'était vrai. Il savait combien il n'était pas attentif alors que Lucas prenait sur son temps à chaque fois, pour lui. Peut-être le faisait-il exprès pour voir combien de temps son frère réussirait à rester calme. Au final, il n'avait jamais réussi à le décontenancer. A peine avait-il eut le droit à un « Nils, concentre-toi, s'il te plaît ».
-Oui, mais…
Et ça y est, Maxime s'y remettait. Vite, le brun chercha la première chose à dire.
-Au moins, tes filles ont de la chance, elles auront un super papa, pour leur expliquer les maths.
Il le pensait sincèrement. Connaissant Lucas, les gamines étaient entre de bonnes mains.
-Tu le penses vraiment ? demanda l'autre d'une petit voix.
-Pourquoi je le dirais sinon !
Ca, c'était bien son aîné. Tu lui disais un truc positif, et il croyait que tu te moquais de lui.
-Elle était bien ton école, Nils ?
Mais ce n'était pas possible ?! Il ne le laisserait jamais.
-Oui, c'était bien.
Voyant le problème, Kamu pris l'affaire en main.
-Le plus important dans cette école, c'est que ça t'a permis de faire ce travail, et à moi, ça m'a permis de rencontre mon petit chéri d'amour.
Tout en disant cela, elle se colla à son bras. Nils fut pris d'une grande envie de se cacher le visage avec la main. Pourquoi fallait-il toujours qu'il donne des surnoms plus débiles les uns que les autres ?
-C'est trop mignon, souffla Maxime.
Au moins, il se pensait à autres choses.
-Et que faites-vous dans votre entreprise ? demanda soudain Estella. Le café et les photocopies ?
Pourquoi fallait-elle qu'elle se réveille maintenant celle-là ?
Nils avisa la table et voyant que tout le monde avait terminé son assiette, il se leva.
-Et si on attaquait le poulet ?
Kamu commença à entasser les assiettes les unes sur les autres, et le brun les emporta dans la cuisine, suivit par son père.
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