-Un claquement de talon lent se faisait entendre sur les pierres pâles qui constituaient le sol de cette église. Le bruit se répercutait en écho sur les murs froids, usés par le temps qui s'écoulait sans barrière. Ci ou la, quelques âmes en peine étaient agenouillées, chacune face à leur banc respectif. Les mains jointes, doigts repliés, paupières closes. Elles priaient le Tout Puissant de bien vouloir leur venir en aide, de pardonner leurs si nombreux péchés pourtant ô combien grisants. Seul ce bruit frappant venait rompre le silence, comme une profanation dans ce lieu si saint. Dans le petit habitacle du fond, fait de bois simple et constitué de deux cabines, le Père James attendait. Une bible religieusement posée sur ses cuisses recouvertes de la robe noire, il caressait sa couverture comme une mère caresserait les cheveux de son enfant. Son précieux trésor. Combien de fois l'avait-il lu ? Combien de fois l'avait-il clamé dans son Église ? Ces textes si riches de sens, si criant de vérité. Il n'imaginait pas un monde sans la Parole de « Nôtre Père à Tous. ».

Les bruits de pas qui troublaient la quiétude, se turent devant le petit habitacle. Un froissement de rideau se fit alors entendre, et le craquement du petit siège ou les pêcheurs se posent se distingue. Inspirant profondément, le Père lève la tête vers le plafond sombre et ferme un instant les yeux. Le signe de croix effectuée sur sa personne, et suivit par ce pêcheur venu avouer ses vices, seul le souffle du prêtre est à présent audible. L'Eglise retrouve sa quiétude si douce durant de longues secondes, si bien que le Père James en vient à hausser un sourcil. Son regard noisette se tourne vers la grille qui le sépare de son agneau égaré. Il a le visage bas, une cascade de cheveux argentés encadre ses traits pâles. Le pêcheur est une pécheresse, silencieuse comme une tombe. Aurait-elle peur du jugement du Père ? Ou de celui de leur Bienfaiteur à tous ? Le Saint homme ne put empêcher à un sourire compatissant de naître sur ses fines lèvres. Tout un chacun appréhende, rien de plus normal. Alors, brisant ce silence harmonieux, il encourage la jeune femme à se confesser. « Ne craignez rien mon enfant, » lui dit-il. « Le Seigneur entendra vos pêchés et vous pardonnera vos offenses, si vôtre cœur est sincère. » ajouta-t-il. C'est alors qu'un sourire vint fendre le visage de la pécheresse. Un sourire qui donna au Père James, un frisson de terreur qui lui glaça la peau.

Son visage se redresse avec lenteur, et dévoile sa splendeur dévastatrice. Et le Saint Homme tremble de tout son corps, sa main droite se crispant soudainement sur son trésor salvateur, tandis que l'autre vient emprisonner fermement entre ses doigts la sainte croix qu'il porte autour du cou. Son cœur n'est plus qu'un tambour effréné, alors que sa bouche balbutie à toute vitesse chaque prière que son esprit recèle. Et dans une dernière vision mélangeant cauchemar et rêve, il inscrit dans ses pupilles mortes le regard aux couleurs insensés de l'Interdit, qui le fixe une dernière fois de manière amusée. La Bible tombe dans un bruit mou. Et le silence reprend sa place.-