Nouvelle écrite dans le cadre de l'appel à texte bienVenu sur Mars qui a été refusée. L'exercice d'écrire 2000 mots par page a été très difficile pour moi. Merci à Spacym, Rose P. Katel, Aislune et Nascana pour leur BL
Elle inspira. La sueur perlait sur son front et glissait le long de ses tempes. Claire se frotta les yeux et réajusta son chapeau de toile. Cette chaleur allait la tuer. Etudiante en archéologie, elle avait accepté ce stage à la dernière minute.
Les lignes de Nazca avaient, disait-on, déjà livré leurs secrets. Pourtant, un groupe de scientifiques de la N.A.S.A en avait décidé autrement. Les spécialistes du SETI reprenaient un projet d’écoute dans l’espace vieux d’une quarantaine d’année, persuadés que l’élément manquant était le lieu d’émission et de réception.
Claire avait été recrutée pour s’assurer que les astrophysiciens ne mettraient pas à mal le site. Dans un premier temps, elle avait été ravie. Puis, elle avait déchanté. Les scientifiques ne côtoyaient pas l’archéologue. Seul Timothy, un ingénieur, semblait s’être rendu compte de sa présence.
Il lui avait sauvé la vie en réparant son MP3. Il s’était même permis d’ajouter les premiers sons enregistrés par la NASA dans le vide intersidéral. Claire affectionnait particulièrement le jeune homme. Pourtant, elle ne répondait pas à ses avances, espérant toujours rencontrer quelqu’un d’autre.
La chaleur minait la jeune femme. Elle savait qu’elle se trouvait en plein désert et comprenait le phénomène de variations des températures, mais là où son cerveau raisonnait, son corps souffrait. Les mirages et autres phénomènes visuels étaient ce qui la troublait le plus. Parfois, elle doutait d’elle-même et devait s’assurer qu’elle distinguât la réalité et de ses hallucinations.
Aujourd’hui, elle était d’astreinte au Condor. Son camp se situait au centre de l’oeil dessiné dans le sol. Elle retourna dans sa tente et alluma les instruments de mesure du SETI. Malgré le fait que son MP3 interfèrât avec le reste du matériel, elle l'enclencha. Dès qu’elle entendit les premières notes, elle arracha ses écouteurs. Timothy allait entendre parler d’elle !
Il inspira. Le froid saisit ses flancs et le força à passer une veste. Il se frictionna les bras et ferma sa parka. Cet air glacial allait le tuer. Étudiant de troisième cycle en archéologie, Matheus espérait décrypter les géoglyphes de Noctis Labyrinthus. En effet, certains anciens affirmaient que le lieu était à l’origine du premier vol habité entre la Terre et Mars.
Il baissa sa visière et activa la propulsion de ses bottes. D’un bond, il avala la largeur de l’immense ravin. Une fois sur l’autre rive, il emprunta le téléporteur collectif afin de se rendre au fond du précipice. Son site préféré était le Condor. Emblème d’une espèce disparue depuis des millénaires, il lui rappelait l’époque où l’Homme avait habité la planète bleue.
Aujourd’hui seules les serres enterrées et éclairées de lumières artificielles en possédaient encore des vestiges. Les animaux y faisaient la part belle aux végétaux. Les premiers, bien que protégés, résistaient avec difficulté aux conditions ; les seconds s’épanouissaient trois cents mètres sous la surface.
Matheus appartenait à la centième génération d’Humains vivant sur Mars. Son physique élancé et sa peau grisâtre trahissaient l’influence des conditions de vie sur son ADN. Un éclair jaillit devant lui, signe qu’il était arrivé à destination. Il changea de cabine et prit la suivante à destination de l’oeil du Condor. Ses affaires l’attendaient là-bas ainsi que sa base souterraine.
Un nouveau flash lui indiqua que son trajet était terminé. Il détendit ses jambes puis se figea. Des sons avaient envahi les lieux. Ils résonnaient jusque dans sa poitrine. Matheus les connaissait pour les avoir étudié au musée de l’Humanité : les premiers bruits enregistrés dans le vide intersidéral. Pourquoi et comment pouvait-il les entendre au fond du canyon de Noctis Labyrinthus ?
Elle sursauta. La nuit enveloppait le site et lui donnait un aspect énigmatique. Sujette à un violent mal de tête, Claire se massa les tempes. Seule devant son camp, elle sentit une profonde gêne écraser son plexus solaire. Elle chercha dans son MP3 et mit ses écouteurs. Elle enclencha la première piste, oubliant qu’il s’agissait de la séquence de Timothy. Ces sons l’angoissaient. Ils ressemblaient à s’y méprendre à des voix humaines. Elle arracha ses écouteurs et les jeta dans le sable, mais les notes continuèrent à hanter les lieux.
Elle se pinça les lèvres et retourna vers sa tente. Claire chercha son pull polaire et se dépêcha de l’enfiler, car après avoir souffert de la chaleur, elle était gelée.
Elle ressortit admirer les étoiles. Elle adorait contempler le reflet des astres sur les monticules de sable. Il mettait en évidence les géoglyphes à qui les observait avec attention. Soudain, il apparut. Dans un halo bleu, un homme avançait entre les lignes. Subjuguée, elle alla à sa rencontre sans savoir qui il était. Elle était fascinée par la beauté du phénomène.
Claire s’arrêta à une trentaine de centimètres de son hallucination. Lisse et scintillante, la forme semblait aqueuse. Elle entrouvrit légèrement la bouche. Plus que la surprise, l’admiration l’envahit. Persuadée qu’elle rêvait, elle souhaita se confronter à la réalité.
Elle posa sa paume sur la surface froide et visqueuse. Claire se sentit bien. Calme, elle n’avait plus ni chaud ni froid. La sensation qui gagnait tout son être l’appaisait. L’homme en face d’elle semblait normal. Plus grand que la moyenne, elle ne distinguaient pas sa bouche et son nez, tous deux couverts par un étrange appareil.
Il leva sa main à son tour et leurs doigts se touchèrent. En une fraction de secondes, son esprit s’éclaira d’un savoir nouveau. Claire vacilla. Saoule de connaissance, elle tomba à genoux. Son rêve disparut comme il était venue et la laissa empreinte au doute.
Il sursauta. L’interruption du signal le surprit. La jeune femme dans le halo orange venait de disparaître. Médusé, Matheus mit quelques secondes à le réaliser ; le charme était rompu. Il regarda autour de lui. Rien. Il pressa le pas et se dirigea vers sa base souterraine. Il voulait comprendre. Comment était-ce possible ?
Ils se ressemblaient et étaient pourtant si différents. Une fois à l’abri, il ôta ses branchies externes et se frotta lèvres et nez. L’inconfort de sa prothèse respiratoire disparut. Il se posa et réfléchit. Elle venait du passé et habitait la Terre, mais à quelle époque ? Les hommes avaient quitté la planète bleue depuis plus de mille ans !
Sa curiosité intellectuelle le poussait à renouveler l’expérience. Cependant, il avait l’impression de n’avoir été qu’un élément passif dans un phénomène bien plus grand que lui. Frustré, il réfléchit. Attendre lui sembla la meilleure solution.
Il s’installa sur le site de Noctis Labyrinthus de façon définitive. À la même heure, nuit et jour, il sortait de son bunker pour aller inspecter les lieux. Rien. Il plaça des détecteurs de mouvements ainsi que des caméras de façon à s'assurer qu’il ne manquerait aucune apparition lors du peu de repos qu’il s’accordait.
Du fond de son refuge, il ne la vit pas. Il l’entendit. Un signal sonore caractéristique résonna jusque dans les entrailles de Mars. La première séquence enregistrée dans l’espace ressemblait à une longue complainte.
Fébrile, il se précipita vers les ascenseurs. Une fois à la surface, il s’arrêta. Mi-émerveillé, mi-sceptique, il la regarda. Immobile, elle semblait flottait dans son halo orange.
Il se força à prendre du recul. Son esprit analytique conceptualisait cette rencontre comme une opportunité de finir ses études avec brio. Il n’imaginais pas Claire comme un véritable être humain, mais il voyait en elle une image d’Epinal. Obsolète, elle évoluait dans un monde mourant.
Matheus s’arrêta. Soudain terrorisé, il réalisa qu’il avait face à lui le passé de l’Humanité.
Ils apprirent, avec le temps, que le phénomène n’était observable que quatre minutes trente-sept secondes - durée de l’enregistrement de Claire - et que sa qualité variait en fonction de l’orbite terrestre. Soixante-seize millions de kilomètres et trois mille-deux-cent-sept ans les séparaient. Pourtant, ils échangeaient leurs idées avec une facilité déconcertante.
Une question récurrente les perturbait : étaient-ils en train de changer l’Histoire ?
Ils se regardèrent. Claire repositionna ses lunettes de soleil sur le haut de son nez. Elle venait de présenter Timothy à Matheus. En trois ans, le premier était passé responsable des projets visant à coloniser l’espace. Le second avait fini son doctorat et avait tu sa découverte, trop anxieux à l’idée d’interférer sur l’avenir de l’Humanité.
Ils discutèrent. Le phénomène, toujours inexpliqué, permettrait au scientifique de progresser. Timothy avait l’intention d’exploiter cette relation privilégié pour axer ses travaux sur Mars.
Matheus étudiait la possibilité que chaque géoglyphes de Noctis Labyrinthus le guident vers une époque précise. Le Condor lui servirait de référence.
Claire doutait, déchirée entre deux planètes et entre deux hommes.
Ils se séparèrent. La transmission s’interrompit. Le phénomène prit fin comme il avait commencé, sans raison ni explication.
Matheus observa une dernière fois le halo orange. Son estomac se serra. Il se tourna. Rien. Il se désolait de constater, que sur Mars, les rapports humains n’existaient plus.
Timothy soupira. L’ingénieur n’aurait plus à partager la jeune femme. Tendrement, il prit ses doigts et les baisa. Dorénavant, plus que sa carrière, son avenir avec elle lui importait.
Les lignes de Nazca n’avaient toujours pas livré leurs secrets. Heureuse de n’être pas seule et contente se sentir la force du soleil sur sa peau, Claire sourit. Il était temps d’avancer.
Elle inspira...
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