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tome 3, Chapitre 3 tome 3, Chapitre 3

Dans l'appartement désert, le jeune italien ouvre les yeux et lorsqu'il entre dans le salon inondé par le soleil, il s'étonne de l'heure tardive. Il se fait un café en lisant les dernières nouvelles, notamment le compte-rendu mensuel de l'état de la pollution à l'échelle mondiale qui continue sa lente décrue et surtout la partie relative à la montée des eaux qui se résorbe au fur et à mesure que la planète refroidit grâce aux efforts communs de ses habitants depuis un siècle. Le jeune homme s'attarde sur les pages des sorties littéraires et il hésite à commander un roman qui vient de paraîtrer aux Etats-Unis mais il calcule que le temps que le livre soit traduit en français et que les bateaux solaires traversent l'Atlantique, les avions n'étant plus utilisés pour le transport de marchandises sauf urgence, il aura sans doute perdu tout intérêt pour sa lecture aussi il s'abstient en se réservant le droit de l'acheter plus tard s'il n'a pas oublié ce projet. Surpris de se retrouver seul, il cherche le chat à qui il vient de donner à manger.

- Saturne, tu es où  ? Le petit-déjeuner est servi  !

Le chat ne vient pas et le jeune homme le cherche partout dans l'appartement jusqu'à le retrouver tremblant caché sous le lit. A genoux, la tête sous le meuble, le pianiste tend la main vers le félin dans l'espoir de le rassurer.

- Et bien, qu'est-ce qui ne va pas  ?

Le chat hume l'air et il se décide à sortir, talonnant son maître jusqu'à la cuisine où l'odeur du café embaume la pièce. Sa tasse à la main, le jeune homme l'observe avant de se rassurer, le chat a dû se faire peur tout seul. En chantonnant, il prend son temps pour laver la vaisselle et ranger un peu l'appartement avant d'aller marcher pour profiter du soleil, il se promène un long moment dans le quartier en chantonnant avant de rester un long moment à contempler la tour Eiffel.

- Dire que je la vois tous les jours de ma fenêtre et que je viens si rarement la regarder de près... songe-t'il en suivant les courbes de la structure de métal.

En cette belle journée de mi-mai, le pianiste a envie de flâner un peu mais il sait que du travail l'attend. Il hésite un long moment et il fait des détours pour se donner le temps de la réflexion et une excuse pour ne pas rentrer travailler. Les yeux levés vers le ciel, il observe en souriant un couple d'oiseaux qui semble se disputer sur la branche d'un arbre, en grande conversation piaillante et bruyante. L'homme rit de bon cœur et ses yeux se perdent dans l'azur où quelques nuages passent avec paresse. Il sent son cœur se gonfler de joie et il rit avec une gaîté toute enfantine. L'oreille attirée par le chant d'un oiseau qu'il tente d'identifier sans succès, il se concentre et il écoute plus attentivement.

- Je connais le nom de cet oiseau, ce chant, je le reconnais.C'est une tetta, une mésange. Mais où est se cache-t'elle, cette petite chanteuse emplumée  ?

Des yeux, Giuseppe cherche l'oiseau mais il a beau examiner les alentours avec attention, il ne la voit ni sur les arbres ni sous le rebord ou le sommet d'un toit. Il prête l'oreille mais il ne l'entend plus chanter. A regrets, il se retourne et il marche sur son lacet défait. Avec un cri, le pianiste tombe à terre sans dommage mais il hurle en voyant une bicyclette le frôler. Le conducteur de l'engin a freiné et il aide l'homme à se relever.

- Vous allez bien  ?

- Oui, je vais bien, j'ai eu surtout peur.

Sa voix tremble et l'accent de son pays natal ressort sans qu'il s'en rende compte.

- Je n'habite pas loin, ça va aller. Merci. dit-il après avoir remercié le vieil homme.

A grandes enjambées, le musicien se dirige vers son immeuble. Devant ses yeux, la scène se rejoue encore et encore. Il voit le vélo arriver sur lui et les roues passer à quelques centimètres de ses doigts.

- Et si j'avais perdu mes doigts  ? se murmure-t'il pour lui même. Si je ne pouvais plus jouer  ? C'est comme si je ne pouvais plus respirer. Comme si une partie de moi mourrait. Il me resterait d'autres arts accessibles voire d'autres instruments comme l'harmonica mais le piano, c'est quelque chose de magique.

Puis il rentre travailler, il regrette qu'Apollonia ne soit pas là et il espère qu'elle ne tardera pas trop, il n'a guère envie de rester seul après la mésaventure qu'il vient de vivre. Giuseppe monte les escaliers quatre à quatre et il espère que Saturne l'accueillira mais lorsqu'il ouvre la porte, il ne trouve nulle trace du chat noir. Il le cherche durant ce qui lui semble d'interminables minutes et il finit par le trouver endormi dans le panier à linge. Attendri, le musicien s'assied auprès de lui en le caressant du bout des doigts.

- Tu sais pourtant que tu n'as pas le droit d'être là. Pour cette fois, je ne dis rien parce que je ne suis pas d'humeur mais gare à toi si je t'y reprends.

Assis face au clavier du piano droit, Giuseppe se sent observé et il cherche le chat du regard pour se rassuré mais il sait qu'il est resté dans la chambre. Il se met à jouer des airs simples pour s'échauffer et il entend une chaise grincer à côté de lui. Le pianiste tourne la tête tout en continuant de jouer mais il ne voit rien de suspect aussi il se retourne bien vite pour lire la partition bien qu'il connaisse ces morceaux d'échauffement par cœur. Mal à l'aise de se sentir ainsi observé, le jeune homme accuse la chaleur de son malaise et il décide de faire comme si de rien n'était et de continuer à jouer malgré tout. Mais bientôt, l'homme aux cheveux frisés se trouble, il lui semble que quelque chose lui tourne autour en le dévisageant. Inquiet, il regarde dans la pièce et il remarque un moucheron qui vole en silence.

- Ce n'est donc que cela, je me disais bien que je n'étais pas seul. dit-il avec un rire forcé. Malgré tout, peu rassuré, il termine son morceau avant de quitter les lieux avec soulagement.

xXxXx

Une main se pose sur le piano et en parcourt les touches en silence. Des émotions naissent à son contact et un parfum lui revient, un rire cristallin puis des regrets amers lui emplissent le cœur.

- Combien d'années  ? murmure l'ombre dans le silence de la pièce.

La main posée avec légèreté sur les touches d'ivoire du piano ancien, l'ombre hésite  ; l'envie brûlante de jouer quelques notes l'emplit jusqu'au plus profond de son être mais elle sait que la musique pourrait effrayer l'homme qui vit ici et qu'elle entend chantonner dans la cuisine. Du regard, l'ombre cherche le violon d'ébène et d'argent et elle le voit qui l'appelle. L'instrument chante à son approche, ses cordes se mettent à vibrer imperceptiblement en une mélodie mélancolique et douce. L'ombre tend la main, hésitante et elle observe l'instrument. Elle reste en suspens d'interminables secondes puis elle le touche du bout des doigts avec douceur.

- Nous nous sommes retrouvés. Tu es encore de ce monde mais moi, je suis d'un autre monde. Si j'avais su que les choses tourneraient ainsi, j'aurais fait d'autres choix. Mais comment aurais-je pu anticiper notre destinée  ?


Texte publié par Bleuenn ar moana, 6 février 2019 à 12h33
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